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Louis Le Mare

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Louis Albert Le Mare, né à Coutances le 24 septembre 1891 et mort dans la même commune le 12 mars 1955 [1], est une personnalité normande de la Manche.

Une histoire coutançaise

Louis Le Mare reçoit à sa naissance le prénom de son grand-père paternel. Ce grand-père avait installé en 1860 un commerce de bois dans le quartier du Pont de Soulles. Dans les années 1866-1868, celui-ci achète une partie des infrastructures du port de Coutances, construit une trentaine d'années plus tôt au même endroit, sur des terrains eux-mêmes achetés à l'hospice de Coutances. En 1872, l'aïeul procéde à l'installation d'une scierie mécanique, et utilise deux gabares pour accroître son activité d'importateur de matériaux de construction, restant ainsi le seul utilisateur du canal jusqu'en 1886. En 1890, l'entreprise revient à son fils, Albert, puis, en 1922, Louis Le Mare reprend l'entreprise familiale avec sa sœur, qui a épousé Gaston Drouet, futur président du Tribunal de commerce de Coutances [2].

Aérostier

Durant la Grande Guerre, Louis Le Mare est mobilisé dans l’aéronautique en qualité d’observateur sur ballon captif, ce qui lui vaut des blessures de guerre tandis que son ballon est plusieurs fois la cible de l’armée allemande. Sous-lieutenant à la 5e compagnie d’aérostiers de campagne, Louis Le Mare est, le 27 août 1916, cité à l’ordre de l’armée dans les termes suivants : « guetteur incomparable ; à l’affût, d’une manière inlassable, des moindres manifestations de l’activité ennemie, très sûr dans ses renseignements, a largement contribué à la démolition de nombreuses batteries » [3] Il est cité encore à l’ordre de l’aéronautique en avril puis en juillet 1918 pour « avoir fait preuve d’un absolu mépris du danger ». Pour ses actes de bravoure, le lieutenant Le Mare sera fait chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire le 29 juin 1934 [4].

En 1920, dans le cadre d’un match de football organisé au profit du monument aux morts de Coutances, Louis Le Mare joua arrière dans l’équipe dite des « Vieilles gloires », qui affronte pour l’occasion l’équipe des jeunes de la STEPS qui s’est choisi le lycéen Jean Follain comme gardien de but. Forts d’une cohésion spontanée, les anciens remportent ce match par 2 buts à 1 [5].

Entrepreneur de travaux publics…

L’entreprise familiale ayant été partagée, Louis Le Mare récupère à son profit une partie des terrains du pont de Soulles et y développa une activité d’entrepreneur de travaux publics. Simultanément, il exerce les fonctions de capitaine de pompiers, commandant la caserne de Coutances, et d'expert près le Tribunal civil de Coutances. Il apparaît également comme membre fondateur de l’Aéro-club de Coutances à la date du 1er mai 1935[6].

… et conteur

Ami des arts et des poètes, Louis Le Mare est lié au groupe du Pou qui grimpe (1914-1923). Il est l’ami de ses fondateurs : Joseph Quesnel (1897-1931), René Jouenne (1897-1923) et Jean Thézeloup (1885-1968), occasionnellement rejoints par des personnalités comme celle d’Edmond-Marie Poullain (1878-1951) ou de Georges Laisney (1883-1950) [7] Admirateur de Remy de Gourmont, ami aussi de Louis Beuve (1869-1949), poète de langue normande, Louis Le Mare consacre une partie de son temps libre à l’animation de festivités coutançaises.

Drakkar

Ainsi, au printemps 1933, dans le cadre de la préparation des festivités du millénaire normand, Louis Le Mare conçoit et fait construire par un chantier du Havre (Seine-Maritime), la réplique en miniature du navire d’Oseberg découvert par des archéologues en Norvège au début du XXe siècle, et visible au musée d’Oslo. Ce drakkar aux proportions réduites, long de 4,50 m, avait pour objet d’être « porté en triomphe comme une chaise sur les épaules des Coutançais à travers les foules du Millénaire », et apparaître « comme le glorieux symbole de la patrie régénérée » [8] par le rattachement du Cotentin et de l’Avranchin à la Normandie.

Le drakkar du Millénaire constitua par la suite le clou de l’exposition du 1er Salon de la mer à Cherbourg en août 1937 [9]. Il allait être accueilli par plusieurs musées jusqu’en Autriche et, dernièrement, par le musée des beaux-arts de Valenciennes (Nord) en 2014. Après avoir été longtemps exposé à la mairie puis après avoir trôné au milieu de la grande galerie du musée Quesnel-Morinière, le drakkar de Louis Le Mare a retrouvé, en septembre 2016, le grand salon de l’hôtel de ville de Coutances [10].

