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Histoire du Hutrel : du Moyen Âge à la Révolution

De Wikimanche

Le lieu-dit Le Hutrel est un petit village à l'ancienne niché dans la ville de Saint-Lô. Par son architecture, son histoire, sa vie associative, c'est un lieu unique, qui ne laisse personne indifférent !

Si vous êtes tombé par hasard sur cette page, l’article intitulé Vivre au Hutrel vous permettra de situer notre petit coin de Normandie. En voici l’histoire, tout d’abord du Moyen Âge à la Révolution. Les sources documentaires seront toujours citées. Les mots en gras signalent des faits ou des mots toujours vivants aujourd’hui dans la vie de notre village.

Nos sources sont bien sûr partielles, un travail d’archives plus approfondi sera mené dans les mois qui viennent. N’hésitez pas à apporter rectifications ou éclairages nouveaux !

Le Moyen Âge

L'assassinat de Thomas Becket (vitrail de l'église Notre-Dame de Saint-Lô)
Saint-Thomas

Le nom du village apparaît pour la première fois en avril 1250 sous la forme Huterel : un certain Richard du Huterel cède à la Maison-Dieu de Saint-Lô une pièce de terre. Ensuite un acte d’avril 1270 cite Le Huterel comme nom de lieu. Selon les érudits, le mot huterel signifie en ancien français et normand soit un tombereau, soit une butte ou levée de terre. Cette seconde définition correspond peut-être à la réalité topographique du Hutrel : en effet, notre village « culmine » aujourd’hui à 69 mètres d’altitude, la place de l’Hôtel de Ville de Saint-Lô à 44 mètres seulement !

Rappelons qu’en 1250, la Normandie n’est rattachée au royaume de France que depuis peu (1204). Le village du Hutrel faisait alors partie de la paroisse de Saint Thomas de Saint-Lô.

Il ne s’agit pas de saint Thomas l’apôtre du Christ mais de saint Thomas Becket (1118-1170).

Quel rapport entre Saint-Lô et ce célèbre archevêque anglais ? Thomas Becket était né à Londres de parents marchands originaires de Mondeville en Normandie. Après de brillantes études, Thomas Becket s’élève rapidement dans la hiérarchie ecclésiastique jusqu’à devenir le chancelier du roi d’Angleterre Henri II. Nommé archevêque, sa personnalité se transforme radicalement, jusqu’à s’opposer au roi et ses projets de mainmise sur l’Église. Craignant pour sa vie, Thomas Becket s’exile en France en 1164. Dix ans plus tard, il séjourne à Saint-Lô où s’achevait la construction d’une nouvelle église (qui se situerait aujourd’hui à peu près à l’emplacement du théâtre Roger Ferdinand). Les ouvriers lui auraient demandé quel nom il conviendrait de donner à l’édifice. Il aurait alors répondu : « Vous lui donnerez le nom du premier martyr tombé pour la foi chrétienne ». Ce martyr devait être Thomas Becket lui-même ! Rentré en Angleterre en 1170, il est assassiné au pied de l’autel de la cathédrale de Canterbury par quatre chevaliers anglo-normands. Thomas Becket sera ensuite révéré par les fidèles dans toute l’Europe et canonisé par le pape en 1173.

Un an plus tard, le 28 juillet 1174, en présence de l’évêque de Coutances, l’évêque de Bath, un certain Reginaldus ou Renaud « dédia à Saint-Lô une certaine église… au nom du très heureux martyr Thomas évêque de Cantorbéry » et « afin que ce soit à l’avenir pour toujours une paroisse, on a mis à cette église les cantons suivants qui étaient de la paroisse de Saint-Lô depuis la porte Basly jusqu’au village Capède… le hameau de Lignerolles… tout le Mesnil au Bosq et tout Champeaux jusqu’à la fontaine du Mesnil Rouxelin ».

Ce 28 juillet 1174 est donc une date importante : non seulement elle marque la consécration d’une nouvelle église, mais aussi la création d’une nouvelle paroisse, Saint Thomas de Saint-Lô, dont nous suivrons la curieuse histoire jusqu’en … 1963 !

Le XVIe siècle

Vestige de la Croix des Alizots (novembre 2010)
Hiver 2010

Saint-Lô a beaucoup souffert des guerres de religion. Dès 1562 la ville passe au protestantisme en se soumettant au comte Montgomery. Celui-ci fait démolir la tour et les voûtes de l’église Saint-Thomas. En effet la position de cette église proche des remparts nuisait à la défense de la cité. En 1574, les catholiques reprennent Saint-Lô aux protestants. En représailles, le roi de France Charles IX donne l’ordre au Maréchal de Matignon de démolir l’église Saint-Thomas : elle ne sera reconstruite et rendue au culte qu’en 1630 !

Un document du XIXe siècle évoque « le tronçon d’une croix renversée peut-être aux temps des guerres de religion qui serait la Croix aux Alizots ». Ce tronçon existe toujours ( enfoui sous un monticule, il n’a été exhumé qu’en 1975 par un agriculteur du Hutrel, et laissé à l’emplacement actuel ) Nous reparlerons de cette croix mystérieuse dans un autre article.

Enfin, dans un partage effectué le 30 octobre 1594, on évoque La Grande Maison du Hutrel (qui était la seule à « présenter quelques caractères d’ancienneté » selon un document du XIXe siècle). Cette maison existe toujours. On peut estimer qu’elle a été édifiée vers 1530.

Le XVIIIe siècle et la Révolution

« Le village du Huterel offre un aspect particulier. Les maisons, au lieu de s’aligner en rues, sont disséminées autour d’un terrain vague appelé la commune du Huterel et contenant un hectare environ. La jouissance de cette place est exclusivement réservée aux riverains ».

Cette description est extraite d’un acte du Bailliage de Saint-Lô daté du 9 novembre 1762 (rappelons qu’avant la Révolution les bailliages étaient des circonscriptions administratives et judiciaires).

« Vers 1793 » est planté au Hutrel un arbre de la liberté, qui était un peuplier ( nous en reparlerons ). Quant à la Croix des Alizots, elle aurait été non pas abattue par les protestants mais « lors des troubles de la Révolution ».

Sources

  • M. Lepingard in Annuaire du département de la Manche, 1893.
  • Saint-Lô, Les secrets de la licorne, Jeune Chambre Économique de Saint-Lô, 1988.

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