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Blanche Maupas

De Wikimanche

Blanche Maupas.

Blanche Marie Herpin, épouse Maupas, née à Hudimesnil le 28 novembre 1883 [1][2] et morte à Avranches le 24 septembre 1962 [1], est une personnalité intellectuelle de la Manche.

« Pour la mémoire de Théophile »

17 mars 1915, à Souain, sur le front de Champagne. Parce que quelques jours auparavant, le 336e régiment d’infanterie en a assez de se faire hacher menu par la mitraille et les obus ennemis, il refuse de partir une nouvelle fois « à l’abattoir ». Quatre hommes payent pour cette rébellion. Quatre caporaux, « fusillés pour l’exemple », dont trois sont originaires de la Manche : Louis Lefoulon (Condé-sur-Vire), Louis Girard (Blainville-sur-Mer) et Théophile Maupas, instituteur au Chefresne. Le quatrième, Lucien Lechat du Ferré (Ille-et-Vilaine, près de Saint-James), avait été incorporé à Saint-Lô [3]. Quelques jours plus tard, Blanche Maupas, elle aussi institutrice, est informée de la mort de son mari.

Mais rien dans le courrier officiel n’indique qu’il a été fusillé et pour quelles raisons [4]. Alors, que dans le même temps, Blanche Maupas a également reçu des lettres de plusieurs compagnons de tranchée de son époux, notamment un courrier signé par une vingtaine d’officiers et sous-officiers du 336e, affirmant que Théophile Maupas est digne de toute leur estime, et s’engagent à en témoigner, si besoin [4].

C’est le début d’une bataille de dix-neuf ans pour Blanche Maupas, qui ne va avoir de cesse de réhabiliter la mémoire souillée de son mari. Appuyée par la Ligue des droits de l’homme, rejointe dans son combat par les veuves des trois autres fusillés de Souain, Blanche Maupas dépose une première demande de révision auprès de la Cour de cassation en 1921 [4]. Premier rejet. Deuxième recours déposé cinq ans plus tard. Deuxième rejet.

Blanche Maupas ne se décourage pourtant pas, et court de ministère en cabinet d’avocats. Enfin, le 2 mars 1934, la Cour spéciale de justice militaire se réunit à Rennes (Ille-et-Vilaine) pour réexaminer le dossier des quatre caporaux [4]. Le lendemain, 3 mars, le tribunal militaire rend son verdict et la justice, en concédant que l’ordre d’attaquer donné en 1915 au 336e d’infanterie était irréalisable [4]. Théophile Maupas et ses trois camarades sont réhabilités [4].

Blanche Maupas a gagné son combat, qu’elle racontera par la suite dans un livre intitulé Le Fusillé, publié en 1934. Dans sa revue de presse d’octobre 1934, Régis Messac écrit :

« Dans [ce] livre qu'il faut lire, Madame Maupas expose les circonstances atroces de la mort des quatre caporaux de Souain, parmi lesquels se trouvait son mari instituteur de la Manche. Elle dit le martyre qu'elle a enduré pour obtenir, dix-neuf ans après le crime, le verdict de réhabilitation acquittant Lechat, Girard, Lefoulon et Maupas de l'accusation retenue contre eux et déchargeant leur mémoire des condamnations prononcées. Elle dépeint l'insolente attitude de Maginot venu présider à Cherbourg, le 23 février 1924, le congrès national des anciens combattants, et répondant à l'interpellation : “Et Maupas ? — Je ne viens pas ici pour faire de la politique. Il est tard, allons donc déjeuner.” Elle révèle le nom de l'ordonnateur de l'exécution : le général Réveilhac et la tentation qu'elle eut d'aller le tuer dans sa maison, à Nantes. » [5]
Obsèques de Théophile Maupas,
le 9 août 1923, à Sartilly.

En 1923, elle obtient l'autorisation d'exhumer le corps de son mari enterré à Suippes (Marne). Théophile Maupas est réinhumé à Sartilly le 9 août 1923, en présence d'une foule considérable. Un monument est inauguré le 20 septembre 1925 à Sartilly, œuvre du sculpteur Paul Moreau-Vauthier.

