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Bon-Louis Lamesle

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Bon-Louis Lamesle, né à Cherbourg le 24 septembre 1749 et mort à Portchester (Angleterre) le 7 mars 1797 (17 ventôse an V), est une personnalité militaire de la Manche.

Biographie

Appelé par vocation à l'état de marin, Bon-Louis Lamesle débute comme mousse dans cette carrière en 1764, navigue sur des bâtiments de commerce pendant douze ans, et est admis au grade de capitaine de navire le 18 mars 1776, après avoir fait son cours de navigation sous l'autorité de M. Laureau, professeur d'hydrographie à Cherbourg.

À peine pourvu du brevet de capitaine, Lamesle, qui est à la fois un excellent marin et un homme intelligent et probe, est appelé à commander un navire de commerce faisant la navigation du Havre à Saint-Domingue, qui est alors l'Inde de la France. Nous n'avons pas la liste de tous les commandements qu'il exerce pendant dix-huit ans pour la marine marchande, et qu'il n'interrompt que durant quelques mois en 1786, pour servir sur le cutter de l'État le Milan. En 1787, le navire l' Europe ; en 1789, le trois-mâts l' Asie, et l'année suivante nous le trouvons commandant de l' Europe, qu'il prend aux Cayes et qu'il ramène en France.

En 1792, le capitaine Lamesle fait partie d'une commission chargée de faire un rapport nautique sur la digue, la rade et le port de Cherbourg. Les autres membres de la commission sont Eyriès, Le Tourneur et Noël.

Depuis 1789, la Révolution démolit la vieille société politique pour instaurer un ordre nouveau. Elle rencontre dans son cours des obstacles qui s'accroissent ; les résistances deviennent formidables ; elle s'en irrite, et comme toute puissance qui sent sa force et qu'on veut refréner, elle brise ses entraves et produit le grand cataclysme de 1792.

Dans cette tourmente, les officiers de vaisseau, appartenant presque tous à la classe nobiliaire, sont chassés pour la plupart par la marine roturière qui leur porte une aversion en quelque sorte instinctive ; les autres émigrent, ou sont frappés de prescription, ou périssent sur l'échafaud. Il faut recomposer l'état-major de la flotte. Dans cette réorganisation, le capitaine au long cours Lamesle, qui a des antécédents les plus recommandables, est nommé d'emblée capitaine de vaisseau.

Il est appelé dans ce grade, le 14 juin 1793, au commandement de la frégate la Sémillante, l'un des bâtiments de l'escadre de croisière du contre-amiral Morard de Galle. Le brave Lamesle a l'occasion de se faire remarquer par son habileté nautique dans les différentes sorties que fait cette escadre, et bientôt il reçoit comme témoignage de satisfaction le commandement d'un vaisseau de ligne, l' Indomptable, auquel il est nommé le 27 octobre 1793.

C'est avec ce vaisseau, faisant partie de l'armée navale aux ordres de l'amiral Villaret de Joyeuse, que le commandant Lamesle se couvre de gloire par sa vaillante participation au combat du 9 prairial an II cette avant-scène de la grande bataille du 13, immortalisée par la courageuse défense du vaisseau-amiral la Montagne et par le sublime héroïsme du vaisseau le Vengeur, dramatisé par le rapport épique de Barrère, et buriné au temple de Mémoire par l'ode pindarique d'Écouchard Le Brun. Entrons dans quelques détails sur ce combat.

La ligne de bataille française a été coupée. L' Indomptable et le Tyrannicide, enveloppés par les deux tiers des forces ennemies, se défendent avec une bravoure que ne peut ralentir le nombre des assaillants. les commandants de ces deux vaisseaux communiquent leur dévouement à leurs équipages, en leur donnant en même temps l'exemple de leur courage. Écrasés par les foudroyantes volées des navires qui les attaquent de tous côtés à la fois, ils ripostent des deux bords de toutes leurs pièces à la grêle de boulets qui pleuvent sur eux. Cette défense acharnée n'a point entravé toutes leurs manœuvres : d'habiles mouvements, exécutés avec une résolution rare, les dérobent souvent au feu de l'ennemi, et leur permettent de balayer à mitraille ses batteries et ses gaillards. Durant une heure entière Lamesle et Dordelin ne cessent de donner des preuves d'un talent égal à l'intrépidité déployée par leurs équipages. L'amiral Villaret les dégage en se portant à leur secours avec toute son escadre. L'Indomptable, percé à jour et privé presque complètement de sa mâture, se voit forcé de rentrer à Brest pour panser ses plaies.

L'héroïsme des commandants Lamesle et Dordelin enthousiasme les Français et fait l'admiration des Anglais. Le vaillant capitaine de l' Indomptable gardera le commandement de ce vaisseau jusqu'au 15 avril 1796.

N'ayant pas été compris dans la réorganisation générale du personnel de la flotte, Lamesle revient dans ses foyers.

À peine de retour à Cherbourg, la maison Liais lui confie le commandement du corsaire le Coup-d'Essai, bâtiment construit à La Hougue et armé à Cherbourg et les ramène en France. Dans sa première croisière, il fait deux prises sur la côte d'Angleterre. Mais capturé dans sa seconde sortie par un navire anglais, le 20 décembre 1796 et conduit prisonnier à Portchester (Hants), Lamesle meurt captif à l'hôpital de cette ville le 7 mars 1797 après avoir perdu sans motif par une révolution le grade qu'une révolution lui avait donné.

Source

Vérusmor, Annuaire du département de la Manche, 1866, Saint-Lô.