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Histoire de La Mancellière-sur-Vire

De Wikimanche

Révision datée du 28 juillet 2007 à 15:41 par Bernardmancel (discussion | contributions) (a renommé Histoire de la Mancellière-sur-Vire en La Mancellière-sur-Vire au fil du temps: plus sentimental et plus proche de la réalité. L'histoire ce serait 100 pages minimum)

La Mancellière-sur-Vire
autrefois La Mancellière

Cette dénomination se rapporte peut-être à la famille Mansel (originaire selon certains érudits du Mans) dont un membre Fulco Mensel est cité en 1220 ; ou selon d'autres, à une famille Mansel d'origine scandinave.
La Mancellière est la plus ancienne commune connue avec le suffixe ière.
En 1893 La Mancellière se voit attribuer le déterminatif sur Vire afin d'éviter la confusion avec l'autre commune du même nom dans le sud du département, appartenant autrefois au diocèse d’Avranches.

Quelques dates anciennes :

Mansellaria, cité en 1056 lorsque Guillaume le Conquérant retira l'église aux chanoines de Rouen, d'où Mansellière. Par la suite, une copie du XVIe siècle transforma Mansellaria en Mancelaria.


Le territoire de la paroisse de La Mancellière, faisait l'objet de convoitise entre l'évêché de Coutances et les chanoines de Rouen, patrons de l'église :
- L'article 19 du jugement prononcé en 1263 à la suite d'un grand procès survenu entre l'évêque et les chanoines prébendés du lieu, accorda à ceux-ci pleine juridiction temporelle et spirituelle sur leurs vassaux.
- En 1319, Philippe V le Long, roi de France, confirme à la cathédrale de Coutances l'église de La Mancellière avec ses appartenances et la terre du Caillou (Manselaria eum Ecclesia et omnibus appendicas et terra quoe dicitur Caillou).
La construction de l’église

Le plan originel très simple de ce sanctuaire élevé au XIIe n’a pas été modifié :
- Le chœur est très ancien avec des maçonneries en épi (opus spicatum), côté sud un pan de mur de 2 mètres de largeur sur 4 m. de haut environ, et surtout côté nord 6 m. sur 5 m. (abîmés ultérieurement par l'agrandissement des baies).
- Une petite porte (aujourd'hui condamnée) en Roman plein cintre décoré de double rang de chevrons en dents de scie.
- A l'intérieur de l'église, deux petites frises romanes d'éléments géométriques et torsades à l'arc Triomphal sont de période ancienne.
- La structure de la nef serait de la même époque que le chœur. On retrouve tant au nord qu’au sud des petites parties de maçonneries en épi.
De nombreuses réfections du XVe au XVIIe ont modifié l’apparence de cette église : élargissement des baies, reconstruction de murs avec contre-forts, modification de l’arc triomphal, obstruction de la baie axiale du chœur, suppression de la tribune...
Tout ceci atteste de l’ancienneté de cette construction.

Le clocher
A bâtières est de construction plus récente, début XVIIe. L’on aperçoit une lignée de pierres calcaires travaillées de chaque côté du portail. Ces pierres laissent supposer la récupération de pierres du XIIe, sans doute pas de l’ancienne tour car elle devait être en bois ; des travaux y furent effectués en 1532.
- En 1718 le clocher contenait trois cloches qui avaient besoin d'être refondues, comme en fait foi un marché passé entre les paroissiens de La Mancellière et un nommé Baudouin fondeur en Lorraine. Lequel s'engageait à refondre la grosse cloche cassée et les deux autres pour les mettre d'accord moyennant la somme de 80 livres.
Ces trois cloches furent enlevées au cours de la révolution et vraisemblablement emmenées, comme la plupart des cloches de la région, à Saint-Lô où elles furent fondues pour faire des canons.

Une nouvelle cloche fut placée dans le clocher en 1809, fondue par les frères Grente de Hambye et bénie par L Calvez curé de la paroisse. Elle est nommée Joséphine Julie. Une seconde vint la rejoindre le 22 octobre 1989, nommée Thérèse Marie Georgette, et bénie par l’évêque, Mgr Fihey.

L’intérieur de l’église
- Le maître-autel serait du XVIIIe siècle. La niche centrale prend forme dans l’ancienne baie axiale du chœur qu’il y avait auparavant.
- Les fonds baptismaux à base hexagonale avec six pédicules hexagonaux (très abîmés) en pierre calcaire sculptée seraient du XVIe siècle.
- La charpente de la nef lambrissée, avec entraits et poinçons moulurés, des pointes de diamant sur les longerons coté sud, est de la fin du XVe début XVIe..
- L’entourage en pierre calcaire de la fenêtre du chœur coté sud , ainsi que deux piscines à ablutions au haut de la nef sont du XV ou XVIe.
- La première sacristie daterait des années 1760, donc de la même époque que le maître-autel. C’est de cette sacristie, construite grâce au don d’un chantre. Un érudit écrit que la construction de la sacristie eut pour conséquence la suppression de la baie romane axiale du chœur.
En 1877, le don de deux bienfaiteurs permet de bâtir une nouvelle sacristie à l’emplacement de l’ancienne insuffisante. La longueur 1,50m de plus que l’ancienne, la largeur égale à celle du sanctuaire, et la hauteur de 3 m.
- Dans le cimetière, un calvaire en granit repose sur trois couvercles de sarcophages en forme de toit, et sur deux morceaux de table d'autel très ancien (époque médiévale).
- La croix serait du XVIIe, le crucifix est creusé dans le granit.

