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Discours de Nicolas Sarkozy à Saint-Lô (2009)

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Discours de Nicolas Sarkozy à Saint-Lô

Texte officiel du discours de Nicolas Sarkozy, président de la République, prononcé à Saint-Lô le 12 janvier 2009 à l'occasion de ses vœux au personnel de l'Éducation nationale et qui portent sur les réformes en matière d'enseignement.

« Mesdames et Messieurs,

C'est pour moi une grande joie d'être parmi vous pour cette cérémonie des vœux, dans une ville, Monsieur le Maire, dont l'histoire symbolise, envers et contre tout, la foi en l'avenir. Saint-Lô, « capitale des ruines » de la Seconde Guerre mondiale - selon la jolie expression de Samuel Beckett, qui y séjourna -, Saint-Lô a su conjurer la fatalité qui semblait la condamner à la disparition. Saint-Lô a su se relever, se reconstruire et retrouver le chemin de sa liberté.

Conjurer la fatalité, déjouer toutes les formes de déterminismes, c'est le projet de l'école de la République. D'où que l'on vienne, qui que l'on soit, on doit pouvoir réussir. On doit pouvoir inventer son destin. Pourvu que l'on s'en donne la peine. Pourvu que l'on travaille. Pourvu que l'on ne perde jamais une occasion d'apprendre. La société ne peut pas apprendre à votre place. L'État ne peut pas travailler à votre place. Toute la solidarité que nous devons à ceux de nos enfants qui doivent s'en sortir ne résoudra pas ce problème, on ne peut pas travailler à la place de celui de saisir la chance que la société lui donne.

Chacun, dans notre République, doit avoir les moyens de conquérir sa liberté grâce au savoir.

C'est une question de justice et c'est une question d'efficacité. Un pays de 60 millions d'habitants, qui recruterait ses élites parmi 10 % de sa population serait l'équivalent d'un pays de 6 millions d'habitants. On a donc un problème de justice, de promotion sociale dans toutes les familles et d'immobilisme.

La tâche n'est pas nouvelle Mesdames et Messieurs depuis Jules Ferry, et au-delà des clivages partisans, tous les véritables Républicains se sont posé la question : quelle mission pour l'école, quelle chance pour nos enfants, quel statut pour nos enseignants ? A certains égards, comme le démontre les statistiques sur la composition sociale des grandes écoles, la difficulté de la promotion sociale dans notre pays, non seulement ne se réduit pas mais s'aggrave. On avait plus de facilités il y a quelques années à assurer la promotion sociale de sa famille que maintenant. Est-ce que c'est normal ? Est-ce que c'est juste ? Est-ce que l'on peut l'accepter ? Je sais parfaitement bien que la question-clef, c'est celle de la bataille de l'intelligence. C'est la question clef pour notre pays. Comment faire pour la gagner parce que c'est la croissance de demain ; c'est la question du meilleur partage du savoir, et c'est la question du redémarrage de l'ascenseur social.

Cette bataille de l'intelligence, j'entends que nous la menions jusqu'au bout parce qu'il faut la gagner, on n'a pas d'autre choix. Il faut que l'on innove davantage, que l'on cherche davantage, que l'on forme mieux nos jeunes, que l'on mette à également toutes les filières, professionnelles et classiques.

Alors certains voudraient, la crise venant, que nous marquions une « pause ». Voire même, classique en France, que nous revenions sur certaines mesures - à peine entrées en vigueur. J'avoue ne pas suivre le raisonnement. N'est-ce pas précisément en période de crise que la nécessité de préparer l'avenir se manifeste avec le plus d'évidence ? N'est-ce pas précisément maintenant que le besoin s'en fait sentir et que la réforme en termes d'éducation, est la plus urgente ? Toute la journée on me dit : Monsieur le Président, il y a un malaise et les mêmes qui me disent il y a un malaise me disent surtout ne touchez à rien. Si tout le monde était heureux, si les résultats étaient brillants, si tout allait bien dans le meilleur des mondes, je comprends que l'on défende le statu quo et l'immobilisme mais alors même que de tous côtés côté enseignants, il y a un malaise, côté des élèves, il y a un malaise, côté des parents, il y a un malaise est-ce que la solution consiste à dire face à ce triple malaise on ne fait rien, on ne bouge pas, on ne discute de rien, la seule chose dont on pourrait éventuellement discuter, c'est donner plus d'argent. Mais si la solution de plus d'argent était la bonne, mais alors pourquoi tous les ministres de l'Éducation précédents on échoué, alors que tous les ministres de l'Éducation précédents ont donné plus d'argent et plus de postes. Je présente les choses, vous savez sans aucun parti pris, sans aucune idéologie. Ce que je souhaite, c'est une meilleure chance pour nos enfants et des enseignants qui soient heureux parce qu'ils sont au cœur de la société.

