Napoléon Bonaparte et la Manche
De Wikimanche
Napoléon Bonaparte (1769-1821), aussi Napoléon Ier, empereur français, eut un intérêt tout particulier pour la Manche et tout spécialement Cherbourg.
Napoléon a en tête de développer le port de Cherbourg. La pointe du Cotentin se doit d'être protégée : la présence britannique dans les eaux de la Manche est une menace constante. Cherbourg est donc considéré à juste titre comme une ville et un port stratégique. Il dit dans le Mémorial de Sainte-Hélène :
- Ma défensive pourvue, je n'avais plus à m'occuper que de l'offensive, qui consistait à pouvoir réunir à Cherbourg la masse de nos flottes. Or, la rade ne pouvait contenir que quinze vaisseaux. Pour en accroître le nombre, je fis creuser un port nouveau ; jamais les Romains n'entreprirent rien de plus fort, de plus difficile, qui dût durer davantage! Il fut fouillé dans le granit à 50 pieds de profondeur; j'en fis solenniser l'ouverture par la présence de Marie-Louise, lorsque j'étais moi-même sur les champs de bataille de la Saxe.
- « J'obtenais de la sorte de la place pour 25 vaisseaux de plus. Ce n'était point assez encore, aussi comptais-je m'étendre bien autrement. J'étais résolu de renouveler à Cherbourg les merveilles de l'Egypte : J'avais élevé déjà dans la mer ma pyramide ; j'aurais eu aussi mon lac Mœris. Mon grand objet était de pouvoir concentrer à Cherbourg toutes nos forces maritimes, et avec le temps elles eussent été immenses au besoin, afin de pouvoir porter le grand coup à l'ennemi. J'établissais mon terrain de manière à ce que les deux nations tout entières eussent pu, pour ainsi dire, se prendre corps à corps ; et l'issue n'en devait pas être douteuse, car nous aurions été plus de 40 millions de Français contre 15 millions d'Anglais ; j'eusse terminé par une bataille d'Actium ; et puis que voulais-je de l'Angleterre ? Sa destruction ? Non sans doute ; je ne lui demandais que le terme d'une usurpation intolérable, la jouissance de droits imprescriptibles et sacrés, l'affranchissement, la liberté des mers, l'indépendance, l'honneur des pavillons ; je parlais au nom de tous et pour tous, et je l'eusse obtenu de gré ou de force : j'avais pour moi la puissance, le bon droit, le vœu des nations, etc. etc. ».
Il nomme Joseph Cachin en 1803 pour mener la réalisation de la rade, du nouvel arsenal et de l'avant-port militaire. Du 26 au 30 mai 1811, il rend une visite officielle à Cherbourg. Il fait de la ville un chef-lieu d’arrondissement en 1811, et, par extension, une sous-préfecture et un tribunal de première instance, puis la dote d'un tribunal des douanes puis en fait une préfecture maritime le 28 décembre 1812, à la place du Havre. Il décide également la construction d’un nouvel hôpital sur le terrain des Mielles pris sur le territoire de Tourlaville. Il envoie l'impératrice Marie-Louise inaugurer l'avant-port le 25 août 1813.
Le Granvillais Olivier Jourdan de la Passardière commande L’Épervier qui transporte Napoléon de l’île d’Aix sur le bateau anglais qui met ensuite le cap sur Sainte-Hélène, en 1815.
Les cendres de Napoléon sont rapatriées de Saint-Hélène en 1840 par La Belle Poule. La goélette entre en rade de Cherbourg le 30 novembre. Le transbordement du cercueil sur le vapeur Normandie intervient quelques jours plus tard. Le Normandie se charge alors de rejoindre Le Havre avant un acheminement des cendres sur la Seine jusqu'à Paris.
De 1840 à 1909, l'arsenal de Cherbourg conserve les pierres tumulaires du tombeau de Napoléon à Sainte-Hélène, restées sur la Belle-Poule lors du transfèrement et déposées depuis aux Invalides, même si Napoléon III avait demandé leur placement, ainsi que celui de la grille qui ornait le tombeau et préalablement présente à l'arsenal, au musée des souverains en 1862[1].
Napoléon III poursuit les projets de son oncle et le port militaire de Cherbourg se dote d'une protection immense sous forme de digues et de forts.
Chronologie
- 20 novembre 1801 : un décret de Bonaparte, alors Premier consul, crée une bourse du commerce à Cherbourg [2].