- Le mobilier, à l'intérieur de l'église une copie, par Rican, d'un tableau du peintre Italien Titien (1488-1576) représente la Vierge à l'enfant et plusieurs saints. Ce tableau est un don de l'Etat en 1890.

- L'église possède également un calice dont le pied est gravé du blason double de l'Empire et de Montijo avec l'inscription "don de S.M. l'Impératrice Eugénie; 1862."

D’autres objets de décoration et de culte, ainsi que les pierres tombales ci-dessous décrites sont signalés dans l’inventaire supplémentaire à la liste des objets classés de 1988. Quant à l’église elle-même, c’est en 2005 qu’elle est inscrite sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Les pierres tombales :

L’allée centrale de la nef est pavée de huit pierres tombales en granit. Les inscriptions sont plus ou moins lisibles. Pour la plupart il s’agit de pierre concernant des prêtres, mais pas seulement.

- La 5e, devant la petite porte latérale, très riche d’inscriptions, au centre une couronne torsadée avec à l'intérieur un dessin représentant le personnage en grand apparat, portant une coiffure et une épée, marque de sa charge; tenant dans sa main un marteau et auprès de lui une pile de pièces de monnaie, ce personnage est un "monnoyer" de la Monnaie de St Lô.
L'inscription : "CI REPOSE LE CORPS DE ME PHILIPE DESHEE VIVANT MONOYER A ST LO DECEDE LE 4 AVRIL 1649 AGE DE 70 ANS LEQUEL A DONNE PAR TESTAMENT 40 LIVRES DE RENTE A L EGLIZE POUR CELEBRER LA MESSE MATINALE AU DIMANCHE ET 4 OBIZ EST 4 TEMPS".

- La 6e pierre tombale, plus longue que les autres, est probablement celle de Regnobert Tabard, curé de la paroisse en 1601. Elle comporte une croix grecque et un écusson avec un calice et quatre initiales M (maître) R.T. (initiales) P (prêtre). Le millésime est incomplet, ce qui semble vouloir dire que notre brave curé aurait fait graver sa pierre de son vivant, pensant ne pas aller plus loin que 1609 ; mal lui en prit, car en 1619 il préside deux assemblées de paroissiens. Ce n’est qu’en 1623 qu’il est dit ‘’feu’’.

Il est certain que l’emplacement actuel de ces pierres n'est pas celui d'origine, même si au XVIIe et XVIIIe il était de coutume d'inhumer de nombreuses personnes dans l'église. En 1858 celle de Philippe Deshée est signalée à l’entrée du chœur avec une autre.

Ces pierres furent de nouveau déplacées, probablement lors de la réalisation d’une aire dans le chœur début du XXe siècle, et regroupées avec l’ensemble des autres au bas de la nef, coté porte et autour des fonts baptismaux de ce coté également. C’est l’endroit où elles étaient au lendemain de la seconde guerre mondiale.

En 1947, au moment de la restauration de la nef (vitraux, sols, plâtres, réfection des bancs et suppression des autels secondaires) elles ont été alignées dans la nef là où elles sont aujourd’hui; sauf celle de Ph. Deshée, qui fut placée en exposition près de la porte du presbytère. Dans les années 1980, elle fut replacée dans l'église.

La Vire

Cette rivière est la limite, pour l’essentiel, entre les paroisses de La Mancellière et de Ste Suzanne sur Vire. Autrefois, elle délimitait aussi les diocèses de Coutances et Bayeux.

La Vire voit apparaître la construction de ponts pour faciliter la circulation entre les deux rives de cette rivière.
Avec sa vallée, elle est aussi une situation favorable pour le développement, aux XIXe et début du XXe, des nouveaux moyens de communication que sont le transport fluvial et le chemin de fer.

R. Lanchantin dans son ouvrage sur Condé-sur-Vire rapporte : En 1852 l'administration départementale projette de lancer un pont sur la Vire à Ste Suzanne’’. La réalisation effective n’eut lieu qu’au début du XXe, mettant fin au passage à gué entre La Mancellière et Ste-Suzanne dit Les Planches de Ste Suzanne.
Ce pont ressemblait, comme un frère jumeau (hormis le tablier), au pont de chemin de fer construit en 1890.
D'après un mémoire sur la visite de la rivière la Vire les 24 et 25 octobre 1716 une étude prévoyait de rendre la Vire navigable jusqu’à Condé-sur-Vire:

 "à la chaussée du moulin d'Aubigny, il sera fait une écluse à bassin".