Mais s'il suffisait, pour répondre au malaise de ne rien faire ou donner davantage d'argent, mais c'est ce qu'ils ont fait tous, de gauche comme de droite, M. Chirac avec M. Devaquet, M. Jospin avec M. Allègre, M. Périgroux ( ?) n'a rien eu du tout, bien évidemment puisque, de son point de vue non plus, on ne peut pas dire qu'il ait annoncé ou mis de son côté le moindre projet de réforme. C'est quand même plus facile. Et même, M. Fillon, lorsqu'il était ministre de l'Éducation nationale, a connu des problèmes. Qu'est-ce que l'on fait ? On ne bouge pas. Mais si on ne bouge pas, les mêmes causes produiront les mêmes problèmes. S'il suffisait de faire des manifestations pour résoudre les problèmes d'Education. Mais cela fait 40 ans qu'il y a des manifestations et 40 ans que la crise s'aggrave. Est-ce que c'est la solution ? Est-ce que l'on croit que je suis un homme à ne pas tenir compte de ce qui s'est passé ? Je ne dis pas que c'est une affaire de gauche ou de droite. Je dis, regardons ce qui s'est passé. Ce n'est pas en renonçant à agir que l'on rassure. Et ce n'est pas en renonçant à agir qu'on résout les problèmes. Le prix de l'immobilisme, je vais vous dire qui le paie, ce sont les plus fragiles. Parce que dans l'immobilisme, ceux de nos compatriotes qui sont socialement les plus favorisés, ils s'en sortent toujours.

L'immobilisme, ce sont les plus fragiles qui le paient.

Renoncer à réformer en profondeur notre système éducatif, qui montre depuis tant d'années ses insuffisances, ce serait se résigner à l'inacceptable. Ce serait s'accommoder des difficultés d'une école qui peine à mener tous les enfants vers la réussite.

Je suis donc plus déterminé que jamais à poursuivre l'action engagée. Je vais m'en expliquer.


Nous n'avons pas le droit de reculer. Tous les gouvernements ont reculé. Au résultat, ils ont laissé l'école face à ses problèmes, les enfants face à l'incertitude de l'avenir et les enseignants face à la satisfaction d'un métier qui devient de plus en plus difficile. Tous ont reculé. Et bien c'est un droit que je ne m'accorde pas. Bien sûr, il faut écouter, il faut expliquer. Il faut écouter quand on veut bien se déplacer pour dialoguer. Parce que si la façon que l'on a de concevoir le dialogue, c'est de refuser de venir, c'est compliqué.

J'ai été très attentif aux inquiétudes qui se sont exprimées, parfois avec une certaine force, ces derniers mois. Elles sont bien compréhensibles : jamais peut-être on n'avait demandé, en si peu de temps, autant d'efforts à tous les personnels de l'Education nationale.

Ces efforts ont un sens. Ils poursuivent un unique objectif : celui de l'émancipation de chaque enfant de France par la transmission du savoir, pour une réelle égalité des chances.

L'éducation nationale a autrefois relevé le défi de la quantité. Tout au long du XXe siècle, elle a accueilli de plus en plus d'élèves, de plus en plus longtemps. En 1930, les bacheliers représentaient 2,5 % d'une classe d'âge. Ils sont aujourd'hui 60 %. Les chiffres, me semble-t-il, sont sans appel.

Mais on a 15 % des enfants qui sortent de l'école primaire qui ne maitrisent pas suffisamment les langages pour accéder utilement à d'autres apprentissages. Au sortir du collège, l'orientation vers la seconde d'enseignement général est massive, mais 15 % des élèves, en fin de seconde, sont invités à redoubler. 150 000 jeunes sortent de l'enseignement scolaire sans aucun diplôme et sans aucune qualification. Alors là, tout le monde est d'accord là-dessus. Et notre baccalauréat, présenté parfois comme une sorte de talisman, n'immunise pas nos jeunes puisque un sur deux des bacheliers perd au moins une année dans le premier cycle universitaire, que par ailleurs beaucoup abandonnent, et qu'à peine un sur trois parvient au terme de son parcours d'études supérieures sans avoir redoublé. Voilà la situation. Je n'accuse personne. Je ne reproche à personne. Je dis voilà la situation. Face à cette situation, Mesdames et Messieurs, le chef de l'Etat doit considérer : circulez, il n'y a rien à voir, on ne pense rien, on ne dit rien, on ne modifie rien, on ne fait rien.