- 4 mars 1802 : un arrêté de Bonaparte agrandit les limites de Cherbourg par amputation des territoires d'Équeurdreville, Octeville et Tourlaville [2].
- 15 octobre 1802 : Bonaparte donne l'ordre définitif de reprise immédiate des grand travaux de la digue de Cherbourg [2].
- 15 mars 1803 : Bonparte adresse une lettre au général Berthier, ministre de la Guerre, lui enjoignant de renforcer les défenses des îles Saint-Marcouf, qui l'Angleterre vient de céder à la France avec le traité d'Amiens [2].
- 15 avril 1803 : un arrêté décide la création à Cherbourg d'un port de guerre de première classe [2].
- 1805 : les travaux du canal de Carentan à la mer débutent. Le projet napoléonien prévoit le creusement d'un canal trans-Cotentin afin de contrer le blocus continental britannique[3].
- 6 octobre 1809 : un décret crée des tribunaux du commerce à Cherbourg, Coutances, Granville et Saint-Lô [2].
- 25 mai 1811 : le couple impérial est reçu par le maire de Carentan, Chanvalon, en sa demeure, l'hôtel de Maillé, dans son grand salon, lors de son voyage pour Cherbourg.
- 28 mai-30 mai 1811 : visite de Napoléon Ier à Cherbourg. Il s'arrête à Saint-Lô au retour [4].
- 6 juin 1811 : Napoléon autorise la construction à Cherbourg d'un nouvel hospice, d'une halle aux grains, une nouvelle église, un égout et divers travaux [2].
- 19 juillet 1811 : le bulletin des Lois promeut Cherbourg au rang de chef-lieu d'arrondissement et y établit un tribunal de première instance [2].
- 1812 : Cherbourg devient le siège d'une préfecture maritime allant du Havre à Saint-Malo et d'un tribunal des douanes [2].
- 25 août-1er septembre 1813 : l'impératrice Marie-Louise est dépêchée à Cherbourg par Napoléon pour présider à la mise en eau du port militaire [2].
- 23 septembre 1813 : le conseil municipal de Cherbourg demande que la ville prenne pour nom Napoléonbourg [2].
- 24 novembre 1813 : le ministre de l'Intérieur rédige un projet de décret acceptant cette proposition : il ne sera jamais signé [2].
- 5 mai 1821 : décès de Napoléon dans l'île de Sainte-Hélène.
- 18 mai 1840 : le conseil municipal de Cherbourg adresse une pétition à la chambre des députés pour demander que la ville accueille le bateau ramenant les restes de Napoléon en France [2].
- 10 décembre 1840 : la goélette La Belle-Poule arrive à Cherbourg avec les cendres de Napoléon [2].
- 5 mai 1841 : le maire de Cherbourg Nicolas Noël-Agnès dépose une couronne d'or sur le cercueil de Napoléon à l'hôtel des Invalides à Paris.
Hommages
La ville de Cherbourg est liée pour toujours à Napoléon depuis l'édification d'une statue équestre en 1858. La place sur laquelle est érigée la statue et la plage se trouvant derrière elle prennent petit à petit le nom de place Napoléon et de plage Napoléon.
Pendant le règne de l'empereur, le port militaire de Cherbourg est dénommé « Port Napoléon ». L'appellation disparaît après.
Le 23 septembre 1813, le conseil municipal de Cherbourg décide d'adresser une demande à l'Empereur pour que la ville soit nommée « Napoléonbourg ».
Il existe une société historique consacrée à Napoléon Bonaparte dans la Manche : le Souvenir napoléonien de la Manche. Cette association veille à préserver les vestiges de l'époque napoléonienne [5].
Notes et références
- ↑ Le Journal du Loiret, 11 septembre 1862
- ↑ 2,00 2,01 2,02 2,03 2,04 2,05 2,06 2,07 2,08 2,09 2,10 2,11 2,12 et 2,13 Jean Le Jeune, Documents historiques sur le vieux Cherbourg et sa région, éd. La Dépêche, 1981.
- ↑ Dictionnaire des rivières et canaux, site internet, consulté le 13 décembre 2018.
- ↑ « Voyage officiel de Napoléon et de Marie-Louise dans la Manche, 26 mai-31 mai 1811 », Le Didac'doc n° 19, p.18, service éducatif des archives départementales de la Manche, mai 2011.
- ↑ Ouest-France, 23 mai 2007.