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'''Tombelaine''' est une île de la [[Manche]] située dans la [[baie du Mont Saint-Michel]]. Elle fait partie de la commune de [[Genêts]].
'''Tombelaine''' est une île de la [[Manche]] située dans la [[baie du Mont Saint-Michel]]. Elle fait partie de la commune de [[Genêts]].


Le site est classé monument historique depuis [[1936]].<ref name=merimee>{{mérimée| PA00110408}}, base Mérimée, ministère de la Culture et de la Communication</ref>
Le site est classé monument historique depuis [[1936]] <ref name=merimee>{{mérimée|PA00110408}}, base Mérimée, ministère de la Culture et de la Communication</ref>.


==Description==
==Description==
[[Fichier:Henri Magron, Tombelaine.jpg|thumb|Tombelaine par Henri Magron.]]
Tombelaine est situé à égale distance (3 km) du [[Le_Mont-Saint-Michel|mont Saint-Michel]] et du continent <ref name=GB1>« Normandie », ''Les Guides Bleus'', éd. Hachette, 1921, p. 466. </ref>. L'ilot couvre une surface de 4 hectares pour un périmètre de 1,2 km <ref>« La baie entre vents et marées », ''Détours en France'', n° 143, mai 2010. </ref>. Sa surface est donc plus grande que celle du mont Saint-Michel, mais il est moins élevé. Son sommet est le pic de la Folie, qui culmine à 45 m au-dessus du niveau de la mer.
Tombelaine est situé à égale distance (3 km) du [[Le_Mont-Saint-Michel|mont Saint-Michel]] et du continent <ref name=GB1>« Normandie », ''Les Guides Bleus'', éd. Hachette, 1921, p. 466. </ref>. L'ilot couvre une surface de 4 hectares pour un périmètre de 1,2 km <ref>« La baie entre vents et marées », ''Détours en France'', n° 143, mai 2010. </ref>. Sa surface est donc plus grande que celle du mont Saint-Michel, mais il est moins élevé. Son sommet est le pic de la Folie, qui culmine à 45 m au-dessus du niveau de la mer.
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==Étymologie==
==Étymologie==
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==Histoire==
==Histoire==
[[Fichier:Tombelaine-chateau1.jpg|vignette|Château de Tombelaine : gravure de date inconnue, reproduite sur une carte postale ancienne.]]
[[Fichier:Ordre de démolition du château de Tombelaine.jpg|thumb|upright=0.7|Ordre de démolition du château de Tombelaine par Louis XIV, [[1666]].]]
[[Fichier:Ordre de démolition du château de Tombelaine.jpg|thumb|upright=0.7|Ordre de démolition du château de Tombelaine par Louis XIV, [[1666]].]]


Au XI{{exp|e}} siècle, deux moines, [[Anastase le Vénitien|Anastase]] et Robert, quittent le Mont Saint-Michel pour s'y retirer en ermites. En [[1137]], Bernard le Vénérable y fonde un prieuré et l'îlot devient un lieu de pèlerinage. L'église est dédiée à Notre-Marie-la-Gisante <ref name=GB1/>.
Au XI{{exp|e}} siècle, deux moines, [[Anastase le Vénitien|Anastase]] et Robert, quittent le Mont Saint-Michel pour s'y retirer en ermites <ref>[[Charles Le Breton]], « Étude sur la vie et les écrits de Robert de Tombelaine », ''Mémoires de la Société d'archéologie...d'Avranches, Mortain et Granville'', 1884, p.1-21 [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62111634/f13.item ''(lire en ligne)'']</ref>. En [[1137]], Bernard le Vénérable y fonde un prieuré et l'îlot devient un lieu de pèlerinage. L'église est dédiée à Notre-Marie-la-Gisante <ref name=GB1/>.