Cette difficulté à assurer l'efficacité de notre système éducatif se double d'injustices sociales, dont je dis qu'elles sont insupportables.

Les enfants de la moitié la plus socialement favorisée de la population sont deux fois plus souvent diplômés de l'enseignement supérieur que les autres, enfants d'ouvriers et d'employés. Peut-on accepter cette injustice ? Ma réponse est clairement non. Car je ne veux pas d'une France à deux vitesses, d'une France presque coupée en deux. C'est-à-dire d'un côté de la ligne sociale où vous êtes, vous avez les chances qui ne sont pas les mêmes. C'est le contraire de la République.

Cette situation est inacceptable. Alors, Mesdames et Messieurs, notre société traverse une crise mais ce n'est pas toujours celle qu'on dit, c'est plutôt la crise de l'avenir. Avec de plus en plus de familles et de plus en plus de jeunes qui ont peur de l'avenir Notre pays n'a, sans doute, pas de mission plus urgente que de sortir de cette impasse, qui prend dans la crise économique actuelle une dimension plus dramatique encore.

Que l'on me comprenne bien. C'est à nos enfants d'imaginer et de construire leur vie. Il ne s'agit pas de substituer à une liberté qu'on jugerait trop effrayante le confort de l'absolue sécurité dont chacun voit bien qu'il n'existe pas.

Alors, que va-t-on faire ? On va refaire de l'école le lieu où selon son travail et son mérite les destins vont pouvoir se décider. Avec Xavier Darcos, avec Valérie Pécresse, nous allons essayer d'organiser toute notre action autour de deux principes :

1) Rétablir l'autorité du savoir. L'école n'a pas d'autre mission que de transmettre des connaissances, les plus hautes possible. Il n'est pas question d'abaisser le niveau d'exigence, car en abaissant le niveau d'exigence on accroît les inégalités. Il y a quelque chose d'ailleurs de scandaleux à dire, on va abaisser le niveau pour que les enfants des catégories les plus défavorisés puissent y accéder. Ce serait se résoudre à une situation d'inégalité la plus totale.

2) On va affirmer également, deuxième principe, la même exigence pour tous. On veut un système qui tire vers l'excellence. Cette exigence elle doit être la même pour tous mais l'unité de notre système scolaire, n'implique pas l'uniformité de l'approche pédagogique. C'est toute la question extraordinairement difficile, il faut que l'école puisse s'adapter aux différents publics qui la composent. Puisque toute une classe d'âge a vocation à passer par l'école, la diversité des enfants et des publics auxquels vous les enseignants, vous avez à faire, doit impliquer en maintenant l'égalité la possibilité de s'adapter à cette diversité des publics. Quand il y a 2,5 % d'une classe d'âge qui est à l'école, la diversité des publics est moindre que quand il y a 60 % d'une classe d'âge

La réforme de l'école primaire, qu'a remarquablement conduite Xavier Darcos, est une réforme que je soutiens totalement et notamment dans l'affaire du soutien scolaire. Tout le monde est d'accord sur le fait qu'il y a des enfants qui ont besoin d'être plus encadrés que les autres, parce qu'ils ont plus de difficulté, souvent d'ailleurs corolées avec les difficultés sociales de la famille. Qu'est-ce que l'on a décidé de faire ? De permettre à l'enseignant d'une classe de dégager 2 heures de son temps pour faire du soutien aux enfants qui en ont besoin. C'est quand même une autre ambition que celle qui consiste à mettre 3 000 enseignants à faire le tour en permanence des écoles pour aller soutenir ceux qu'on leur signalait être des enfants en difficulté.

Mais nous nous essayons d'être pragmatiques soit cette nouvelle formule marche, et on la développe. Soit elle ne marche pas, et on en change. Ce qu'il faut c'est obtenir des résultats. Je crois aussi beaucoup à la mise en place de nouvelles évaluations-bilan, je crois que le mot évaluation doit pénétrer l'éducation nationale et que l'on ne doit pas en avoir peur.