Le 15 juin 1929, sa fille Jeanne Maupas épouse Jacques Lair à Octeville [3].

Sa vie inspire en 2000 une pièce de théâtre au metteur en scène Jean-Paul Allègre, Blanche Maupas, l’amour fusillé.

En 2009, le téléfilm historique « Blanche Maupas » réalisé par Patrick Jamain, relate son combat, avec dans les rôles principaux, Romane Bohringer (Blanche Maupas), Thierry Frémont (Théophile Maupas), Jean-François Garreaud (Albert), Sören Prévost (Vétard), Yves Afonso (Elzéard) [6].

Ce téléfilm est diffusé sur France 2 le 11 novembre 2009.

Cimetière de Sartilly, 2018.

Carrière d'enseignante

Blanche Herpin commence sa carrière d'enseignante en avril 1903 à Heussé comme stagiaire [3]. Elle y est titularisée en 1907 [3]. Après son mariage avec Théophile Maupas le 30 juillet 1907 à Heussé [7], elle obtient, comme lui, un poste à Rouxeville pour la rentrée suivante [3]. Le 1er janvier 1912, Blanche Maupas est nommée, avec son mari, au Chefresne [3]. Elle est nommée à Montbray en 1919. En septembre 1922, elle obtient un poste de directrice à l'école de filles à Sartilly. Le 1er février 1926, elle quitte Sartilly pour prendre la direction de l'école de filles d'Octeville. Ce départ est parfois mal compris et lui vaut quelques critiques [3]. « Beaucoup la croyaient gardienne du souvenir [de son mari], puis elle s'en va... », remarque le secrétaire général de la section départementale du Syndicat national des institutrices et instituteurs publics de France [3].

Elle est nommée directrice d'écoles maternelles à Cherbourg, le 18 septembre 1930 de celle de la rue de l'Alma à Cherbourg et en octobre 1931 de celle de la rue de l'Ingénieur-Cachin [3]. Elle fait valoir ses droits à la retraite le 28 novembre 1938 [3]. Elle a 55 ans.

Elle meurt à 78 ans, à l'hôpital d'Avranches, 59 rue de la Liberté. Elle demeure alors 72 rue de Mortain dans cette même ville [8], mais rien ne rappelle ce fait sur place [9].

Sa tombe jouxte le monument des caporaux de Souain. Elle est inhumée avec sa fille Jeanne (1910-1939).

Publications

  • Le Fusillé, Maison coopérative du livre, 1934, réédité en 1994 par les éditions Isoète.

Hommages

Blanche Maupas. La veuve de tous les fusillés.

Bibliographie

  • Macha Séry et Alain Moreau, Blanche Maupas La veuve de tous les fusillés, éd. L'Archipel, 2009.

Notes et références

  1. 1,0 et 1,1 - Acte de naissance n° 50.
  2. - Acte de reconnaissance n° 54.
  3. 3,0 3,1 3,2 3,3 3,4 3,5 3,6 3,7 3,8 et 3,9 « Obsèques du caporal Maupas, fusillé pour l'exemple en 1915 (Sartilly, 9 août 1923) », Le Didac'doc, n° 42, octobre 2013.
  4. 4,0 4,1 4,2 4,3 4,4 et 4,5 René Gautier (dir.), Dictionnaire des personnages remarquables de la Manche, tome 3.
  5. « Revue de la presse », Les Primaires, n° 58, oct. 1934, p. 651.
  6. « Blanche Maupas », allocine.fr, 2009 (voir en ligne).
  7. Acte de mariage, n°17, Heussé, 1907.
  8. Acte de décès n°117, 1962, Avranches où est mentionné le n°72 de la rue de Mortain. Acte signé par Léon Jozeau-Marigné, sénateur-maire .
  9. Ce numéro est maintenant dans la rue du Commandant-Bindel
  10. « À Cherbourg, l'université honore Blanche Maupas », Ouest-France, site internet, 10 novembre 2017.

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