L'îlot est fortifié en [[1220]] <ref>Victor-Adolphe Malte-Brun, ''Manche (géographie, histoire, administration)'', 1882, réédité en 1980 par les Éditions du Bastion. </ref>, et occupé par les Anglais de [[1356]] à [[1450]]<ref name =ED>[[Étienne Dupont]], « Tombelaine ! », ''L'Ouest-Éclair'', 15 juin 1927. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6571181/f5.item.r=Tombelaine. ''(lire en ligne)'']</ref>, dans l'espoir de prendre le Mont. « Le capitaine Makin Langueur signe avec le duc de Bretagne une capitulation honorable, (..) l'artillerie seule est laissée dans la forteresse »
L'îlot est fortifié en [[1220]] <ref>Victor-Adolphe Malte-Brun, ''Manche (géographie, histoire, administration)'', 1882, réédité en 1980 par les Éditions du Bastion. </ref>, et occupé par les Anglais de [[1356]] à [[1450]] <ref name =ED> [[Étienne Dupont]], « Tombelaine ! », ''L'Ouest-Éclair'', 15 juin 1927. [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6571181/f5.item.r=Tombelaine. ''(lire en ligne)'']. </ref>, dans l'espoir de prendre le Mont. « Le capitaine Makin Langueur signe avec le duc de Bretagne une capitulation honorable, (..) l'artillerie seule est laissée dans la forteresse » <ref name =ED/>.


Au XVI{{e}} siècle, durant les [[Protestantisme dans la Manche|guerres de religions]], les fortifications érigées servent à [[Gabriel Ier de Montgommery]] qui en fait son repaire. En [[1592]], la forteresse se soumet au roi<ref name =ED/>. Dès [[1598]], les états de Normandie supplient le roi de démolir Tombelaine d'où les gentilshommes, font des incursions sur le peuple  et où ils se soustraient aux lois<ref name =ED/>.  
Au XVI{{e}} siècle, durant les [[Protestantisme dans la Manche|guerres de religions]], les fortifications érigées servent à [[Gabriel Ier de Montgommery]] qui en fait une base de ravitaillement<ref name = RD>[[Rémy Desquesnes]], ''Le Mont-Saint-Michel rendu à la mer'', Caen, éd. Conseil Régional de Basse-Normandie, 1998, p. 83.</ref>. En [[1592]], la forteresse se soumet au roi <ref name =ED/>. Dès [[1598]], les états de Normandie supplient le roi de démolir Tombelaine d'où les gentilshommes, font des incursions sur le peuple  et où ils se soustraient aux lois <ref name =ED/>.  


Au XVII{{e}} siècle, Nicolas Fouquet, surintendant des finances du royaume, achète l'îlot et transforme le prieuré en château<ref name=GB1/>. Après sa disgrâce ([[1666]]), Louis XIV ordonne la destruction de sa forteresse <ref name=GB1/> et de toutes les constructions qui couvrent le rocher<ref name =ED/>. Malgré les protestations des moines de l'[[abbaye du Mont-Saint-Michel]] qui avaient des droits sur le prieuré, la chapelle est rasée et la cloche du campanile volée<ref name =ED/>.
Au XVII{{e}} siècle, Nicolas Fouquet, surintendant des finances du royaume, achète l'îlot et transforme le prieuré en château <ref name=GB1/>. Après sa disgrâce en [[1666]], Louis XIV ordonne la destruction de sa forteresse <ref name=GB1/> et de toutes les constructions qui couvrent le rocher <ref name =ED/>. Malgré les protestations des moines de l'[[abbaye du Mont-Saint-Michel]] qui avaient des droits sur le prieuré, la chapelle est rasée et la cloche du campanile volée <ref name =ED/>. On ne connaît la forteresse de Tombelaine que par deux textes : un procès-verbal de visite du 5 juillet 1599, dressé par Pierre Delaunay, sergent royal de la [[vicomté d'Avranches]] et un mémoire de Chamillart, intendant de la généralité de Caen adressé en 1666 à Colbert et portant sur la question de la démolition des fortifications <ref name = RD/>.