J'indique au passage que le nombre d'enfants qui ont été aidés grâce au niveau système de la réforme du primaire est infiniment plus nombreux que celle que nous avions auparavant. Cela va aussi avec les études surveillées, encadrées, nous avons investi de l'argent et nous demandons à ce qu'on aille plus loin en la matière. Il ne s'agit pour moi d'ailleurs de faire le bilan de tout ce qui a été engagé et tout ce qui nous reste à faire. Le temps me manque. Ce que je veux vous dire, c'est qu'après avoir fait le primaire, l'université, on va travailler sur le lycée. Le lycée, tout le monde est bien convaincu qu'il faut une réforme. Il n'y a aucune raison que l'on continue à essayer de présenter les choses avec une filière noble, la filière scientifique et d'autres filières qui ne le seraient pas. Si le lycée organisé comme il l'était, était une réussite cela se saurait. Tout le monde me dit que cela ne va pas. Donc nous allons conduire cette réforme en prenant le temps de la concertation et de l'écoute.

Nous avons donc décidé avec le ministre, de demander à Richard Descoings, de conduire la concertation sous l'autorité du ministre, avec l'ensemble des intervenants pour que l'on soit prêt pour la rentrée scolaire de septembre 2010.

Je n'ai que deux certitudes : la réforme il la faut, le calendrier pour septembre 2010. Aucun tabou si ce n'est, je l'annonce, que l'on fera cette réforme sans enlever un centime et sans supprimer un poste au niveau du lycée. Richard Descoings a toute la confiance du ministre de l'Éducation nationale et la mienne, pour élargir car tout le monde est concerné par le lycée, pas simplement les enfants, pas simplement les enseignants, il faut les familles et un certain nombre de gens qui ont réfléchi. J'ajoute et c'est une affaire dont nous avons parlé, Xavier Darcos et moi, avec les représentants des lycéens que j'ai eu beaucoup de plaisir à rencontrer, qui m'ont semblé très raisonnables, il faut que l'on arrive à engager la meilleure concertation possible avec les lycéens, sans démagogie mais il faut que l'on arrive à les associer.

On va travailler là-dessus pour que dans chaque lycée, ils puissent donner leur avis, participer parce que je suis persuadé qu'eux aussi comprennent qu'il faut cette réforme. Et que l'on ne peut pas perdre de temps. J'aurai d'ailleurs l'occasion de recevoir avec le ministre à déjeuner les représentants des lycéens de ce département puisque j'aurai voulu discuter avec eux plus longuement et que je n'ai pas pu le faire. D'ailleurs je souhaite que cela soit à la fois les lycéens du lycée général et des bacs professionnels. C'est très intéressant pour moi d'arriver et de voir que les représentants des lycéens ont demandé à me rencontrer pour discuter. Mais c'est positif, ça veut dire qu'ils sont attachés à leur établissement, qu'ils sont préoccupés par leur avenir, qu'ils ont envie de discuter. On a eu une discussion bien intéressante, je regrette que certains syndicats que j'avais invités, n'aient pas voulu discuter. C'est comme cela. On aura d'autres occasions de discuter mais comment s'entendre si on ne discute pas ? Voilà et moi je ne veux pas que l'école devienne le champ clos de règlement de comptes politiques. En la matière, la gauche et la droite devraient faire preuve de beaucoup d'humilité sur le chantier de la réforme en matière d'éducation nationale parce que j'en vois beaucoup qui parlent et assez peu qui pourraient donner des leçons compte tenu de ce que fut la réalité à ce moment-là.

Je dis d'ailleurs aux enseignants, vous faites un métier passionnant, capital pour l'avenir de notre société, il faut naturellement que l'on prenne en compte vos angoisses, vos situations, vos difficultés et je ne suis pas contre. Mais il faut aussi que vous acceptiez l'idée que les améliorations sont possibles y compris professionnelles pour vous, au fur et à mesure que les réformes s'appliqueront. Des moyens supplémentaires, oui : mais avec la réforme, pas des moyens supplémentaires avant toute réforme parce que ça, c'est ce qui s'est fait dans le passé, moyennant quoi il y a eu des impôts supplémentaires et pas de réforme. Donc voilà ce que l'on va conduire, comment on va le faire. Je dois dire d'ailleurs que c'est parfaitement logique avec ce que l'on a fait dans l'enseignement supérieur, longtemps parent pauvre, avec un budget des universités qui augmentera d'un milliard chaque année pendant tout le quinquennat. On me parle des moyens toujours, le lycée l'année dernière a perdu 57 000 lycéens, dans la situation économique qui est la nôtre avec la nécessité d'accroître la compétitivité de la France. Est-ce que je peux me permettre de maintenir le même niveau de charges sur les emplois en France alors que le lycée a 57 000 enfants de moins ? Dire cela c'est essayer de faire appel au bon sens de la société française.

