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Combat naval du Kearsarge et de l'Alabama (1864)

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Le combat vu par Louis Le Breton.

Le combat du CSS Alabama contre l'USS Kearsarge est une bataille navale opposant deux navires américains dans le cadre de la Guerre de sécession au large de Cherbourg, le 19  juin 1864. Le premier coule sous les feux du second à l'issue de l'affrontement.

Déroulement

Raphael Semmes, capitaine de l'Alabama.
Les Cherbourgeois massés sur les hauteurs.

Pendant la Guerre de sécession aux États-Unis d'Amérique, la corvette corsaire des forces sudistes américaines CSS Alabama, construite à Liverpool en 1862, écume depuis de longs mois toutes les mers du globe où elle a brûlé et coulé 65 bâtiments de commerce des armateurs américains en trois ans [1].

Les Nordistes le pourchassent jusque dans les eaux françaises, pays resté neutre dans ce conflit.

Le 11 juin 1864, le CSS Alabama, commandé par le capitaine Raphaël Semmes, se présente en rade de Cherbourg [2]. Il met à profit cette escale pour remettre en état sa coque, notamment son doublage de cuivre qui est déchiré. Il profite également pour refaire son approvisionnement en charbon.

Le consul américain, Édouard Liais, fait prévenir la frégate nordiste Kearsarge.

La frégate, commandée par John Winslow, qui a servi sur le même navire que Semmes lors de la guerre contre le Mexique [3], se présente devant Cherbourg le 14 juin, entre en rade et ressort pour surveiller un éventuel mouvement du CSS Alabama[2].

L' Alabama sort du port par la passe ouest le dimanche 19 juin, à neuf heures et demie du matin, après avoir fait tous ses préparatifs de combat. Aussitôt le Kearsarge se dirige vers la haute mer pour sortir des eaux territoriales et ne s'arrêta qu'à 12 kilomètres environ de la digue de Cherbourg [1]. Les deux navires de troisième classe ont des caractéristiques proches : 1 040 tonneaux, 8 canons et 120 hommes pour l'Alabama, 1 031 tonneaux, 7 canons et 162 hommes pour le Kearsarge[2],[4]. Les flancs de ce dernier, davantage hors de l'eau du fait d'un chargement plus faible, sont protégés en les recouvrant en partie de ses chaînes d'ancre[1].

En même temps, la frégate cuirassée La Couronne s'avance jusqu'aux limites conventionnelles de la juridiction française [5]. De nombreux Cherbourgeois et des touristes attirés par l'inauguration du casino quelques jours auparavant, se rendent sur les hauteurs et les digues pour assister au combat. Leur faveur semble se porter davantage sur le navire sudiste [1]. « Les télescopes et les longues-vues se louaient à prix fou ; mais à douze milles, distance à laquelle les deux navires devaient se rencontrer, il était difficile de pouvoir distinguer aucun détail des manœuvres. » [6].

Le Kearsarge se dirige vers l' Alabama pour tenter l'abordage et n'est touché par aucune des trois premières bordées. À 800 mètres environ de l' Alabama, le Kearsarge tourne pour lâcher sa bordée. Pour l'empêcher de regagner les eaux françaises, le Kearsarge se place devant l' Alabama, puis tourne autour de lui tandis que la canonnade se poursuit des deux bords. Les Sudistes lancent 370 coups de canons et touchent à 28 reprises dans ses agrés et treize dans la coque du fédéré [4], qui, lui, inflige 173 fois coups plus dévastateurs à son adversaire sans blindage. Une heure plus tard, l' Alabama commence à sombrer et hisse le drapeau blanc. Gravement endommagé, il coule face à la grande rade de Cherbourg.

Le Kearsarge recueille une cinquantaine de marins de l' Alabama, qu'il débarque à Cherbourg et que la France prend sous sa protection [7]. Tous les blessés sont soignés à l'hôpital maritime de Cherbourg [6]. Le steamer anglais Deerhound, qui assiste au combat, sauve quarante marins, parmi lesquels le capitaine Semmes et treize officiers [7]. Son capitaine John Lancaster refuse de les rendre à Winslow comme prisonniers de guerre [1]. Il les emmène sans perdre de temps à Southampton [6]. L'Alabama indique qu'il a eu six tués, un officier et un marin noyés, et seize blessés [7]. Le capitaine Semmes est grièvement blessé à la main [7].

