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Daniel Saint

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Daniel Saint, né à Saint-Lô le 12 janvier 1778, mort à Saint-Lô le 23 mai 1847, est une personnalité artistique de la Manche, miniaturiste de son état.

Formation

Né d'un père médecin à Saint-Lô, Daniel Saint montre, dès ses premières années, de rares dispositions pour le dessin, et même pour quelques branches des arts mécaniques. Sa famille souhaite le voir entrer dans le corps du génie. Dans ce but, son père le conduit à Paris au début de 1794 afin de l'initier à l'étude des sciences mathématiques. Un apprenti ingénieur doit aussi s'initier à l'art du dessin. Saint n'a plus qu'à se perfectionner dans celui-ci, tandis que, dans les autres, il a presque tout à apprendre. On sait de quel côté se porte sa préférence, longtemps contrariée par les vœux paternels. Ce n'est qu'au bout d'une lutte de plusieurs années que le jeune artiste fait enfin reconnaître à tous qu'il a pris le parti qui doit le conduire le plus sûrement à la réputation et à la fortune.

Carrière

Il n'est guère âgé de plus de vingt ans lorsqu'il entre dans l'atelier de Regnault dont la place dans l'École française est alors marquée immédiatement après celle de David. L'élève profite au mieux des leçons du maître, et il gardera très longtemps l'habitude de travailler à la lampe, soit chez lui, soit dans divers ateliers. Parmi les études dont il enrichit son portefeuille dans ces laborieuses soirées se trouvent un grand nombre de dessins de la plus heureuse exécution, et, s'ils ont été dispersés, c'est une perte pour l'art et pour la réputation de l'artiste.

Au début du 19e siècle, la miniature ne compte guère que deux maîtres, le brillant Isabey et le patient Augustin ; le premier doué d'une facilité qui le conduit parfois près de la négligence, sans pourtant l'éloigner de la grâce ; le second, soigneux jusqu'à la minutie, difficile jusqu'au scrupule, et n'arrivant à la perfection du résultat que par des procédés qui rebuteraient la constance de tout autre.

C'est à celui-ci que Saint demande une première direction lorsque, quittant le crayon pour le pinceau, il se voue à l'étude de la miniature. Il ne fait, chez Augustin, que quelques copies et passe dans l'atelier d'Aubry. C'est un jeune peintre, qui, sans avoir la vogue des deux déjà nommés, tient un fort bon rang à leur suite et a déjà produit des œuvres très remarquables. C'est chez lui que Saint fait ses premiers portraits d'après nature, gratuitement, bien entendu. Un artiste à ses débuts n'est jamais payé qu'en complaisance de la part de ceux qui veulent bien lui faire le sacrifice de leur temps. De plus, Saint, très difficile pour lui-même, à l'exemple de son maître Augustin, demande beaucoup de temps au modèle dont il transporte les traits sur l'ivoire.

La baronne Colette de Reiset par daniel Saint.

Il réussit pourtant si bien que son troisième portrait, payé fort modiquement, est aussitôt suivi de plusieurs autres, dont le succès commence sa réputation, et en moins d'un an, la tire de la foule. S'écartant de la méthode d'Isabey, qui procède par le pointillé et de celle d'Augustin, qui a recours au glacis, il suit l'exemple d'Aubry : il emploie les hachures. Ainsi, il évite à la fois l'inconvénient du procédé laché de l'un et du travail léché de l'autre. Il obtient des effets de vigueur dans les tons et de relief dans le modelé qui donnent sous sa main à la miniature la puissance de la peinture à l'huile et que nul autre n'a jamais atteinte.

Un compatriote de Saint, et, comme lui, enfant de Basse-Normandie, l'excellent Robert Lefèvre aide beaucoup par ses conseils au développement du talent de Saint. Il le seconde aussi en lui faisant faire de nombreuses copies réduites des portraits de divers membres de la famille impériale dont Robert Lefèvre a l'entreprise.

Vers la fin de 1804, à l'époque du couronnement Saint, a déjà fait un pas immense dans sa carrière d'artiste. Trois grands portraits de femme exposés au salon de cette même année, ont révélé au public, dans la miniature, un nouveau talent rival, à son début, des deux seuls alors hors de ligne. Une étude surtout, pour laquelle a posé Élisabeth, ce célèbre modèle d'atelier, d'après lequel Girodet a tracé l'immortelle figure d'Atala au tombeau.

Cette étude, où l'artiste a retracé dans toute leur sévère pureté les lignes et les contours d'un type d'une irréprochable perfection, fixe la réputation de l'artiste. Aux copies des portraits de Lefèvre succèdent pour le jeune Saint, des portraits de l'impératrice Joséphine, de sa fille la reine Hortense, et du prince Eugène de Beauharnais, portraits faits d'après nature et si bien réussis qu'il doit les reproduire sous divers costumes et dans diverses dimensions.

En 1800 seulement, il obtient la faveur d'être admis auprès de Napoléon à l'heure du déjeuner. Là, obligé de saisir à la volée les traits de l'Empereur sans que celui-ci pose un seul instant, il sait allier la plus parfaite ressemblance à la plus heureuse expression de physionomie. Le succès du peintre suscite contre lui des jalousies. Il en résulte une intrigue qui rompt ses relations avec la cour impériale après le second mariage de Napoléon. Cet échec, non mérité, ne porte pas préjudice aux intérêts de Saint, qui est alors dans toute la force de son talent. Parmi les grandes études qui lui font honneur, il faut citer le beau portrait de Parfait Augrand, graveur ; celui d'un bel enfant blond et surtout deux portraits d'hommes âgés qui font partie de la collection du Louvre, l'un d'après le « père Lanvin », ancien portier de Saint et l'autre qui représente un astronome. Enfin, un véritable tour de force couronne tant de travaux : le portrait d'une belle femme un peu sur le retour, au teint fleuri, aux traits reposés, vêtue de blanc, coiffée d'un léger bonnet orné de rubans roses. Cette figure s'harmonise de la manière la plus heureuse avec un fond de paysage dans le genre Watteau.

Lors de la Restauration, Saint reçoit la Légion d'honneur. Mais les succès naissants de Mme de Mirbel et la faveur exclusive qu'elle acquiert auprès de Louis XVIII écartent Saint de la nouvelle cour. Cependant, il garde la faveur du public. Il fait même alors le portrait de M. Decazes, l'une de ses œuvres remarquables.

Dans les dernières années de sa vie, Saint, qui s'occupe moins de la miniature, s'adonne à l'aquarelle. Il forme plusieurs élèves distingués parmi lesquels MM. Cœuret, Milon et Mouret. En 1842, il subit une attaque cérébrale et ne fait que languir jusqu'à sa mort, survenue à Saint-Lô, le 23 mai 1847.

Il est inhumé au cimetière de Saint-Lô.

Source

  • P.A. Vieillard, Annuaire du département de la Manche, Saint-Lô, Imprimerie d'Hélie fils, 1852.

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