De tous les côtés on demande de l'argent en plus, mais dès qu'il y a un prélèvement les mêmes qui demandent de l'argent me disent ah non pas nous, pas ça. Donc on essaie de faire au mieux pour ajuster les moyens et les besoins. Donc sur cette affaire de réforme du lycée, elle se fera. Elle se fera selon le calendrier que j'ai indiqué et nous allons beaucoup travailler avec le ministre, Xavier Darcos, à qui je veux redire encore ma confiance, et Richard Descoings, pour imaginer la meilleure méthode pour associer tous les lycéens de France à cette réflexion sur l'avenir et élargir d'ailleurs la concertation, ça sera le travail de Richard Descoings à d'autres intervenants. J'imagine d'ailleurs que ce problème n'est pas simplement celui du lycée. C'est le problème plus général des jeunes. Très difficile l'angoisse de la jeunesse. Qu'est-ce qu'une politique de la jeunesse au 21e siècle ? Comment peut-on y réfléchir ? Le projet qui est le nôtre, c'est de travailleur autour d'une idée, la première demande des jeunes, c'est celle d'un droit à l'autonomie. Toute la politique de la jeunesse du Gouvernement doit être conduite autour de cette idée de renforcer l'autonomie des jeunes. Pourquoi ? Parce que quelqu'un à qui on donne les moyens de son autonomie, c'est un jeune qui devient libre de faire des choix mais il devient aussi responsable.

Il n'est pas question de penser que l'autonomie c'est uniquement la liberté, la liberté sans responsabilité n'existe pas.

Nous devons donc essayer de répondre à cette demande d'autonomie de nos jeunes, pour leur donner les moyens de choisir. Mais choisir, c'est être libre. Etre libre, c'est être responsable. Voilà comment j'aimerais que nous puissions construire une politique de la jeunesse. Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire, mais voyez sur l'idée directrice...Avec le Premier ministre François Fillon, nous avons demandé à Martin Hirsch de devenir Haut-commissaire à la jeunesse et de porter en accord avec ses collègues Xavier Darcos, Valérie Pécresse et ceux qui sont en charge de tant de domaines qui concernent la jeunesse, une politique de la jeunesse.

Martin Hirsch a toute ma confiance, il a mis en place le RSA, il surveillera la mise en place du RSA. Martin Hirsch est un homme qui toute la vie s'est engagé, c'est l'ancien président d'Emmaüs, successeur à ce titre de l'abbé Pierre. Je vois beaucoup d'intérêt à ce qu'un homme qui a fait de sa vie une vie d'engagement, soit celui qui au sein du gouvernement, sous l'autorité de M. Fillon, porte cette d'idée d'engagement auprès des jeunes, c'est cela qui est important.

Vous voyez, voilà ce que l'on essaye de faire. Des mécontentements, des protestations, des manifestations, c'est la démocratie. Les Français malheureusement sont bien habitués à voir ce spectacle. Dès que quelqu'un bouge dans l'éducation nationale. Je ne le prends pas à la légère, car mon devoir de pésident de la République c'est d'écouter toutes les sensibilités et l'expression de toutes les craintes. Je ne dois pas voir derrière chaque expression une volonté partisane, il y a des inquiétudes qui sont réelles et je me dois d'en tenir compte.

C'est d'ailleurs bien ce que j'ai fait lorsque nous avons décidé avec M. Darcos que l'on allait décaler d'un an le principe de la réforme. On l'a fait pourquoi ? Parce que j'ai senti avec le ministre le besoin d'expression de la société française. Là, regardez comme cela est difficile. On ne dit pas : « Ah mon dieu, comme il a raison de prendre le temps du dialogue » et les mêmes qui disent : « Oh, il va trop vite », là ils disaient : « il recule trop tôt ». Il fallait trouver un équilibre entre tout cela ! Remarquez, vous me dites, le Président de la République, à toi de te débrouiller avec cela. Bien. Mais ce sont vos enfants. Ce sont vos lycées, ce sont vos écoles, c'est votre travail.

