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Pierre Yvon (1868)

De Wikimanche

Pierre Yvon.

Pierre Yvon, né à Granville le 2 juin 1868 et mort en mer le 21 décembre 1923, est une personnalité militaire de la Manche.

Biographie

Il est le fils d'un capitaine de port à Cherbourg [1].

En 1885, il entre à l'école Navale [2].

Il est en poste à Cherbourg de 1891 à 1894 avant d'embarquer sur l'aviso Mouette [2].

En 1900, il embarque sur le cuirassé Redoutable, puis en 1901 sur le croiseur Duguay-Trouin [2].

En septembre 1902, il revient à Cherbourg comme chef du secrétariat de la Majorité générale [2].

En 1907, il se voit confier le commandement du torpilleur Lancier, basé à Granville [2].

En 1915, promu capitaine de frégate, il prend le commandement du contre-torpilleur Obusier [2].

Il est promu capitaine de vaisseau en janvier 1918 [2].

En 1919, il est commandant du cuirassé Démocratie [3].

En janvier 1921, il est nommé commandant du cuirassé Patrie [2].

En mars 1922, il est nommé chef-adjoint du Service central de l'aéronautique (SC/Aéro), nouvellement créé et commandé par le vice amiral Lanxade [3].

Pierre Yvon meurt en mer au large de Sciacca (Italie), le , âgé de cinquante-cinq ans, alors qu'il participe en tant que passager à la septième sortie du ballon dirigeable Dixmude : l'appareil, frappé par la foudre explose au-dessus de la Méditerranée, au large de la Sicile [4].

C'est vers la fin de sa carrière militaire que le CV Yvon, se sachant rattrapé par la limite d'âge (fin de carrière prévue pour le 2 juin 1924 [3]), prépare sa reconversion dans le civil en se penchant sur le droit aérien et pour cela présente une thèse pour le doctorat « Sciences Politiques et Economique » à l'université de Paris, faculté de Droit. Il dépose pour cela son manuscrit : La guerre aérienne (contribution à l'étude de ses lois)[5]. Le samedi 14 juin 1924, la Faculté de Paris[6] le reçoit cependant à titre posthume lors d'une cérémonie émouvante : sa thèse trône sur une chaise, où ont été également posés son képi et ses gants blancs [1].

Pourquoi le capitaine de vaisseau Pierre Yvon était-il à bord du Dixmude lors de sa septième sortie ?

La présence de Pierre Yvon lors de la dernière sortie du Dixmude nécessite quelques approfondissements [4].

Tout d'abord, son arrivée au SC/Aéro au début 1922 coïncide avec la décision ministérielle de continuer l'aventure du Dixmude, ce zeppelin livré en 1919 par l'Allemagne au titre des dommages de guerre et qui, depuis, est immobilisé dans son hangar de Cuers (Var). En effet, ses ballonnets doivent être changés, et nécessite une commande très onéreuse de deux millions de francs requérant un arbitrage budgétaire compliqué en ces temps difficiles de l'après guerre. Cette commande est passée au premier semestre 1922 alors qu'est élaboré, à la même époque au SC/Aéro, le programme prévu pour les premières sorties du Dixmude : trois vols d'essais progressifs, puis une tentative d'arracher le record de durée de vol en dirigeable aux Britanniques. Enfin, pour conclure ce programme, avant que le Dixmude ne soit affecté aux frontières maritimes sud de la France, le vice amiral Lanxade propose au printemps 1922 à M. Raiberti, ministre de la Marine, que le Dixmude fasse un grand raid promotionnel à la gloire de la marine française entre Cuers et Dakar (Sénégal) : il est prévu que l'amiral Lanxade, commandant le SC/Aéro (très friand de vols en dirigeable) embarque avec son aide de camp, le lieutenant de vaisseau Levesque. Ce projet est avalisé par le ministre, et préparé dans le plus grand secret. Ce grand raid n'a pu être finalement programmé qu'en décembre 1923 car les vols du Dixmude n'ont repris qu'en août 1923 après réception des nouveaux ballonnets dont la réalisation a pris beaucoup plus de temps que prévu. Mais comme ce raid présentait des problèmes compliqués de logistique (ravitaillement en essence et en hydrogène à prévoir à Dakar) et de navigation (vol au dessus du désert), il est décidé qu'il soit abrégé et ne comporte qu'un long vol sur le désert, ainsi qu'un essai de ravitaillement à Alger (où il y a une base pour les « petits » dirigeables de la marine). Ceci aurait permis de clore les expérimentations de 1923 sur un coup d'éclat.

