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[[Fichier:Durand-Brager- Battle of the USS Kearsarge and the CSS Alabama 1864.gif|thumb|''Le combat au large de Cherbourg.'']]
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Le '''combat du ''CSS Alabama'' contre l'''USS Kearsarge''''' est une bataille navale opposant deux navires américains dans le cadre de la Guerre de sécession au large de Cherbourg, le {{Date naufrage|19|6|1864|Combat naval à Cherbourg (1864)}}. Le premier coule sous les feux du second à l'issue de l'affrontement.
Le '''combat du ''CSS Alabama'' contre l'''USS Kearsarge''''' est une bataille navale opposant deux navires américains dans le cadre de la Guerre de sécession au large de Cherbourg, le {{Date naufrage|19|6|1864|Alabama}}. Le premier coule sous les feux du second à l'issue de l'affrontement.


== Déroulement ==
== Déroulement ==
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Les Nordistes le pourchassent jusque dans les eaux françaises, pays resté neutre dans ce conflit.
Les Nordistes le pourchassent jusque dans les eaux françaises, pays resté neutre dans ce conflit.


Le [[11 juin]] 1864, le ''CSS Alabama'', commandé par le capitaine Raphaël Semmes, se présente en [[rade de Cherbourg]]<ref name=petitjournal>Timothée Trimm, « Le journal du commandant Semmes », ''Le Petit journal'', 21 septembre 1864.</ref>. Il met à profit cette escale pour remettre en état sa coque, notamment son doublage de cuivre qui est déchiré. Il profite également pour refaire son approvisionnement en charbon.
Le [[11 juin]] 1864, le ''CSS Alabama'', commandé par le capitaine Raphaël Semmes, se présente en [[rade de Cherbourg]]<ref name=petitjournal>Timothée Trimm, « Le journal du commandant Semmes », ''Le Petit journal'', 21 septembre 1864.</ref>. Il met à profit cette escale pour remettre en état sa coque, notamment son doublage de cuivre qui est déchiré. Il profite également pour refaire son approvisionnement en charbon.


Le consul américain, Édouard Liais, fait prévenir la frégate nordiste ''Kearsarge''.
Le consul américain, Édouard Liais, fait prévenir la frégate nordiste ''Kearsarge''.


La frégate, commandée par John Winslow, qui a servi sur le même navire que Semmes lors de la guerre contre le Mexique<ref name=epave>Tullio Scovazzi, « Les épaves de navires d'État », ''Annuaire français de droit international, volume 52'', 2006. pp. 400-417. ([http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_2006_num_52_1_3937 sur persee.fr]).</ref>, se présente devant Cherbourg le 14 juin, entre en [[Rade de Cherbourg|rade]] et ressort pour surveiller un éventuel mouvement du ''CSS Alabama''<ref name=petitjournal/>.
La frégate, commandée par John Winslow, qui a servi sur le même navire que Semmes lors de la guerre contre le Mexique<ref name=epave>Tullio Scovazzi, « Les épaves de navires d'État », ''Annuaire français de droit international, volume 52'', 2006. pp. 400-417. ([http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_2006_num_52_1_3937 sur persee.fr]).</ref>, se présente devant Cherbourg le 14 juin, entre en [[Rade de Cherbourg|rade]] et ressort pour surveiller un éventuel mouvement du ''CSS Alabama''<ref name=petitjournal/>.