Quant à la frégate Kearsarge, « très endommagée » [7], elle entre au port en vainqueur.

Témoignage de Valérie Feuillet

Un combat sans merci.

Valérie Feuillet assiste au combat depuis la digue. Elle raconte l'événement dans Quelques années de ma vie.

lire l'article détaillé Témoignage de Valérie Feuillet sur le naufrage du CSS Alabama

Postérité

Vu par Édouard Manet.
Maquette du CSS Alabama (échelle 1/33) réalisée par le club de modélisme naval Roger Delarocque de Cherbourg.

De cette bataille, Édouard Manet peint Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama (1865). Le bateau que l'on voit au premier plan est « le bateau-pilote du père Gosselin, lequel sauva les naufragés » [8].

Deux Sudistes et un Nordiste sont inhumés côte à côte au cimetière d’Octeville [9].

La cloche de l'Alabama, repêchée en 1936 par un plongeur anglais connait plusieurs propriétaires avant que la Cour du district de New Jersey n'en donne la possession au gouvernement américain, le 13 mai 1991 [3].

L'épave de l'Alabama est découverte le 30 octobre 1984 devant Querqueville par près de 60 mètres de fond [10]. La France et les États-Unis officialisent leur coopération pour la sauvegarde de cette propriété américaine par un accord signé à Paris le 3 octobre 1989 [3].

Le canon pivotant Blakely, remonté en 1994 de l'épave de l'Alabama est exposé à la Cité de la Mer à Cherbourg-en-Cotentin [9].

Cherbourg est le seul site officiel de la guerre de Sécession hors des États-Unis. Cette reconnaissance par l'association Civil War Preservation Trust est marquée par la stèle dévoilée le 23 septembre 2004 à la Cité de la Mer [9].

En 2014, le club de modélisme naval Roger Delarocque, section de l'Union laïque Jean Macé (ULJM) de Cherbourg, réalise une reproduction à l'échelle 1/33 (2 m) du navire. Celle-ci est régulièrement exposée dans la région, notamment au salon Maquettexpo à la Cité de la Mer.

Bibliographie

Livres
  • Paul Ingouf, Coulez l'Alabama !, éd. La Dépêche, 1976
  • Roy MacNab, The Cherbourg Circles, éd. Robert Hale Ltd, 1994 (en anglais)
  • Jean-Pierre Deloux, Le Corsaire Alabama, E-dite, 2001
  • Jacky Desquesnes, Duel au large (La guerre de Sécession devant Cherbourg), éd. Charles Corlet, 2014
Articles
  • Émile de La Bédollière, « Guerre de Sécession », Le Journal Illustré, n° 22, 10-17 juillet 1864
  • Jeff Demange, « La guerre de Sécession au large de Cherbourg », Historama, n° 330, mai 1979
  • « Alabama, touché, coulé », Normandie Magazine, n° 195, sept.-oct. 2004

Notes et références

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 et 1,4 Annuaire des deux mondes : histoire générale des divers états, Revue des deux mondes, 1864-1865, p. 701-702. Sur Gallica de la BNF.
  2. 2,0 2,1 et 2,2 Timothée Trimm, « Le journal du commandant Semmes », Le Petit journal, 21 septembre 1864.
  3. 3,0 3,1 et 3,2 Tullio Scovazzi, « Les épaves de navires d'État », Annuaire français de droit international, volume 52, 2006, pp. 400-417. (sur persee.fr).
  4. 4,0 et 4,1 Almanach du Magasin pittoresque, 1865.
  5. Trois milles nautiques à cette époque contre 12 depuis 1958.
  6. 6,0 6,1 et 6,2 « L'Alabama », La Presse, 22 juin 1864.
  7. 7,0 7,1 7,2 7,3 et 7,4 La Presse, 21 juin 1864.
  8. Centenaire de la bibliothèque municipale de Cherbourg, Impr. Périgault, Cherbourg, 1932, p. 67.
  9. 9,0 9,1 et 9,2 « Les États-Unis se souviennent », Journal de la Communauté urbaine de Cherbourg n° 30, septembre 2004.
  10. Fergus, « Guerre de Sécession : la bataille de Cherbourg », Cent papiers, site internet, 21 août 2019 [http://www.centpapiers.com/guerre-de-secession-la-bataille-de-cherbourg/ (lire en ligne).

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