À la [[Révolution française dans la Manche|Révolution]], Tombelaine est vendu comme bien national à M. Bienvenu de Genêts et on établit un sémaphore sur les ruines du château<ref name =ED/>. Tombelaine est ensuite propriété de la famille Tardif de Moidrey, puis de M. Tesnières qui la vend à une société<ref name =ED/>.
À la [[Révolution française dans la Manche|Révolution]], Tombelaine est vendu comme bien national à M. Bienvenu de Genêts et on établit un sémaphore sur les ruines du château <ref name =ED/>. Vers 1840, Choisnel, le guetteur du sémaphore s'improvise folkloriste, mêlant histoire et légendes, il attribue à Montgommery la frappe de fausse monnaie dans les grottes de l'îlot <ref name =ED/>. Tombelaine est ensuite propriété de la famille Tardif de Moidrey, puis de M. Tesnières qui la vend à une société <ref name =ED/>.


Alors que la société nommée Groupement national de la [[baie du Mont Saint-Michel]] désire en faire un lieu de résidence pour touristes, Tombelaine est achetée par l'État en [[1933]], puis classée en [[1936]] et [[1987]].
[[Fichier:Projet d'aménagement du rocher de Tombelaine.jpg|thumb|Projet d'aménagement du rocher de Tombelaine, [[1927]].]]


[[Fichier:Projet d'aménagement du rocher de Tombelaine.jpg|thumb|center|Projet d'aménagement du rocher de Tombelaine, [[1927]].]]
En [[1927]], la société nommée Groupement national de la [[baie du Mont Saint-Michel]] désire en faire un lieu de résidence pour touristes. Son conseil d'administration comprend l'amiral Degouy, le général Ferry, le premier président Gensoul, l'ancien sous-secrétaire d'État Gaston Vidal, le docteur Bornot (maire adjoint du 13ème), Monmirel, vice président de la confédération nationale des associations agricoles, le docteur Archambault et l'écrivain journaliste Georges Anquetil (1888-1945), promoteur du plan d'ensemble de la société<ref>« Le Mont Saint-Michel va avoir sa plage », ''L'Ouest-Éclair'', 19 février 1927.[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6570023/f4.image.''(lire en ligne)'']</ref>. Pour contrer le projet, suivant les protestations de [[Léopold Delisle]], le conseil général demande le classement de l'île aux monuments historiques<ref name = Maupomé>F. E. Maupomé, « Le sort de l'île de Tombelaine », ''L'Ouest-Éclair'', 10 juin 1927.[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6571134/f2.item. ''(lire en ligne)'']</ref>. L'annonce faite dans ''L'Ouest-Éclair'' du 8 mai 1927 que « L'île de Tombelaine ne sera pas classée comme monument historique » amène le député [[Gustave Guérin]] à demander au ministre de l'Instruction publique et des Beaux-arts, Édouard Herriot,  d'exposer les raisons de son refus<ref name = Maupomé/>. Le ministre rassure le député : à défaut du consentement du propriétaire, le classement peut être prononcé par décret en Conseil d'État avec une indemnité au propriétaire. Pour ne pas céder à une menace de changement que le propriétaire n'a ni la volonté, ni les moyens de réaliser, le classement est ajourné<ref name = Maupomé/>.


====Le Marquis de Tombelaine====
En [[1933]], le Groupement national de la Baie du Mont-Saint-Michel est déclaré en faillite par le [[tribunal de commerce de Granville]],  l'île de Tombelaine est mise en adjudication<ref>« L'île Tombelaine en adjudication », ''L'Ouest-Éclair'', 4  août 1933.</ref>, l'État s'en porte acquéreur pour {{formatnum:148785}} francs<ref>« L'îlot de Tombelaine a été adjugé pour 148 785 francs », ''L'Ouest-Éclair'', 1  décembre 1933.</ref>.  Finalement, Tombelaine est classée en [[1936]] et réserve ornithologique depuis [[1985]]<ref name=merimee/>.
: ''voir l'article détaillé '''[[Marquis de Tombelaine]]'''''
 
L'îlot est affecté en [[2010]] au [[conservatoire du littoral]], sa gestion est  confiée au [[Symel|syndicat mixte  des Espaces littoraux de la Manche]] qui en assure la surveillance et l'entretien<ref> [http://www.conservatoire-du-littoral.fr/siteLittoral/488/28-ilot-de-tombelaine-50_manche.htm Ilôt de Tombelaine] sur le site du conservatoire du littoral.</ref>.