Ce n'est qu’en 1830, un projet, et en 1833 une loi autorise la canalisation de la Vire entre St-Lô et Pont-Farcy. Ce qui nécessitera la construction de 19 écluses, dont deux à La Mancellière (le bourg et Aubigny) construites entre 1848 et 1861. Ce qui impliquait également la construction de canaux (photo de couverture) et de déversoirs

La longueur utile des écluses était de 23,10 mètres sur 4,20 de largeur, le coût moyen de 35.200 F. Un arrêté du préfet enjoignit aux propriétaires de terrains situés le long de la rive gauche d'ouvrir un espace de 24 pieds (7,80m) nécessaire pour le passage des chevaux, puisque les bateaux devaient être tractés par des chevaux, même si quelquefois ils étaient encore tirés par des hommes. Les portes des écluses à deux ventaux ont été placées entre 1902 et 1905

Le trafic journalier sur la Vire entre 1896 et 1905 :
45 gabares en bois de 14 à 18 m. de long et 3,55 de large et de 18 tonnes, tractées par un cheval.
4 chalands en tôle de 25 tonnes, et 5 en fer de 45 tonnes tractés par 2 ou 3 chevaux.
La vitesse était de 5 à 7 Km /heure en descente et 4 à 5 Km en montée.

Les marchandises transportées : 56 % matériaux de construction (sable, gravier, moellons venant des différentes carrières situées le long de la Vire, briques de Carentan, 42 % d'engrais et amendements (tangue de la baie des Veys, chaux de La Meauffe.

Ce moyen de transport était autrefois utilisé par les pèlerins se rendant à La Chapelle sur Vire.

Mais entre 1896 et 1905 le trafic a diminué de 30 %, concurrencé par le chemin de fer. C'était le début du déclin, et vers 1924 il n'y eut plus de trafic.

Le chemin de fer

L'ouverture de la ligne de chemin de fer d'intérêt général Saint-Lô – Guilberville – Vire, a lieu le 3 avril 1892, elle passe à La Mancellière. Ce qui nécessite la construction d'une maisonnette au passage à niveau de la Barberie, d'un hall à usage de gare pour les voyageurs, à proximité du bourg de La Mancellière, ainsi qu'un pont sur la Vire entre La Mancellière et Ste Suzanne construit en 1890 selon le principe d'assemblage par rivets mis au point par Gustave Eiffel.

Ce pont a aujourd'hui, le privilège d'être toujours en place, il est l’un des rares ponts sur la Vire à avoir passé au travers des bombes et des mines en 1944.

Ce train est affecté aux transports des voyageurs et marchandises, notamment les bovins vendus aux foires de Torigni.

En 1938, le trafic voyageurs est abandonné. Les destructions de 1944 condamnèrent l'exploitation marchandise au-delà de Torigni.

Le Petit train

Ce petit train, surnommé "le tacot" ou le "tue vacqs" (sic), existait déjà de Granville à Condé-sur-Vire, dont la gare était tête de ligne. Cette voie, construite en 1900, nécessitait un déchargement des marchandises pour les mettre dans l’autre train en direction de St-Lô. D’où la réalisation d’une prolongation de Condé à St-Lô par la pose d'un troisième rail intermédiaire (projet original, voir la photo) sur la voie du réseau d'intérêt général. La largeur de cette nouvelle voie est de 1 mètre (contre 1,435 m pour le grand train), et le petit train devait laisser toutes les priorités de circulation au train d'intérêt général.

Pour défendre ce projet, le Conseiller général du canton, et maire de la Mancellière, M. François André, déclare en 1919 à l'Assemblée départementale

: Ce prolongement est nécessaire pour le ravitaillement des habitants du Chef lieu à partir de Granville... A St-Lô le trafic sera considérable, voter ce projet c'est rectifier l’erreur commise. 

L’inauguration eut lieu le 16 septembre 1921. Le trafic devait être constitué de pommes, tonneaux à cidre, briques, paille, engrais, farine,..

Les érudits de l’époque le qualifient de: ‘’petite voie, petite locomotive, petit convoi, petite vitesse (18 km/h.) petit trafic (6 à 10 wagons), petite ambition (des élus)’’. Ajoutons pour le tronçon Condé – St-Lô, petite existence: 1921-1936.

Pour le 50è anniversaire du couronnement de la Vierge à la Chapelle-sur-Vire, le 26 mai 1936, pas moins de quatre trains spéciaux empruntent cette voie. C'est, aux dires d'anciens, le dernier convoi ayant utilisé cette voie, et sans doute le plus important de tous les temps.

Pourtant, dès 1872, un Inspecteur général des Ponts et chaussées clairvoyant avait prévenu que les chemins de fer d'intérêt local ne donneraient pas de quoi couvrir les frais de leur exploitation.