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Antoine de Bricqueville

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Antoine de Bricqueville capitainte de frégate et corsaire est né à Bretteville-en-Saire en 1635 et mort en combat naval en juillet 1674.

Comme son oncle Guilaume de Bricqueville, lieutenant-général de la flotte française d'outre-mer, tué en 1613 dans un combat sur les eaux de Gambie, il entra très jeune dans la marine. En sa qualité de gentilhomme il fut fait officier en montant à bord. Commandant sans avoir appris à obeir, selon la coutume d'alors, c'est en faisant manoeuvrer des marins qui lui disaient ce qu'il fallait faire, qu'il apprit à manoeuvrer lui-même.

Parvenu au grade de capitaine de frégate, il décida en 1674 de se faire capitaine de corsaire. Il fit construire à Bretteville-en-Saire le navire qu'il devait conduire en course et l'arma à Cherbourg. C'était un bâtiment de peu de capacité : il portait dix canons de petit calibre et soixante hommes d'équipage mais capable de lutter avec un ennemi deux fois supérieur en nombre.

Antoine de Bricqueville appareilla de Cherbourg vers la mi-mars 1674, par un grand vent et une mer impétueuse, comme s'il eût voulu dès son début dans la carrière de corsaire se familiariser avec l'orage et les vagues. On était à la veille d'une des guerres les plus sérieuses que la France ait eu à soutenir : les négociations de Cologne pour la paix avec l'Empire venaient d'être rompues et par la défection de ses alliés, Louis XIV allait avoir à lutter, par terre et par mer, contre l'Europe presqu'entière.

Entraîné par les flots et poussé par les vents, le corsaire faillit se perdre sur l'Ile Pelée, qui était alors couverte de verdure; il y resta échoué pendant deux jours. Après la tempête, il rentra au port pour se réparer. Sa quille et sa carlingue étaient rompues, son étrave emportée, son beaupré brisé. Tous les charpentiers de Cherbourg furent occupés à travailler au corsaire qui voulait reprendre la mer au plus tôt.

Il remit de nouveau à la voile. Le temps était encore mauvais. Une bourrasque assaillit le navire de Bricqueville à l'entrée du Raz-Blanchard et le jeta vers la pointe de Gatteville. Cette tourmente fut pour le corsaire un coup de fortune. Elle le porta dans les eaux d'une galiote holandaise, affalée sur nos côtes par la grosse mer de la veille. Ce bâtiment venait de Lisbonne et était chargé de vins à destination d'Amsterdam. Il amena sans brûler d'amorce. Le capitaine de Bricqueville qui ne faisait pas la course dans un but mercantile abandonna la cargaison de sa prise à son équipage. La galiote fut conduite à Barfleur.

Bricqueville établit sa croisière entre la côte de France et l'Ile de Wight. Il y avait six semaines qu'il labourait la mer; deux fois la tempête l'avait forcé de se réfugier dans la baie de la Hougue : tant de peines inutiles commençaient à le dégoûter. L'occasion finit par se présenter. Deux voiles apparaissent à l'horizon; le corsaire leur appuie la chasse; bientôt il s'en trouve à portée : c'étaient une lettre-de-marque hollandaise et un navire français qu'elle avait capturé vers l'embouchure de l'Orne. Bricqueville fond à coups de canon sur la lettre-de-marque; l'ennemi riposte et un combat sérieux s'engage, un combat de corsaire à corsaire, où presque toujours la défense est égale à l'attaque. La nuit survient, le ciel se couvre de nuages, un orage effroyable arrive. On se bat à demi-portée, on tire sans s'apercevoir. Le hasard rapproche les deux bâtiments, les grappins sont lancés de part et d'autre; mais les Français, plus habiles et plus prompts que les Hollandais, devancent ceux-ci à l'abordage : Bricqueville saute avec ses hommes sur le pont de l'adversaire; l'ennemi dépose les armes. L'afaire se termine vers minuit. Quelques heures plus tard le vainqueur et le vaincu entrent dans le port du Havre.

Le chevalier de Bricqueville reprit la mer avec le jusant du soir. Il alla croiser devant Le Havre et s'empara, après un combat de deux heures, d'un bâtiment détaché par l'amiral Tromp pour se concerter avec le parti du chevalier de Rohan et de La Truaumont qui avaient formé une conjuration dont le but était de livrer Quillebeuf aux Hollandais et de faire se révolter la Normandie.

Bricqueville, encouragé par le résultat de ses courses, poussa sa croisière jusqu'à la hauteur de Douvres, soutint deux petits combats et fit plusieurs captures. Avarié et chargé de butin, il faisait route vers Le Havre lorsque, dans la soirée du 16 juillet 1774, il rencontra une frégate hollandaise que l'amiral Tromp avait expédiée de son mouillage sous l'île de Noirmoutier, avec des dépêches pour les états-généraux. C'était un bâtiment armé de 20 pièces de canon et portant un nombreux équipage. Bien que son ennemi fût d'une force numérique double de la sienne Bricqueville n'hésita pas à l'attaquer.

Le combat s'engagea vergue à vergue; il fut long, sanglant, acharné. Cinq fois les Hollandais donnèrent l'abordage et cinq fois ils furent repoussés et culbutés dans la mer. Le vaillant Bricqueville fut tué d'un coup de feu dans l'une de ces terribles mêlées. Cela ne fit que nourrir l'opiniâtreté de l'équipage. Le lieutenant-de-vaisseau La Chesnaye remplaça le chevalier de Bretteville. Le combat continua dans toute sa fureur. On se battit jusqu'à cinq heures du matin. La frégate hollandaise avait perdu son beaupré; ses perroquets étaient abattus; sa grande vergue était tombée sur le pont; ses voiles étaient mises à jour; ses manoeuvres coupées; plusieurs boulets avaient percé sa carène. Le corsaire n'était pas moins avarié. Le sang ruisselait sur le pont des deux navires. Les chambres étaient pleines de morts et de blessés.

Rebuté par la résistance, affaibli par ses pertes, l'ennemi quitta cette scène de carnage. On apprit par des pêcheurs que la frégate hollandaise avait coulé quelques milles plus loin.

La ville du Havre accueillit à bras ouverts ces glorieux vainqueurs. Le duc de Saint-Aignan, gouverneur de la place, fit faire de pompeuses obsèques au chevalier de Bricqueville. Le corps d'Antoine de Bricquevile fut ramené à Bretteville-en-Saire et inhumé dans l'église de cette paroisse le 27 juillet 1674.

Source

Verusmor,Annuaire de la Manche,1840.

Bricqueville, Antoine de