L' ''Alabama'' sort du port par la [[Passe de l'Ouest (Cherbourg)|passe ouest]] le dimanche 19 juin, à neuf heures et demie du matin, après avoir fait tous ses préparatifs de combat. Aussitôt le ''Kearsarge'' se dirige vers la haute mer pour sortir des eaux territoriales et ne s'arrêta qu'à 12 kilomètres environ de la [[digue de Cherbourg]] <ref name=deuxmondes/>. Les deux navires de troisième classe ont des caractéristiques proches : 1 040 tonneaux, 8 canons et 120 hommes pour l'''Alabama'', 1 031 tonneaux, 7 canons et 162 hommes pour le ''Kearsarge''<ref name=petitjournal/>{{exp|,}}<ref name=almanach>''Almanach du Magasin pittoresque'', 1865.</ref>. Les flancs de ce dernier, davantage hors de l'eau du fait d'un chargement plus faible, sont protégés en les recouvrant en partie de ses chaînes d'ancre<ref name=deuxmondes/>.  
L' ''Alabama'' sort du port par la [[Passe de l'Ouest (Cherbourg)|passe ouest]] le dimanche 19 juin, à neuf heures et demie du matin, après avoir fait tous ses préparatifs de combat. Aussitôt le ''Kearsarge'' se dirige vers la haute mer pour sortir des eaux territoriales et ne s'arrêta qu'à 12 kilomètres environ de la [[digue de Cherbourg]] <ref name=deuxmondes/>. Les deux navires de troisième classe ont des caractéristiques proches : 1 040 tonneaux, 8 canons et 120 hommes pour l'''Alabama'', 1 031 tonneaux, 7 canons et 162 hommes pour le ''Kearsarge''<ref name=petitjournal/>{{exp|,}}<ref name=almanach>''Almanach du Magasin pittoresque'', 1865.</ref>. Les flancs de ce dernier, davantage hors de l'eau du fait d'un chargement plus faible, sont protégés en les recouvrant en partie de ses chaînes d'ancre<ref name=deuxmondes/>.  
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De cette bataille, Édouard Manet peint ''Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama'' ([[1865]]). Le bateau que l'on voit au premier plan est "le bateau-pilote du père Gosselin, lequel sauva les naufragés » <ref>''Centenaire de la bibliothèque municipale de Cherbourg'', Impr. Périgault, Cherbourg, 1932, p. 67. </ref>.
De cette bataille, Édouard Manet peint ''Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama'' ([[1865]]). Le bateau que l'on voit au premier plan est "le bateau-pilote du père Gosselin, lequel sauva les naufragés » <ref>''Centenaire de la bibliothèque municipale de Cherbourg'', Impr. Périgault, Cherbourg, 1932, p. 67. </ref>.


Deux sudistes et un nordiste sont inhumés côte à côte au cimetière d’Octeville<ref name=cucmag>« Les États-Unis se souviennent », ''Journal de la Communauté urbaine de Cherbourg'' n° 30, septembre 2004.</ref>.
Deux sudistes et un nordiste sont inhumés côte à côte au cimetière d’Octeville<ref name=cucmag>« Les États-Unis se souviennent », ''Journal de la Communauté urbaine de Cherbourg'' n° 30, septembre 2004.</ref>.


La cloche de l'''Alabama'', repêchée en [[1936]] par un plongeur anglais connait plusieurs propriétaires avant que la Cour du district de New Jersey n'en donne la possession au gouvernement américain, le 13 mai 1991<ref name=epave/>.  
La cloche de l'''Alabama'', repêchée en [[1936]] par un plongeur anglais connait plusieurs propriétaires avant que la Cour du district de New Jersey n'en donne la possession au gouvernement américain, le 13 mai 1991<ref name=epave/>.  

Version du 10 janvier 2014 à 19:48

Le combat au large de Cherbourg.

Le combat du CSS Alabama contre l'USS Kearsarge est une bataille navale opposant deux navires américains dans le cadre de la Guerre de sécession au large de Cherbourg, le 19  juin 1864. Le premier coule sous les feux du second à l'issue de l'affrontement.

Déroulement

Raphael Semmes, capitaine de l'"Alabama".

Pendant la Guerre de sécession aux États-Unis d'Amérique, la corvette corsaire des forces sudistes américaines CSS Alabama, construite à Liverpool en 1862, écume depuis de longs mois toutes les mers du globe où elle a brûlé et coulé 65 bâtiments de commerce des armateurs américains en trois ans[1].

Les Nordistes le pourchassent jusque dans les eaux françaises, pays resté neutre dans ce conflit.

Le 11 juin 1864, le CSS Alabama, commandé par le capitaine Raphaël Semmes, se présente en rade de Cherbourg[2]. Il met à profit cette escale pour remettre en état sa coque, notamment son doublage de cuivre qui est déchiré. Il profite également pour refaire son approvisionnement en charbon.

Le consul américain, Édouard Liais, fait prévenir la frégate nordiste Kearsarge.

La frégate, commandée par John Winslow, qui a servi sur le même navire que Semmes lors de la guerre contre le Mexique[3], se présente devant Cherbourg le 14 juin, entre en rade et ressort pour surveiller un éventuel mouvement du CSS Alabama[2].