==Faune==
==Faune==


L'îlot est actuellement une réserve ornithologique. On y voit des goélands, des aigrettes garzettes et des tadornes de Belon. On peut voir des phoques gris nager au large.
L'îlot est actuellement une réserve ornithologique, son accès est donc interdit entre le 15 mars et le 31 juillet. Il est site de nidification de [[Goéland marin|goélands]], aigrettes garzettes, [[Tadorne de Belon|tadornes de Belon]], des huitriers-pies et des hérons garde-bœufs, dernière espèce à avoir colonisé le site.  
 
On peut voir des phoques gris nager au large.


==Bibliographie==
==Bibliographie==
* [[Charles Le Breton]], « Étude sur la vie et les écrits de Robert de Tombelaine, moine du XI{{e}} siècle », ''Mémoires de la Société d'archéologie, de littérature, sciences et arts d'Avranches, éd. Tostain, Avranches'', 1884, p. 1- 56, [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62111634/f13.image ''(lire en ligne)'']
[[Fichier:L'îlot de la Baie du Mont-Saint-Michel Tombelaine par Robert Sinsoilliez.jpg|200 px|vignette]]
* Abbé A. Bouillet, «Tombelaine », ''La Normandie monumentale et pittoresque, édifices publics, églises, châteaux, manoirs, etc ....Manche, partie 2, éd. Lemasle & Cie'', Le Havre, 1899, p.183-188 [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6480990w/f255.item ''(lire en ligne)'']
* [[Charles Le Breton]], « Étude sur la vie et les écrits de Robert de Tombelaine, moine du XI{{e}} siècle », ''Mémoires de la Société d'archéologie, de littérature, sciences et arts d'Avranches, éd. Tostain, Avranches'', 1884, pp. 1-56, [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62111634/f13.image ''(lire en ligne)''].
* [[Émile-Aubert Pigeon]], '' Le Mont Saint-Michel et sa baronnie Genêts-Tombelaine'' (Avec les plaintes d'Avranches et les rôles inédits de ses trois ordres : clergé, noblesse et tiers-état, en 1789 : ouvrage orné de plans, de cartes et d'un grand nombre de dessins) ,  Avranches,  impr. de A. Perrin , 1901- reédité  à Bécherel (35190)  par  Anthare de Schuyter , 1997
* Abbé A. Bouillet, «Tombelaine », ''La Normandie monumentale et pittoresque, édifices publics, églises, châteaux, manoirs, etc ....Manche, partie 2, éd. Lemasle & Cie'', Le Havre, 1899, pp.183-188 [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6480990w/f255.item ''(lire en ligne)''].
* Victor Hunger, « Note sur la démolition de la forteresse de Tombelaine en 1666 », ''Mémoires de l'Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen'', 1911.[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6138594j/f241. ''(lire en ligne)'']
* [[Émile-Aubert Pigeon]], « Genêts-Tombelaine ou une ville déchue », ''Mémoires de la Société académique du Cotentin'', 1900. pp. 1-14 [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5658457g/f3.image. ''(lire en ligne)''].
* [[Robert Sinsoilliez]] , ''Tombelaine : l'îlot de la baie du Mont-Saint-Michel'', éd. Ancre de Marine, 2000
* Émile-Aubert Pigeon, '' Le Mont Saint-Michel et sa baronnie Genêts-Tombelaine'' (Avec les plaintes d'Avranches et les rôles inédits de ses trois ordres : clergé, noblesse et tiers-état, en 1789 : ouvrage orné de plans, de cartes et d'un grand nombre de dessins) ,  Avranches,  impr. de A. Perrin , 1901- reédité  à Bécherel (35190)  par  Anthare de Schuyter , 1997.
* [[Étienne Dupont]], ''Tombelaine : une citadelle anglaise et ses bastilles en France pendant la guerre de Cent Ans'', Caen, 1909.
* Victor Hunger, « Note sur la démolition de la forteresse de Tombelaine en 1666 », ''Mémoires de l'Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen'', 1911.[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6138594j/f241. ''(lire en ligne)''].
* [[Robert Sinsoilliez]] , ''Tombelaine : l'îlot de la baie du Mont-Saint-Michel'', éd. Ancre de Marine, 2000.