Vous le comprenez bien, avec le ministre Xavier Darcos, nous allons conduire l'impérieuse nécessité de la réforme du lycée, en prenant le temps, en associant tout le monde. Je vais moi-même m'y engager aux côtés du ministre s'il le veut bien. Parce qu'il y a quelque chose comme une partie de l'avenir de la France qui s'y joue. Je vais faire avec les lycées comme j'aime faire tant de fois, aller au contact, rencontrer, discuter, écouter. Ensemble on va construire un projet. Il n'ya pas de raison que l'on n'arrive pas à construire un projet dans lequel se reconnaisse une majorité de bonne foi et bon sens et notamment les jeunes. Cette réforme, on va la faire avec les jeunes. Je demande à Xavier de conduire ceci avec Richard Descoings, puis je vais m'engager fortement pour convaincre pour que l'on trouve les bonnes solutions, puis porter cette politique de la jeunesse, cher Martin Hirsch, plus large, parce que j'entends bien qu'il y a une angoisse, et qu'il faut répondre à cette angoisse.

Mesdames et Messieurs, pour en terminer en vous remerciant d'être ici, remerciant les parlementaires qui sont là, vous-mêmes de vous être déplacés.

Il y a eu des périodes plus faciles pour diriger un pays que la crise que nous connaissons aujourd'hui. C'est valable pour tous les chefs d'État, et tous les chefs de gouvernement.

Je voudrais terminer en vous disant deux choses. Dans cette crise, il faut que le capitaine tienne solidement la barre. Parce qu'un bateau dans une tempête dont la barre n'est pas solidement tenue, il n'y a rien de bon qui puisse arriver.

Je dois dialoguer, je dois écouter, je dois concerter et je dois aussi décider. Avec le Premier ministre, avec les ministres, avec les parlementaires, avec les corps intermédiaires comme l'on dit, avec les syndicats, mais aussi décidés. Dans la crise, il faut être capable de prendre des décisions au bon moment. Si tous les autres pays prennent des décisions et nous nous n'en prenons pas, alors cela n'ira pas pour vous, cela n'ira pas pour le pays. Dans toutes les démocraties, il y toujours des gens, ce qui est parfaitement normal, qui sont contre et ils ont des raisons. D'autres qui sont pour. Il faut faire attention qu'à force de s'équilibrer cela se traduise dans l'immobilisme.

Deuxième chose. J'ai l'ambition pour notre pays, c'est que l'on sorte plus fort, nous la France, de cette crise que l'on y est rentré. Parce que face à cette crise, on peut se dire : « mon dieu, on attend que cela passe, mais on ne change rien ». Ou au contraire, on se dit : « allez, on n'a pas le choix, il faut que l'on se réforme, que l'on réforme l'hôpital, que l'on réforme le lycée, que l'on réforme la justice. Tout le monde parlait quand il y a eu toutes ces affaires, de la nécessité de changer. Ils étaient tous d'accord. Il suffit que je dise : allez, on va réformer.

Oh là là. On n'entend plus que ceux qui ne veulent pas que cela bouge. Mais les mêmes, trois semaines avant étaient tous d'accord pour que cela bouge. A condition que cela ne bouge pas.

Donc de cette crise on va essayer de faire, avec vous, une formidable opportunité du changement. Et les Français, les Français, il faut leur faire confiance. Ils ont cette capacité de changement. Si je prends deux exemples : l'interdiction de fumer dans les lieux publics : oh, qu'est ce que l'on a entendu quand on l'a fait ! Personne n'était d'accord. Même certains de mes amis élus ont dit : oh là là, lève le pied, lève le pied ! Ils en ont assez. Aujourd'hui, vous reprendriez un avion avec le voisin qui fume à côté ? Aujourd'hui, vous iriez dans des établissements, dans des lieux publics où les gens fument ? Pas du tout. Vous avez imposé, mes chers compatriotes, la réforme. Vous l'avez imposée à des corps intermédiaires qui la craignaient.

