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Jean-François Gaultier

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Jean-François Gaultier, né à La Croix-Avranchin le 6 octobre 1708, mort à Québec (Canada) le 10 juillet 1756, est un médecin et naturaliste de la Manche.

Biographie

Cinquième et dernier enfant, et quatrième fils, de René Gaultier de la Perrière et de Françoise Collin, vivant au hameau le Bois, il est baptisé le jour de sa naissance, dans la maison paternelle avec comme parrain Guillaume Gaultier, sieur de Maison Neufve, son oncle, et Françoise Gérard, épouse de Nicolas du Boys, sieur du Bois [1].

Il étudie la médecine à Paris vers le milieu des années 1720, et exerce quelques années dans la capitale à partir du milieu des années 1730 jusqu'à sa nomination en 1741 au poste de médecin du roi au Canada, auquel le chanoine Pierre Hazeur de L'Orme et Henri-Louis Duhamel du Monceau lui avaient conseillé de postuler [1]. Il succède à Michel Sarrazin [2], décédé en 1734 [1].

Il embarque pour la ville de Québec en avril 1742 à bord du Rubis. À son arrivée, en septembre, il suit les cours de droit du procureur Louis-Guillaume Verrier ce qui lui permet d'intégrer le Conseil supérieur le 25 mars 1744 [3].

Représentant officiel de l'autorité royale en matière de santé publique, Gaultier est également le médecin attitré de l’Hôtel-Dieu et du séminaire de Québec [1]. Ses remèdes sont le thé des bois, la tisane de coquelicot, de chiendent, de réglisse, les saignées et purgations, la bière d’épinette contre le scorbut, le tartre stibié, l'eau de casse, les eaux minérales dont celles sulfureuses de Baie-Saint-Paul et des Éboulements, les émulsions, les vésicatoires... Comme Hippocrate, contre Thomas Sydenham, il considère que rhume, maladie de poitrine et fièvre peuvent être causés par une grande différence de température en hiver [3].

Proche de Duhamel du Monceau, d'Antoine et Bernard de Jussieu avant de partir au Canada[1], il est élu membre correspondant de l’Académie royale des Sciences le 27 mars 1745. Il collabore aux travaux de Duhamel du Monceau, pour lequel il installe en novembre 1742 à Québec la première station météorologique canadienne dont il fait un relevé quotidien jusqu'en 1756. Ses relevés comportent aussi des commentaires sur les cultures agricoles québécoises, les événements ornithologiques, botaniques, climatiques. Il se fait à l'occasion astronome pour observer des aurores boréales et une comète en 1745, sans qu'on lui accorde la construction d'un observatoire. Il correspond également avec Jean-Étienne Guettard, lui décrivant en 1749 les mines de Baie-Saint-Paul, les affleurements de la rivière du Moulin, ses sources sulfureuses, ainsi que les sources et formations géologiques des Éboulements, du cap aux Oies et de la Petite-Rivière, ce qui permet à l'académicien d'étendre sa théorie d’ensemble sur la distribution des minéraux et la structure des continents à l’Amérique du Nord, et de publier en 1756 la première carte géologique et minéralogique du Canada. Il envoie à René-Antoine Ferchault de Réaumur des spécimens d'oiseaux, de poissons et de mammifères et des descriptions de leurs mœurs. Grâce à Réaumur, Gaultier introduit au Canada des couveuses artificielles pour l’élevage des poulets en toutes saisons [3].

Il a également pour fonction d'herboriser et d'envoyer des plants en France au Jardin du roi[1]. Dans le cadre du développement scientifique de la colonie voulu en 1747 par Roland-Michel Barrin de La Galissonière, gouverneur par intérim, Gaultier réalise un premier registre botanique en s'appuyant sur les commandants des forts et postes de la Nouvelle-France [3].