L' Alabama sort du port par la passe ouest le dimanche 19 juin, à neuf heures et demie du matin, après avoir fait tous ses préparatifs de combat. Aussitôt le Kearsarge se dirige vers la haute mer pour sortir des eaux territoriales et ne s'arrêta qu'à 12 kilomètres environ de la digue de Cherbourg [1]. Les deux navires de troisième classe ont des caractéristiques proches : 1 040 tonneaux, 8 canons et 120 hommes pour l'Alabama, 1 031 tonneaux, 7 canons et 162 hommes pour le Kearsarge[2],[4]. Les flancs de ce dernier, davantage hors de l'eau du fait d'un chargement plus faible, sont protégés en les recouvrant en partie de ses chaînes d'ancre[1].

En même temps, la frégate cuirassée La Couronne s'avance jusqu'aux limites conventionnelles de la juridiction française. De nombreux Cherbourgeois et des touristes attirés par l'inauguration du casino quelques jours auparavant, se rendent sur les hauteurs et les digues pour assister au combat. Leur faveur semble se porter davantage sur le navire sudiste[1].

Le Kearsarge se dirige vers l' Alabama pour tenter l'abordage et n'est touchée par aucune des trois premières bordées. À 800 mètres environ de l' Alabama, le Kearsarge tourne pour lâcher sa bordée. Pour l'empêcher de regagner les eaux françaises, le Kearsarge se place devant l' Alabama, puis tourne autour de lui tandis que la cannonade se poursuit des deux bords. Les sudistes lancent 370 coups de canons et touche à 28 reprises dans ses agrés et treize dans sa coque le fédéré[4] qui lui fait coup 173 fois plus dévastateur sur son adversaire sans blindage. Une heure plus tard, l' Alabama commence à sombrer et hisse le drapeau blanc. Le CSS Alabama, gravement endommagé, coule face à la grande rade de Cherbourg, ses matelots trouvant refuge sur le Kearsage, ainsi que sur le yacht de plaisance à vapeur anglais Deerhound, de Jonh Lancaster, qui refuse de les rendre à Winslow comme prisonniers de guerre[1].

Quant à la frégate Kearsarge, elle entre en vainqueur au port.

Témoignage de Valérie Feuillet

Vu par Louis Le Breton.

Valérie Feuillet assiste au combat depuis la digue. Elle raconte l'événement dans Quelques années de ma vie :

« Comme nous arrivions sur le grand mur de la digue, le brouillard se leva et nous aperçûmes à l'horizon un point noir immobile ; c'était le Kearsarge qui guettait sa proie.
Il était dix heures quand le premier coup de canon fut tiré. Jusque-là, les deux navires s'étaient provoqués en courant des bordées d'une grâce terrible. Quand ils eurent rétréci leur cercle, ils s'arrêtèrent, se mesurèrent comme deux lutteurs, puis marchant l'un sur l'autre, échangèrent en même temps le feu de leurs batteries. Un nuage noir les enveloppa, et sema de plaques sombres la mer tranquille comme un lac. Des colonnes d'une fumée épaisse arrivèrent jusqu'à nous et nous cachèrent un instant les espaces. Quand elles eurent passé au-dessus de nos têtes, nous aperçûmes de nouveau les combattants. Ils reprenaient haleine ! Bientôt quelques flammes traversant les flancs du navire, nous avertirent que les canons recommençaient à tonner. Quelquefois on entendait leur grondement formidable, quelquefois le vent l'emportait vers d'autres plages. À travers les obscures vapeurs de la poudre, on voyait les boulets tomber de la mer, puis sortant du gouffre qu'ils avaient entr'ouvert, des gerbes d'écume légère, s'élever au-dessus des flots.
Personne ne pouvait prévoir l'issue du combat. Pas un des navires ne paraissant souffrir de cette effroyable lutte. L'un et l'autre conservaient leurs mâts, leurs cheminées, leurs pavillons. Tout l' Alabama frémit. On eut dit qu'un tremblement sous-marin ébranlât ses entrailles. Quelques vagues gigantesques l'enveloppèrent, puis s'affaissèrent autour de lui, laissant voir à son avant un immense trou béant. L'ennemi impitoyable continuait le feu de ses batteries. L'Alabama ne répondait plus. Bientôt ses mâts, ses cheminées volèrent en éclats dans les airs. Il essaya de fuir et de gagner la côte, mais l'eau entrant dans sa chaudière arrêta sa marche. Il hissa son pavillon de détresse. Peu de temps après, nous vîmes ce malheureux navire pencher la pointe de son avant vers la mer et disparaître dans les profondeurs. Pendant cela, nous essuyions nos larmes, et le Kearsarge rentrait dans le port à la place du vaisseau vaincu.
Quelques barques françaises et anglaises s'avancèrent à toutes voiles pour tâcher de sauver l'équipage. Nous regagnâmes Cherbourg avec les embarcations qui ramenaient les blessés et les morts. Les malheureux blessés étaient couchés au fond des barques, recouverts par un morceau de voile. On entendait leurs gémissements malgré le bruit des rames. Quelquefois un bras soulevait la toile et se dressait vers le ciel, semblant reprocher à Dieu d'avoir permis ces ravages.
Nous étions à peu près de la moitié de la route, quand nous aperçûmes une espèce de radeau surmonté d'une tête humaine. Il s'avançait vers nous au milieu des débris du navire que la mer charriait. Nous reconnûmes bientôt que ce radeau était une cage à poules sur laquelle un homme ou plutôt un morceau d'homme était attaché : les deux jambes manquaient à ce cadavre qui vivait encore. C'était horrible à voir. On s'empara du misérable et on l'étendit dans l'une des barques, mais il n'y fut pas plus tôt descendu, que poussant un cri profond, il rendit l'âme.
Il nous devint impossible de supporter plus longtemps de tels spectacles. Nous priâmes l'amiral de reprendre le large et nous nous séparâmes des bateaux mortuaires. Une heure après, nous remontions les escaliers du quai avec le capitaine du Kearsarge qui entrait triomphalement dans la ville, les pistolets à la ceinture et le visage noirci de poudre. »