== Notes et références==
{{Notes et références}}
<references/>


== Articles connexes ==
== Articles connexes ==
* [[:Catégorie:Tombelaine (image)|Galerie d'images]]
* [[:Catégorie:Tombelaine (image)|Galerie d'images]]
* [[Marquis de Tombelaine]]
* [[Étienne Dupont]]
* [[Étienne Dupont]]
* [[Banc de Tombelaine]]
* [[Banc de Tombelaine]]


==Lien externe==
==Lien externe==
* Géolocalisation : {{GeoDMS|48|39|36.5|N|1|30|46|W}}
* [http://elec.enc.sorbonne.fr/monumentshistoriques/Annees/1927.html Procès verbaux de la Commission des Monuments historiques, année 1927], sur le site de la Médiathèque de l'architecture et du patrimoine.


[[Catégorie:Île de la Manche]]
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[[Catégorie:Site naturel de la Manche]]
[[Catégorie:Site naturel de la Manche]]
[[Catégorie:Baie du Mont-Saint-Michel]]
[[Catégorie:Baie du Mont-Saint-Michel]]
[[Catégorie:Monument historique de la Manche]]

Dernière version du 9 mars 2024 à 12:31

Tombelaine.

Tombelaine est une île de la Manche située dans la baie du Mont Saint-Michel. Elle fait partie de la commune de Genêts.

Le site est classé monument historique depuis 1936 [1].

Description

Tombelaine est situé à égale distance (3 km) du mont Saint-Michel et du continent [2]. L'ilot couvre une surface de 4 hectares pour un périmètre de 1,2 km [3]. Sa surface est donc plus grande que celle du mont Saint-Michel, mais il est moins élevé. Son sommet est le pic de la Folie, qui culmine à 45 m au-dessus du niveau de la mer.

Le Mont-Saint-Michel et Tombelaine, vus du bec d'Andaine.
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Étymologie

Vestiges des fortifications de Tombelaine, par Henri Magron.

Son nom naîtrait d'une légende celte, qui dit qu'une princesse nommée Hélène, fille du roi Hoël, fut enlevée par un géant et inhumée sur ce rocher. C'est ce que raconte, au 12e siècle, le trouvère Robert Wace dans son Roman de Brut. Son étymologie pourrait aussi être celte et signifier « petit mont Tombe » [4].

En 1827, Étienne de Jouy, de l'Académie française, écrit : « Pour éviter de donner à Tombelaine (ou Tomblaine) une étymologie commune avec le « mont Belenus », quelques analystes ont fait dériver son nom de « Tombuluna » (petite tombe). Mais on a repoussé cette version en faisant observer avec justesse que Tombelaine était plus grande que le mont Saint-Michel. D'un autre côté, un historien breton, d'Argentré, avance que ce rocher était désigné dans quelques bulles sous la dénomination de « tumba Helenœ » (tombe d'Hélène) et il justifie cette orthographe par une histoire. Il raconte que la nièce d'un roi de la Petite-Bretagne, nommée Hélène, fut enlevée par un chevalier espagnol qui la conduisit sur ce roc, qu'après y avoir consommé un hymen qui n'eut que le ciel pour témoin et le plus volage des dieux pour garant, le félon s'enfuit en laissant là la belle qui mourut de désespoir. Il ne manque à la vraisemblance de cette origine que d'être une date plus ancienne, car la belle Hélène dont parle d'Argentré vivait à la fin du XIe siècle et le rocher de Tombelaine était connu sous ce nom bien antérieurement à cette époque. Des recherches plus sévères ont amené à croire que c'était à l'époque de l'invasion des Romains dans ce pays qu'il fallait faire remonter ce nom de Tombelaine, d'une étymologie évidemment latine. » [5].

Histoire

Ordre de démolition du château de Tombelaine par Louis XIV, 1666.