Ainsi, à la suite de Louis Hébert et Jacques-Philippe Cornuti et Sarrazin, il inventorie la flore du Canada, selon la nomenclature botanique vernaculaire française et canadienne, se concentre en particulier sur les plantes ligneuses, distinguant les quatre espèces de pin de l’est du Canada, identifiant des mauvaises herbes. Dans la continuité des travaux de Sarrazin, il analyse les remèdes populaires, généralisant l'usage pharmaceutique de la capillaire et du thé des bois, écrit sur le sucre d'érable et la manufacture du brai et de la résine, engage à titre expérimental la construction de trois navires en bois canadiens, En 1749, il reçoit Pehr Kalm qui tire de son voyage le manuscrit Flora canadensis [3].

Il se marie le 12 mars 1752 à Sainte-Anne-de-la-Pérade avec Madeleine-Marie-Anne, fille aînée de Pierre-Thomas Tarieu de La Pérade, officier de marine et seigneur, et de Marie-Madeleine Jarret de Verchères, et est veuve de Richard Testu de La Richardière et de Nicolas-Antoine Coulon de Villiers[3]. Jean-François Gaultier rencontre sa future femme le 16 septembre 1749, à l'occasion d'une visite médicale à ce dernier, paralysé depuis 1741 par une blessure d'arme à feu et dont il préconise l'amputation du bras, opération réalisée par le chirurgien Antoine Briault qui entraine sa mort. Il écrit l'année de son union : « Je me suis enfin fixé en Canada [...] J'ai épousé une dame de condition. J'ai lieu d'être content pour tout ; mon épouse a beaucoup d'esprit, une grande éducation et une très grande économie pour l'ordre et l'arrangement d 'une maison et elle a du bien à espérer après la mort de son père, qui a 78 ans. Je viens de faire bâtir maison à Québec qui est grande et fort logeable. Je ne la quitterai probablement pas de sitôt. » [1]

Mais, touché par le typhus, apporté dans le Léopard de l'escadre de Montcalm, il est hospitalisé à l’hôtel-Dieu en mai 1743 et en juillet 1756 et meurt sans descendance le 10 juillet[3], un an avant son beau-père [1]. Sa veuve entre en 1774 chez les sœurs ursulines où elle meurt le 6 janvier 1776 [3].

Postérité

La guerre et la mort de Gaultier rompent les recherches scientifiques québécoises initiées par Louis Hébert et consolidées par Sarrazin. Un siècle plus tard, les chercheurs ignorant les travaux des premiers colons reprendront le plus souvent tout à zéro.

La production scientifique de Gaultier serait d'environ 1 500 pages manuscrites, datant pour moitié de La Galissonière. Duhamel en publie une grosse centaine de pages, Kalm et d'autres scientifiques 35 autres, l'essentiel de son œuvre se retrouvant indirectement dans les travaux de Duhamel, Kalm et Guettard.

William Kirby fait de Gaultier un des personnages secondaires de son roman de mœurs, The Golden Dog (1877).

Pehr Kalm baptise Gaultheria le thé des bois, « arbrisseau toujours vert, appelé en anglais 'wintergreen', dont les feuilles produisent par macération et distillation une essence antiseptique et antirhumatismale que l'on appelait à l'époque 'thé du Canada' » [4]. Environ 150 espèces existent à travers le monde dont le Gaultheria Shallon et le Gaultheria procumbens [3]. Gaultier popularise également la capillaire du Canada, de meilleure qualité que celle de Montpellier.

Hommages

Stèle.

Une stèle perpétue sa mémoire à La Croix-Avranchin, sur le côte de l'église Sainte-Trinité. En revanche, aucune célébration ne semble exister à Québec [1].

Notes et références

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,5 1,6 1,7 et 1,8 Stéphanie Tésio, « De La Croix-Avranchin à Québec, Jean-François Gaultier, médecin du roi, de 1742 à 1756 », Annales de Normandie, n°5, 2005.
  2. voir  Michel Sarrazin.
  3. 3,0 3,1 3,2 3,3 3,4 3,5 3,6 3,7 et 3,8 Bernard Boivin L«  Gaultier, Jean-François », Dictionnaire biographique du Canada en ligne.
  4. Dictionnaire canadien des noms propres, Larousse, Bibliothèque nationale du Québec, 1989.

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