Éditeur

Toujours dans le cadre du Comité coutançais des fêtes du Millénaire, Louis Le Mare est, avec le docteur Bosquet et l’imprimeur Paul Bellée, l’éditeur de Notre millénaire [11], un ouvrage qui est élogieusement réceptionné par la presse, et que L’Ouest-Éclair présente comme « un ensemble d’études [exaltant] notre Cotentin, notre petite patrie normande ; la terre et sa race, son passé et son présent, son esprit et son âme. […] Ce « Mémorial » est un livre d’histoire et un poème. » [12] Le troisième souper des vikings est reporté de l’année 1935 au dimanche 2 août 1936, « au quart moins de huit heures » [13]. Louis Le Mare y récite à merveille « Les Cheminées » et « La Croix », puis comme le rapporte le journaliste de L’Ouest-Éclair « Les Traînes à bouais du marché d’Couteinches » de Louis Beuve, « avec une émotion prenante » [14].

À l’été 1938, à l’occasion du congrès de la Fédération des sociétés normandes à l’hôtel de Ville de Coutances, Louis Le Mare reprend « Les Traînes à bouais du marché d’Couteinches » qu’il déclame « avec un lyrisme émouvant ».[15] L'auditoire lui fait une véritable ovation.

Coutainville

Les tribunes de l'hippodrome du Martinet à Coutainville, 1929.
Les courses de l'hippodrome du Martinet à Coutainville.

Amateur de chevaux et commissaire de courses, Louis Le Mare est aussi l’un des ardents promoteurs du nouvel hippodrome du Martinet à Coutainville. Installé sur l’ancien marais, sa piste, longue de 1 600 m, permet de « suivre la course sans recours au jumelles et sans perdre les chevaux de vue » [16]. Son inauguration en août 1926 obtient un franc succès, mais il faut attendre l’année suivante pour voir édifier les tribunes. Un prix Louis-Le Mare, dans le cadre des courses de trot attelé, consacre chaque année au mois d’août la mémoire de cet ancien Coutainvillais (voir en ligne le prix Louis Le Mare du 21 août 2017).

Au tout début des années 1950, un jeune prêtre d’à peine trente ans, vicaire à Villedieu-les-Poêles, Marcel Lelégard (1925-1994), vient solliciter les conseils de l’entrepreneur coutançais sur l’acquisition qu’il veut faire des ruines de l’abbaye de la Lucerne-d’Outremer. En dépit de l’intérêt manifeste de cette perspective de restauration patrimoniale, et avec toute la sagesse qui le caractérise, Louis Le Mare lui répond : « Je crains, hélas ! que vous n’ayez pas assez d’une vie pour y parvenir. »

Une voie de Coutances, dans le quartier du Pont de Soulles porte aujourd’hui le nom de Louis-Le Mare.

Notes et références

  1. - Acte de naissance n° 94 - Page 89/167.
  2. « Dessin du port de Coutances par Joseph Le Dieu (Coutances, Juin 1874) », Le Dicdacdoc, n° 9, AD50, mai 2010 (voir en ligne).
  3. Base Léonore et L’Ouest-Éclair, n° 6258, 20 septembre 1916, p. 3.
  4. Cherbourg-Éclair, n° 11.590, 10 juil. 1933, p. 4.
  5. Base Léonore et L’Ouest-Éclair, n° 7421, 14 mai 1920, p. 4.
  6. Cherbourg-Éclair, n° 12243, 4 mai 1935, p. 3.
  7. Agnès Babois, « Les trublions du “ Pou qui grimpe” », interview de Delphine Secroun Livre/Échange, n° 10, novembre 2014.
  8. Le Courrier de la Manche, cité par le Moniteur du Calvados, n° 104, 4 mai 1933, p. 3.
  9. Cherbourg-Éclair, n° 13089, 29 août 1937, p. 3.
  10. « Le navire viking du musée cabote vers la mairie », Ouest-France (éd. de Coutances), 9 septembre 2016.
  11. Coutances, Paul Bellée, 1933 ; rééd. En fac-similé, ibid, 1983. Cf., Cherbourg-Éclair, n° 11847, 2 avril 1934, p. 5.
  12. L’Ouest-Éclair, n° 13663, 4 avril 1934, p. 9.
  13. L’Ouest-Éclair, n° 14510, 29 juillet 1936, p. 8.
  14. L’Ouest-Éclair, n° 14520, 8 août 1936, p. 6.
  15. L’Ouest-Éclair, n° 15236, 29 juillet 1938, p. 4.
  16. Cherbourg-Éclair, n° 10088, 1er sept. 1926, p. 5.