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Quéton

De Wikimanche

Quéton souriant.

Quéton (fr. rég. et dial.), n. m., âne.

Répartition géographique

Mot caractéristique du nord et du centre de la Manche. On le rencontre également dans le sud du département, et, dans une moindre mesure, dans le Calvados [1], plus précisément dans le Bessin [2].

Attestations écrites

Dans la littérature dialectale

  • QUÉTON : 1911/1914 Pour mouégi l'avouonne fraîche / Le quéton trachait sa crêche, « pour manger l'avoine fraîche, l'âne cherchait sa crêche » [3].

Dans les recueils, glossaires et dictionnaires

Attestations orales

Transcriptions : alphabet Rousselot-Gilliéron.

Étymologie

René Lepelley dit simplement : “sans doute du latin cauda « queue »” [1]. Il faut s'entendre : d'une part, le mot quéton est formé non pas sur le latin cauda, mais bien sur le français queue (ou l'ancien français coe) [11], avec un [t] de transition, exactement comme dans le verbe queuter « faire la queue ». D'autre part, de quelle queue s'agit-il ? Non pas de l'extension arrière de la colonne vertébrale, qui prend plus ou moins d'ampleur chez certains mammifères (celle de l'âne n'ayant rien de particulier), mais bien de l'organe reproducteur de l'animal, qui n'a cessé de frapper l'imagination des foules : ce n'est pas par hasard que Frédéric Dard écrivit en 1976 Si Queue-d'Âne m'était conté ! Le vit d'asne a d'ailleurs été un thème récurrent dans la littérature érotique dès le 15e siècle [12]. En d'autres termes, quéton est formé de la même manière que queutard, avec le suffixe -on d'ânon, bourrichon, bidaillon, miron, etc. On pourra toujours expliquer pudiquement : « c'est parce qu'il remue souvent la queue ! ».

Emplois particuliers

Locutions

  • sâo comme eun quétoun [6], « soûl comme un âne », complètement soûl : 1993, Manche (nord de la ligne Joret) [7].
  • eun mâovais quétoun [6], littéralement « un mauvais âne », personnage peu recommandable : 1993, Manche (nord de la ligne Joret) [7].

Mots apparentés

  • quétone [6], « ânesse ».

Notes et références

  1. 1,0 1,1 et 1,2 René Lepelley, Dictionnaire du français régional de Basse-Normandie, Paris, Bonneton, 1989, p. 117a/b.
  2. 2,0 et 2,1 Patrice Brasseur, Le parler normand, Paris / Marseille, Éditions Rivages, 1990, p. 146.
  3. « La Croué du Quéton », in Alfred Noël, Chansons normandes du pays de Valognes, éditions Notre-Dame, Coutances, 1941, p. 57 (les dates indiquées sont celles de la rédaction du texte); patois du pays de Valognes.
  4. René Lepelley, Dictionnaire du français régional de Normandie, Paris, Bonneton, 1993, p. 119b.
  5. M. Porée et B. Cléraux, « Glossaire du parler normand de la région de La Haye-Pesnel », Le Viquet n° 120, Saint-Jean 1998, p. 142a.
  6. 6,0 6,1 6,2 et 6,3 Graphie dite « normalisée », prônée par la mouvance de Fernand Lechanteur, Marcel Lelégard et al., mais ne reflétant qu'une prononciation minoritaire.
  7. 7,0 7,1 et 7,2 J.-P. Bourdon, A. Cournée, Y. Charpentier, Dictionnaire normand-français, Paris, Conseil international de la langue française, 1993, p. 260a.
  8. René Lepelley, Le parler normand du Val de Saire, Cahier des Annales de Normandie n° 7, Caen, 1974, p. 76, § 226; les dates sont celles de l'enquête.
  9. 9,0 9,1 9,2 9,3 9,4 9,5 9,6 9,7 9,8 et 9,9 Patrice Brasseur, Atlas Linguistique et Ethnographique Normand, CNRS, Paris, vol. II, 1984, carte 900 « Âne »; les dates indiquées sont celles de l'enquête.
  10. Ces deux caractères sont normalement superposés; il s'agit d'une voyelle simple.
  11. En ce qui concerne l'évolution vocalique, cf. quéru « courageux; vigoureux », variante de cœuru, dérivé de cœur.
  12. Cf. par exemple Marcel Schwob, Le Parnasse satyrique du quinzième siècle; anthologie de pièces libres, H. Welter, Paris, 1905, p. 101, § XLV, v. 7; Nicolas-Edmé Restif de la Bretonne, L’anti-Justine ou Les délices de l'amour, Paris, 1798; rééd. Dominique Leroy, Paris, 2000, p. 51.

Voir aussi