Au XIe siècle, deux moines, Anastase et Robert, quittent le Mont Saint-Michel pour s'y retirer en ermites [6]. En 1137, Bernard le Vénérable y fonde un prieuré et l'îlot devient un lieu de pèlerinage. L'église est dédiée à Notre-Marie-la-Gisante [2].

L'îlot est fortifié en 1220 [7], et occupé par les Anglais de 1356 à 1450 [8], dans l'espoir de prendre le Mont. « Le capitaine Makin Langueur signe avec le duc de Bretagne une capitulation honorable, (..) l'artillerie seule est laissée dans la forteresse » [8].

Au XVIe siècle, durant les guerres de religions, les fortifications érigées servent à Gabriel Ier de Montgommery qui en fait une base de ravitaillement[9]. En 1592, la forteresse se soumet au roi [8]. Dès 1598, les états de Normandie supplient le roi de démolir Tombelaine d'où les gentilshommes, font des incursions sur le peuple et où ils se soustraient aux lois [8].

Au XVIIe siècle, Nicolas Fouquet, surintendant des finances du royaume, achète l'îlot et transforme le prieuré en château [2]. Après sa disgrâce en 1666, Louis XIV ordonne la destruction de sa forteresse [2] et de toutes les constructions qui couvrent le rocher [8]. Malgré les protestations des moines de l'abbaye du Mont-Saint-Michel qui avaient des droits sur le prieuré, la chapelle est rasée et la cloche du campanile volée [8]. On ne connaît la forteresse de Tombelaine que par deux textes : un procès-verbal de visite du 5 juillet 1599, dressé par Pierre Delaunay, sergent royal de la vicomté d'Avranches et un mémoire de Chamillart, intendant de la généralité de Caen adressé en 1666 à Colbert et portant sur la question de la démolition des fortifications [9].

À la Révolution, Tombelaine est vendu comme bien national à M. Bienvenu de Genêts et on établit un sémaphore sur les ruines du château [8]. Vers 1840, Choisnel, le guetteur du sémaphore s'improvise folkloriste, mêlant histoire et légendes, il attribue à Montgommery la frappe de fausse monnaie dans les grottes de l'îlot [8]. Tombelaine est ensuite propriété de la famille Tardif de Moidrey, puis de M. Tesnières qui la vend à une société [8].

Projet d'aménagement du rocher de Tombelaine, 1927.

En 1927, la société nommée Groupement national de la baie du Mont Saint-Michel désire en faire un lieu de résidence pour touristes. Son conseil d'administration comprend l'amiral Degouy, le général Ferry, le premier président Gensoul, l'ancien sous-secrétaire d'État Gaston Vidal, le docteur Bornot (maire adjoint du 13ème), Monmirel, vice président de la confédération nationale des associations agricoles, le docteur Archambault et l'écrivain journaliste Georges Anquetil (1888-1945), promoteur du plan d'ensemble de la société[10]. Pour contrer le projet, suivant les protestations de Léopold Delisle, le conseil général demande le classement de l'île aux monuments historiques[11]. L'annonce faite dans L'Ouest-Éclair du 8 mai 1927 que « L'île de Tombelaine ne sera pas classée comme monument historique » amène le député Gustave Guérin à demander au ministre de l'Instruction publique et des Beaux-arts, Édouard Herriot, d'exposer les raisons de son refus[11]. Le ministre rassure le député : à défaut du consentement du propriétaire, le classement peut être prononcé par décret en Conseil d'État avec une indemnité au propriétaire. Pour ne pas céder à une menace de changement que le propriétaire n'a ni la volonté, ni les moyens de réaliser, le classement est ajourné[11].

En 1933, le Groupement national de la Baie du Mont-Saint-Michel est déclaré en faillite par le tribunal de commerce de Granville, l'île de Tombelaine est mise en adjudication[12], l'État s'en porte acquéreur pour 148 785 francs[13]. Finalement, Tombelaine est classée en 1936 et réserve ornithologique depuis 1985[1].

L'îlot est affecté en 2010 au conservatoire du littoral, sa gestion est confiée au syndicat mixte des Espaces littoraux de la Manche qui en assure la surveillance et l'entretien[14].

