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Marcel Grillard

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Marcel Grillard, né à Longèves (Vendée) le 30 janvier 1893, mort à Bricquebec le 5 mars 1963, est un homme politique de la Manche, industriel laitier de profession.

La jeunesse

Né de parents agriculteurs, Marcel Grillard est le neuvième d'une famille de onze enfants. À l'adolescence, grâce à une bourse, il suit les cours de l'école agricole de Pétré (Vendée), « option laiterie ». Bon élève (deuxième de sa promotion), il souhaite entrer à l'école coloniale de Tunis, mais, alors qu'il est admissible, il est refusé à la visite médicale. Il lui est conseillé de suivre un régime lacté. Le meilleur moyen de suivre cette prescription lui semble être de travailler dans une laiterie. C'est de cette manière qu'il vient à travailler dans le Cotentin, tout d'abord à la laiterie anglaise Edwards de Cherbourg, puis à la Coopérative de Sainte-Mère-Église. C'est là que le repère Raymond Le Marchand, le fondateur de la laiterie-fromagerie de Rauville-la-Bigot. En 1912, confronté au départ de son directeur, Henri Claudel, il propose alors à Marcel Grillard de venir le remplacer.

L'industriel laitier

Marcel Grillard a 19 ans lorsqu'il arrive à Rauville-la-Bigot pour prendre la direction de la laiterie-fromagerie de La Chesnée[1]. Le dynamisme et la compétence dont il fait preuve justifient le choix de Raymond Le Marchand. Le nouveau dirigeant redresse la situation financière et développe l'activité de l'usine. La transformation quotidienne de lait passe de 2 000 litres à 50 000 litres en peu de temps[2].

Victime d'un accident de voiture au cours de son service militaire, Marcel Grillard en garde un handicap qui l'exclut de la mobilisation en août 1914. La laiterie conserve donc son directeur alors que plusieurs des établissements voisins doivent fermer pendant la guerre. Malgré les restrictions et la mobilisation des ouvriers, il parvient à maintenir la production de l'usine.

À la sortie de la guerre, les compétences de Marcel Grillard sont reconnues dans le métier. En 1919, il achète la laiterie de Rauville à son fondateur, ainsi que celle de Teurthéville-Hague. Il est sollicité par le conseil d'administration de la coopérative de Benoistville pour en prendre la direction (qu'il gardera jusqu'en 1949). On s'adresse également à lui pour organiser la création d'un groupe laitier regroupant ses usines, ainsi que celles de Sottevast, d'Yvetot-Bocage, du Val d'Ouve (Néhou), de Prétot, de La Haye-du-Puits, de Canville-la-Rocque et de Tonneville. En 1921, le groupe Établissements Grillard & Cie est donc créé. Marcel Grillard en est le président-directeur général et le siège de la société est fixé à l'usine de La Chesnée à Rauville-la-Bigot. Propriétaire de la majorité des actions à l'origine, il en rachète la quasi-totalité au fil des années.

Marcel Grillard regroupe toute la gestion et la maintenance au siège de Rauville et spécialise chaque laiterie sur une production spécifique. En 1925, suite à la fermeture de Nestlé à Cherbourg, il reprend une partie du ramassage et crée une usine à Tourlaville. Au fil des ans, il achète aussi les laiteries de Bricquebec et Querqueville. En 1926, son groupe collecte 200 000 litres de lait sur les arrondissements de Cherbourg, Valognes et Coutances, pour une production journalière de 35 000 fromages et 5 tonnes de beurre, sans compter la crème fraîche, la caséine et les autres produits laitiers[2]. Premier en Normandie à avoir lancé la production industrielle de fromages, il en hérite le surnom de "Citroën du Camembert".

Dès les années 1920, Marcel Grillard est membre de la Chambre de commerce de Cherbourg.

