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Pierre-François Guingret

De Wikimanche

Pierre-François Guingret, né à Valognes le 24 mars 1784 et mort à Paris en 1845 (janvier), est une personnalité militaire de la Manche.

Biographie

Il s'enrôle au début 1803 à l'âge de 18 ans dans le 6e régiment d'artillerie des côtes de l'Océan. L'année suivante, il entre comme élève à l'école polytechnique, d'où il sort en 1806, et est bientôt envoyé à la grande armée qui venait d'anéantir à Eylau, les débris de la monarchie prussienne, foudroyée aux champs d'Iéna.

Sous-lieutenant au 69e de ligne, il arrive à temps pour prendre part à Friedland, où il subit sa première blessure dans cette mémorable bataille, qui élève Napoléon et la France à l'apogée de sa puissance.

Entraîné par la rapidité des mouvements de l'Aigle impérial, dans son vol du nord au midi, le jeune officier se porte sur les bords du Niémen, sur les rives du Tage, où nos armées vont déployer leurs drapeaux, pour renouveler dans cette antique Ibérie les exploits d'Annibal, des Scipion, de Pompée, de César et du Cid.

Guingret guerroie pendant 4 ans en Espagne et au Portugal, participe au siège d'Almeïda, à la bataille de Busaco, au combat de Fuente-Onoro, à l'affaire d'Aïnhoa. Sa bravoure lui mérite le garde d'officier supérieur. Le 2 mars, il enlève avec 50 tirailleurs sur la route de La Corogne, une pièce de canon que lui disputent 200 Espagnols.

Le 13 avril suivant, il franchit le premier le pont de San-Payo barricadé et défendu par huit bouches à feu, tue un canonnier au moment où il va mettre le feu à sa pièce, et détermine par sa brillante audace l'enlèvement du pont, la prise de la batterie et la déroute de l'ennemi.

Il gagne le grade de capitaine sur le champ de bataille de Busaco, où il combat énergiquement, ayant l'épaule traversée par une balle et reçoit dans l'action plusieurs autres blessures de mitraille. L'ordre de l'armée signale sa valeur dans la surprise de Poza, où, commandant l'avant-garde, il se précipite sur 500 ennemis qui sont capturés ou passés à la baïonnette.

Le 30 octobre 1812, il propose, dirige, commande, et effectue le passage du Douro devant Tordésillas, en face d'une colonne anglaise et sous un feu meurtrier. Le vaillant capitaine passe le fleuve, le sabre aux dents, à la tête des troupes électrisées par son exemple, et fait déposer les armes à la garnison de la tour, dont la fusillade empêchait le rétablissement du pont.

Le 11 mai 1813, à l'assaut de Castro-Urdiales, il aborde avec intrépidité la brèche, pénètre le premier dans le fort, au moyen d'une échelle, par une embrasure, et suivi de ses voltigeurs aussi braves que leur chef, fond à l'arme blanche sur la garnison, la fait prisonnière et se rend maître de la place. L'illustre Foy, son général divisionnaire lui donne à cette occasion des éloges publics.

Quelques jours plus tard, près de Lequeytio, il attaque avec 2 compagnies d'élite le bataillon d'Artola, le culbute et le détruit entièrement; il lui prend 300 hommes, dont 20 officiers; les autres ayant été tués ou noyés, sans qu'un seul soit parvenu à se sauver. L'épaulette de chef-de-bataillon vient récompenser ses prouesses ; et le bouillant officier donne à son nouveau grade une victoire le 25 juillet 1813, en enlevant à la baïonnette la position retranchée d'Achistoy, défendue par un régiment anglais.

À la bataille d'Orthez, après la blessure du général Foy, on lui confie le commandement de la 1ére brigade de sa division qu'il conserve depuis le 27 février 1814 jusqu'au 22 mars suivant. Il la conduit plusieurs fois avec succès à l'ennemi à la satisfaction du général Soult. Le chef-de-bataillon Guingret fait la campagne de 1815 et trouve jusque dans nos désastres l'occasion de cueillir des lauriers.

Nommé lieutenant-colonel du 33e de ligne, le 19 mars 1823, au moment de l'entrée de nos troupes en Espagne, il porte une seconde fois les armes au-delà des Pyrénées. En 1828, il entre avec son grade dans l'infanterie de la garde royale. Colonel du 51e de ligne en 1830, il est envoyé avec son régiment à la Guadeloupe, et passe trois années de garnison sous le dur climat des tropiques.

Cette époque de sa carrière est signalée par un trait d'énergique dévouement, de présence d'esprit et d'humanité. Les Nègres (on dirait aujourd'hui "les Noirs") s'insurgent dans la colonie. Le colonel Guingret peut écraser cette révolte avec les moyens matériels dont il dispose, mais ce sont des Français qu'il faudrait combattre et avant d'employer la force des armes, il veut épuiser les ressources de l'influence morale ; seul, il se rend au milieu de ces hommes égarés, au risque de sa vie. Il leur parle le langage de la raison, et, sans la moindre effusion de sang, il met fin à leur révolte. Pour cet acte de courage, Guingret reçoit la croix de Commandeur de la Légion d'Honneur

Élevé au grade de maréchal-de-camp, le 11 novembre 1837, Guingret passe l'année suivante en Algérie. Pendant 4 ans, il y exerce plusieurs commandements. À 55 ans, il donne en Afrique des preuves de son énergie, de son intelligence et de ses capacités.

C'est au retour de cette guerre contre les Arabes, guerre exceptionnelle qui impose de si rudes labeurs aux facultés physiques et morales que le général Guingret est appelé au commandement d'une brigade d'infanterie à Paris. C'est à ce poste qu'il meurt. Ses obsèques ont été célébrées à l'église Saint-Pierre du Gros-Caillou le 14 janvier 1845 en présence d'une foule nombreuse.

Source

  • Vérusmor, Annuaire de la Manche, Cherbourg, le 19 janvier 1845.