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Sonorisation spontanée

De Wikimanche

La sonorisation spontanée est un processus évolutif ayant affecté certaines consonnes initiales en français.

Ce phénomène concerne principalement la consonne occlusive [k-], notée c en latin, qui est spontanément passée à [g-] en début de mot, soit en gallo-roman, soit plus tardivement en proto-français ou ancien français. On l'explique par le fait que cette consonne, lorsqu'elle était employée après un mot terminé phonétiquement par une voyelle, s'est de fait retrouvée en contexte sonore dans la chaîne parlée, ce qui a entraîné ou du moins favorisé sa sonorisation (articulation accompagnée d'une vibration des cordes vocales).

Ainsi, en français, le mot gras a pour étymon le latin crassus « épais, gras »; il avait pour doublet le mot cras en ancien français. De même, le mot grotte repose sur une forme gallo-romane °GRUPTA < °CRUPTA, du latin crypta « caveau, crypte; grotte ».

La sonorisation dans les noms de lieux de la Manche

La forme actuelle de certains toponymes de la Manche résulte d'une ancienne sonorisation spontanée de [k-] initial :

  • Gourfaleur, sans doute issu de °CORTE FALŌRU < °CORTE TEFALŌRU < °CORTE TAIFALŌRU « le domaine rural des Taïfales », manifeste une sonorisation tardive : Corphalour 1056/1060, Gourfalou 1190, Corfalor 1203, Gorfalor 1270/1271.

Dans plusieurs autres cas, la sonorisation n'est qu'hypothétique, et invoquée par certains auteurs pour expliquer une évolution irrégulière ou résoudre une étymologie difficile :

  • Glatigny est expliqué par Ernest Nègre [1], de manière peu convaincante, par la forme sonorisée d'un étymon °CALTINIACU, « (le domaine) de Caltinius », ayant subi une cascade d'autres accidents phonétiques.
  • Gouvets peut s'expliquer par °GŬBĪTTOS < °CŬBĪTTOS « les petites chambres », « les petites habitations ».

La sonorisation dans les noms de personnes de la Manche

La sonorisation dans le vocabulaire dialectal de la Manche

  • Le mot égaluer « éblouir » est formé sur le terme dialectal normand galu, variante sonorisée de calu « louche ».

Notes et références

  1. Ernest Nègre, Toponymie Générale de la France, Droz, Genève, t. I, 1990, p. 559, § 9127.