En 1930, les difficultés entraînées par la crise économique imposent une restructuration. Une société anonyme nommée Industrie laitière de Normandie et du Cotentin est créée dans laquelle le groupe Bretel Frères de Valognes devient majoritaire. Marcel Grillard devient directeur général de la nouvelle société. Le siège social est transféré à Bricquebec, où Marcel Grillard a lui-même emménagé en 1923.

Les années 1930 sont difficiles et l'occupation allemande ajoute à ces difficultés. Mais les années 1950 permettent de retrouver un niveau de collecte record. Malheureusement, l'actionnaire majoritaire Bretel Frères connaît des difficultés et ne peut financer la modernisation nécessaire de l'outil de production. Les deux groupes sont donc rachetés par une entreprise américaine déjà présente dans le département, Carnation Company, plus connue sous le nom de Gloria. La fermeture de toutes les laiteries-fromageries est prévue au bénéfice d'une nouvelle usine fabriquant du lait en poudre, dont Marcel Grillard obtient qu'elle soit construite à Bricquebec. La production démarre en 1962, un an avant son décès.

L'homme politique

En 1919, à 26 ans, Marcel Grillard devient conseiller municipal de Rauville-la-Bigot et surtout conseiller général du canton de Bricquebec. Il exerce ce mandat départemental de 1919 à 1940 et de 1949 à 1963. Entre deux, il est nommé conseiller départemental en 1943 jusqu'en 1945. Au moment où il cesse d'être le plus jeune conseiller général du département, il prend la présidence de la commission départementale, de 1935 à 1940 et de nouveau de 1951 à 1963[3].

En 1925, il devient maire de Bricquebec et le demeure jusqu'à sa mort, avec juste une interruption à l'après-guerre. Il cherche à développer la cité, « l'embellissant sans la défigurer, la modernisant sans l'enlaidir, sachant allier le nécessaire progrès au respect du passé »[4]. Il fait acheter le Vieux château par la municipalité qui le met en valeur[4]. Il transforme les halles en mairie. Il crée une salle de spectacle dans l'ancienne halle aux grains, qui est inaugurée le 31 janvier 1926[5]. Sa dernière réalisation sera la construction du collège de Bricquebec.

Marcel Grillard se présente aux élections législatives de 1928 et de 1958, mais échoue les deux fois.

Hommages

Le nom de Marcel Grillard est donné au collège de Bricquebec et à une rue de Siouville-Hague.

Bibliographie

  • Charles-Henri Grillard, « Marcel Grillard et l'industrie laitière du Cotentin », La Voix du donjon, n° 35 (La fromagerie de La Chesnée), n° 37 (Les établissements Grillard), n° 38 (La fromagerie et la vie politique), n° 39 (La crise des années trente), n° 44 (Les années de guerre), n° 45 (Après la guerre), n° 46 (1950, changement d'époque) et n° 51 (Le dernier combat de Marcel Grillard)
  • Marcel Grillard, « L'industrie laitière dans la Manche », La Manche, numéro spécial de L'Illustration économique et financière, 28 août 1926, p. 38. À noter dans le même fascicule, « Établissements Grillard & Cie », p. 42
  • Jacques Mabire, « Le groupe laitier de Rauville-la-Bigot (1902-1961) », L'Écho du terroir, n° 2, Printemps 1977

Notes et références

  1. André Dupont, Histoire du département de la Manche, tome VIII, éd. Ocep, 1989, p. 42.
  2. 2,0 et 2,1 « La Manche », numéro spécial, supplément de l'Illustration économique et financière, 28 août 1926.
  3. La commission départementale est chargée de la gestion permanente des affaires du département, ce qui nécessite une présence régulière à Saint-Lô.
  4. 4,0 et 4,1 Joseph Thiébot, « Le souvenir de Marcel Grillard », Quand Bricquebec honore ses poètes, Imprimerie commerciale, Cherbourg, 1964.
  5. « 120 ans en Cotentin 1889-2009 », La Presse de la Manche, hors série, novembre 2009, p. 87.