Le second point tient dans le caractère exceptionnel de ce raid, finalement annoncé depuis quelques mois par voie de presse. Aucun souci à se faire au vu des six premières sorties qui ont montré que son commandant, le lieutenant de vaisseau Jean du Plessis de Grenédan , connaît parfaitement son affaire et sait manœuvrer son dirigeable même dans des situations les plus critiques (comme dans la tempête de la sixième sortie, où le Dixmude a participé à une manœuvre de l'escadre de la Méditerranée au large de Tunis).

Aussi, tous les services de la Marine ayant un lien avec le Dixmude veulent en être ; sont ainsi prévus comme passagers le capitaine de frégate Hennique, commandant de la base de Cuers-Pierrefeu, le capitaine de vaisseau Beretta, membre de l’état-major des Frontières maritimes sud de la France (commandé par le vice amiral Fatou), et le lieutenant de vaissaeau Levesque, devenu en septembre 1923 membre de l'état-major de l'Escadre de la Méditerranée (commandé par le vice amiral Dumesnil). Il est alors parfaitement naturel qu'un membre du SC/Aéro soit présent pour ce raid qui se devait d'être retentissant : il semblerait que le contre amiral Gilly, nouveau commandant du SC/Aéro, en poste depuis septembre 1923, peu familier des dirigeables, n'ait pas eu les mêmes velléités que le vice amiral Lanxade, son prédécesseur, et a préféré y envoyer son adjoint, le capitaine de vaisseau Pierre Yvon, qui a eu en 1922 plusieurs occasions d'effectuer des ascensions en dirigeable (de durée n'excédant pas huit heures) et qu'une expédition de trois jours sur le Dixmude, même dans des conditions spartiates, ne semble pas rebuter.

Tout ceci explique que la presse, ne connaissant pas à l'époque tous ces détails, se soit étonnée de tous ces hauts gradés présents lors de ce vol, en particulier de ce que deux capitaines de vaisseau aient pris place en tant que passagers à bord du Dixmude, et en ait tiré des conclusions aussi erronées que farfelues.

Distinctions

  • Chevalier de la Légion d'honneur en 1902, il est promu officier de la Légion d'honneur en 1915 après le sauvetage du Branlebas, qui avait sauté sur une mine.
  • Croix de guerre (palme et étoile vermeil)

Hommages

  • Une rue de Granville [7], ainsi qu'un ancien canot de la station de sauvetage de Granville, portent son nom.
  • Son nom figure sur les monuments commémoratifs suivants :
    • Mémorial de l’Aéronautique navale à Hyères (Var)
    • Mémorial du dirigeable Dixmude à Pierrefeu-du-Var (Var)
    • Cimetière de Sciacca (Italie) : Ossuaire des héros du Dixmude

Notes et références

  1. 1,0 et 1,1 Wilfrid Lucas, Mémoires, éd. Beauchesne, 1967, p. 45.
  2. 2,0 2,1 2,2 2,3 2,4 2,5 2,6 et 2,7 « Pierre Édouard Marie Yvon », École navale, site internet.
  3. 3,0 3,1 et 3,2 Dossier militaire, Service Historique de la Défense, Vincennes.
  4. 4,0 et 4,1 Jean-Marie Nicolas, « Le dirigeable Dixmude (1920-1923) », Les cahiers de l'ARDHAN, numéro 44 de‎ novembre 2023. (ISBN 978-2-913344-57-0).ARDHAN : Cahier C-44
  5. CV Yvon : la guerre aérienne (contribution à l'étude de ses lois). Thèse pour le doctorat Sciences Politiques et Économiques. Édition Aérienne. Per Orbem, 4 rue Tronchet, Paris. 1924
  6. Président : Pr de Lapradelle. Suffragants : MM Basdevant et Rolland.
  7. Granville - En flânant dans tes rues, Groupe de généalogie et d'histoire, Université inter-âges de Granville, éd. Ocep, Coutances 1994.

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