Regardez autre chose : la publicité à la télévision. Qu'est ce que j'ai entendu. Mon Dieu. On aurait cru depuis un an que tout le monde était contre ! Je vois maintenant les fameux sondages : tout le monde est pour. Je vous dis une chose : il n'est pas arrivé le responsable politique qui exigera que la publicité revienne sur le service public. Parce que les Français sont des gens pragmatiques. Ils aiment bien juger sur pièce. Ils en ont trop entendu des discours, des promesses. Ils veulent maintenant des résultats et voir ce que cela donne.

N'ayez pas peur du changement. N'ayez pas peur de la crise. N'ayez pas peur de l'avenir de vos enfants. A partir du moment où on est décidés tous ensemble à aller vers le changement, à s'engager, on sortira plus forts. Si on refuse, si on a peur, si on reste figés sur les schémas d'hier, Mesdames et Messieurs, alors on perdra la bataille de l'intelligence.

Cette bataille de l'intelligence, je veux la gagner.

Je veux dire en terminant à tous les enseignants que j'ai beaucoup de respect pour leur travail. J'imagine que pour eux c'est très difficile. Entre les familles qui ont trop d'exigences et celles qui n'en ont pas assez. J'imagine que pour vous cela ne doit pas être simple. Avec des enfants et des classes si hétérogènes dans le niveau, dans les origines. J'imagine que parfois on doit se poser la question : est-ce que j'ai bien fait de choisir ce métier ?

Avec les questions que vous pouvez vous poser sur votre place dans la hiérarchie sociale, dans l'organisation de la société, alors même que vous avez vu tant de choses qui vous ont scandalisé, sur les banques, sur la finance sur la spéculation. Je comprends cette interrogation qui peut vous prendre. Mais le pays a besoin de vous. Je sais parfaitement que l'on demande trop parfois à l'école. D'être la réponse au divorce, à la crise économique, au chômage, au travail des familles - non c'est moi ! Je vois une dame qui a des problèmes...c'est moi ! Je vois bien cela.

Mais ne perdez pas confiance dans votre métier. Les Français vous aiment. Tout le monde sait bien que votre métier est très difficile. Tout le monde le sait. Je peux vous dire en tant que président de la République que je vais multiplier les occasions de rencontres avec vous parce que je sais parfaitement que chez vous il y a cette interrogation qui vous taraude. On veut bien faire des efforts mais est-ce que la société les prendra en compte ? Est-ce que l'on sera valorisé dans ces efforts que l'on fait, nous les enseignants ? Je sais parfaitement que la plus grande partie des enseignants est d'une parfaite bonne foi et ne pense qu'à une seule chose : c'est à l'intérêt de leurs enfants.

Vous ne serez pas les oubliés de ce début du XXIe siècle.

J'ai beaucoup de problèmes, beaucoup de difficultés à affronter. Je sais que mon rôle c'est aussi d'être à vos côtés. Au-delà même des seules organisations syndicales qui vous représentent. Au côté des enseignements à la base.

Croyez que pour moi c'était vraiment un devoir que de venir ici. Pour vous parler. Je n'ignorais nullement que tel ou tel pouvait prendre prétexte de cela. Pour manifester un peu de joie.

Mais que voulez-vous, je ne suis pas un président de la République qui restera enfermé dans son Palais de l'Élysée. Je veux venir sur le terrain. Parce que c'est mon devoir. J'aime cela. J'aime rencontrer et dialoguer. Je sais, ce n'est pas très classique et puis on s'expose. Quand on vient, c'est tellement plus simple de rester à l'Élysée et de faire venir toujours les mêmes. Qui en ont vu tant avant moi et qui en verront tant après. Moi j'ai envie de voir les gens. J'ai envie de venir sur le territoire. Dans nos provinces, pour rencontrer celles et ceux qui font le quotidien du pays. Vous parler de l'avenir et vous dire ce que l'on essaye de faire. Avec bien sûr les erreurs que l'on peut faire les uns et les autres. Mais la confiance que j'ai également dans l'avenir. Il n'y a pas d'autre choix.

Mesdames et Messieurs, du fond du cœur j'espère que vous l'avez compris, je vous souhaité à chacun d'entre vous une année 2009 qui sera aussi passionnante pour vous que pour moi.

Je ne vous la souhaite pas aussi difficile, mais je vous souhaite d'avoir beaucoup de bonheur dans vos vies professionnelles et, si vous me le permettez, également dans vos vies personnelles.

Je vous remercie. »

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