Faune

L'îlot est actuellement une réserve ornithologique, son accès est donc interdit entre le 15 mars et le 31 juillet. Il est site de nidification de goélands, aigrettes garzettes, tadornes de Belon, des huitriers-pies et des hérons garde-bœufs, dernière espèce à avoir colonisé le site.

On peut voir des phoques gris nager au large.

Bibliographie

  • Charles Le Breton, « Étude sur la vie et les écrits de Robert de Tombelaine, moine du XIe siècle », Mémoires de la Société d'archéologie, de littérature, sciences et arts d'Avranches, éd. Tostain, Avranches, 1884, pp. 1-56, (lire en ligne).
  • Abbé A. Bouillet, «Tombelaine », La Normandie monumentale et pittoresque, édifices publics, églises, châteaux, manoirs, etc ....Manche, partie 2, éd. Lemasle & Cie, Le Havre, 1899, pp.183-188 (lire en ligne).
  • Émile-Aubert Pigeon, « Genêts-Tombelaine ou une ville déchue », Mémoires de la Société académique du Cotentin, 1900. pp. 1-14 (lire en ligne).
  • Émile-Aubert Pigeon, Le Mont Saint-Michel et sa baronnie Genêts-Tombelaine (Avec les plaintes d'Avranches et les rôles inédits de ses trois ordres : clergé, noblesse et tiers-état, en 1789 : ouvrage orné de plans, de cartes et d'un grand nombre de dessins) , Avranches, impr. de A. Perrin , 1901- reédité à Bécherel (35190) par Anthare de Schuyter , 1997.
  • Étienne Dupont, Tombelaine : une citadelle anglaise et ses bastilles en France pendant la guerre de Cent Ans, Caen, 1909.
  • Victor Hunger, « Note sur la démolition de la forteresse de Tombelaine en 1666 », Mémoires de l'Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen, 1911.(lire en ligne).
  • Robert Sinsoilliez , Tombelaine : l'îlot de la baie du Mont-Saint-Michel, éd. Ancre de Marine, 2000.

Notes et références

  1. 1,0 et 1,1 « Notice n°PA00110408 », base Mérimée (architecture), médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine, ministère de la Culture. , base Mérimée, ministère de la Culture et de la Communication
  2. 2,0 2,1 2,2 et 2,3 « Normandie », Les Guides Bleus, éd. Hachette, 1921, p. 466.
  3. « La baie entre vents et marées », Détours en France, n° 143, mai 2010.
  4. Site de la ville de Genêts (lire en ligne).
  5. Cité dans Manche, Les Éditions nouvelles, 1971, p. 84.
  6. Charles Le Breton, « Étude sur la vie et les écrits de Robert de Tombelaine », Mémoires de la Société d'archéologie...d'Avranches, Mortain et Granville, 1884, p.1-21 (lire en ligne)
  7. Victor-Adolphe Malte-Brun, Manche (géographie, histoire, administration), 1882, réédité en 1980 par les Éditions du Bastion.
  8. 8,0 8,1 8,2 8,3 8,4 8,5 8,6 8,7 et 8,8 Étienne Dupont, « Tombelaine ! », L'Ouest-Éclair, 15 juin 1927. (lire en ligne).
  9. 9,0 et 9,1 Rémy Desquesnes, Le Mont-Saint-Michel rendu à la mer, Caen, éd. Conseil Régional de Basse-Normandie, 1998, p. 83.
  10. « Le Mont Saint-Michel va avoir sa plage », L'Ouest-Éclair, 19 février 1927.(lire en ligne)
  11. 11,0 11,1 et 11,2 F. E. Maupomé, « Le sort de l'île de Tombelaine », L'Ouest-Éclair, 10 juin 1927.(lire en ligne)
  12. « L'île Tombelaine en adjudication », L'Ouest-Éclair, 4 août 1933.
  13. « L'îlot de Tombelaine a été adjugé pour 148 785 francs », L'Ouest-Éclair, 1 décembre 1933.
  14. Ilôt de Tombelaine sur le site du conservatoire du littoral.

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