Postérité

Vu par Édouard Manet.

De cette bataille, Édouard Manet peint Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama (1865). Le bateau que l'on voit au premier plan est "le bateau-pilote du père Gosselin, lequel sauva les naufragés » [5].

Deux sudistes et un nordiste sont inhumés côte à côte au cimetière d’Octeville[6].

La cloche de l'Alabama, repêchée en 1936 par un plongeur anglais connait plusieurs propriétaires avant que la Cour du district de New Jersey n'en donne la possession au gouvernement américain, le 13 mai 1991[3].

L'épave de l'Alabama est découverte en 1984 à près de 60 mètres de fond. Par un accord signé à Paris le 3 octobre 1989, la France et les États-Unis actent leur coopération pour la sauvegarde de cette propriété américaine[3].

Le canon pivotant Blakely, remonté en 1994 de l'épave de l'Alabama est exposé à la Cité de la Mer à Cherbourg-Octeville[6].

Cherbourg est le seul site officiel de la guerre de Sécession hors des États-Unis. Cette reconnaissance par l'association Civil War Preservation Trust est marquée par la stèle dévoilée le 23 septembre 2004 à la Cité de la Mer[6].

Bibliographie

Livres
  • Paul Ingouf, Coulez l'Alabama !, éd. La Dépêche, 1976
  • Jean-Pierre Deloux, Le Corsaire Alabama, E-dite, 2001
Articles
  • Émile de La Bédollière, « Guerre de Sécession », Le Journal Illustré, n° 22, 10-17 juillet 1864
  • Jeff Demange, « La guerre de Sécession au large de Cherbourg », Historama, n° 330, mai 1979
  • « Alabama, touché, coulé », Normandie Magazine, n° 195, sept.-oct. 2004

Notes et références

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 et 1,4 Annuaire des deux mondes : histoire générale des divers états, Revue des deux mondes, 1864-1865, p. 701-702. Sur Gallica de la BNF.
  2. 2,0 2,1 et 2,2 Timothée Trimm, « Le journal du commandant Semmes », Le Petit journal, 21 septembre 1864.
  3. 3,0 3,1 et 3,2 Tullio Scovazzi, « Les épaves de navires d'État », Annuaire français de droit international, volume 52, 2006. pp. 400-417. (sur persee.fr).
  4. 4,0 et 4,1 Almanach du Magasin pittoresque, 1865.
  5. Centenaire de la bibliothèque municipale de Cherbourg, Impr. Périgault, Cherbourg, 1932, p. 67.
  6. 6,0 6,1 et 6,2 « Les États-Unis se souviennent », Journal de la Communauté urbaine de Cherbourg n° 30, septembre 2004.

Attention : la clé de tri par défaut « Combat naval à Cherbourg (1864) » écrase la précédente clé « Alabama ».