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Place Divette (Cherbourg-Octeville)

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La place Divette est une place de Cherbourg-Octeville.

Elle tire son nom de la Divette, fleuve côtier sur l'ancien lit duquel elle est située [1].

Plan des quartiers Divette et bassin du commerce par Le Sauvage, 1836.

Situation

Elle est délimitée par l'avenue Delaville, le boulevard Robert-Schuman et les rues Paul-Doumer, de l'Ancien-Quai, Vastel, Louis-XVI. Elle est traversée par les rues François-Ier, Vastel et Paul-Doumer.

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Histoire

Anciennement place Collart, selon le patronyme du maire de Cherbourg à l'origine de son aménagement, puis place de la Divette [1].

Bâtiments remarquables

Aménagement de la place

Place de la Divette, vers 1900.

« La place Divette, qui est aujourd'hui la principale place de la ville, ne formait autrefois avec la place du Château et l'emplacement où sont situés [les halles, le tribunal et la prison] qu'un marais, d'où s'échappaient dans les grandes chaleurs des miasmes qui engendraient beaucoup de maladies dans les quartiers environnants et notamment dans celui du Faubourg [2] ». En 1739, des quais, une écluse et des jetées sont construits à cet endroit, avant d'être détruits par les Anglais lors de leur raid de 1758 et abandonnés au profit du nouveau bassin commencé en 1769 [3]. L’assèchement des marais du Cauchin sous la mandat de Nicolas Collart (1815-1830) crée un vaste terrain occupé par les foires.

Jour de fête foraine.

Suite au conseil municipal du 21 septembre 1811, des bâtiments publics l'entourent : la prison entre 1825 et 1827, la halle aux grains de 1828 à 1832, le temple protestant en 1835, le tribunal civil et de commerce (1840) [4].

Le 13 février 1835, sous le mandat de Nicolas Noël-Agnès, la municipalité décide le rachat à l'hospice des parcelles formant la place. « Depuis maintes années, la Ville ayant fait à grands frais combler le cloaque pestilentiel sur lequel est maintenant une belle place nommée place de la Divette, il est nécessaire qu'elle en devienne propriétaire. » [4]

Concours agricole.

En avril 1835, le conseil décide la construction d'un quartier entre la rue de la Poudrière (rue Émile-Zola) et l'avenue du Cauchin, et la création d'une nouvelle voie, la rue Hélain (aujourd'hui boulevard Mendès-France) pour le relier au quartier de la Polle [4].

En 1839, l'hospice vend aux enchères ses terrains à l'est et à l'ouest du bassin, où des entrepreneurs élèvent des entrepôts et des maisons [4].

Le 29 juillet 1886, la place Divette est le lieu de décollage du Torpilleur, ballon piloté par les aviateurs François Lhoste et Joseph Mangot, qui arrivent à Londres quelques heures plus tard [5].

Au début du siècle suivant, la place devient le cœur des animations de la ville, accueillant les spectacles ambulants, la fête foraine à Pâques dans les années 1930 et la foire-exposition de Cherbourg de 1926 à 1938. Autour s'ouvrent des magasins : marchands de grains et de fourrages, bourreliers, le vétérinaire Alfred Marais, futur père de Jean Marais, la forge Polidor, des coiffeurs, des bars et des maisons closes largement fréquentées par les marins rue du Faubourg et rue Thomas-Henry [4].

Le marché aux moutons.

Le marché aux bestiaux s'installe tous les jeudis au nord-ouest de la place près de la poste centrale édifiée en 1936, les marchands de produits laitiers et d'œufs dans la rue Louis XVI et les volailles dans les halles [4].

Mais rapidement, les problèmes de salubrité se posent, d'autant que le quartier est fréquemment soumis à des inondations du fait des grosses intempéries et du débordement du Trottebec [4].

Des tranchées sont creusées sur la place dès le printemps 1940 [6].

Durant l'occupation allemande, un blockhaus occupe la place de la Poste et des abris sont creusés sous la place Divette [4].

De l'îlot n° 1 au nouveau quartier de la Divette

Avant la transformation.

Après la Libération, le « baby-boom » (7 400 naissances en quinze ans) et les projets industriels (usine de retraitement de la Hague, Compélec...) engendrent une crise du logement. Grâce à des fonds de l'État, un plan de rénovation profonde est lancé sur le quartier de la Divette à partir de 1956 par l'équipe de René Schmitt. Les îlots insalubres sont identifiés en vue d'une rénovation et de nouveaux logements sont projetés à la périphérie de la ville (Amont-Quentin, quartier des Provinces) [4].

La municipalité, menée par le gaulliste Jacques Hébert depuis les élections de mars 1959, poursuit ce travail, en préconisant cette fois l'arasement total de l'îlot n° 1. Dernier vestige du Cherbourg populaire, ce quartier de 8,8 hectares abrite près de 1 300 Cherbourgeois entre les rues de l'Alma, Gambetta, Sébastopol, de l'Ancien-Quai, Delaville, Groult, Hélain, des Tanneries et le quai Alexandre III.

Le 26 février 1960, le conseil municipal de Cherbourg vote la déclaration d'utilité publique du projet, qui annonce 1 174 logements [7]. Longtemps après, Jacques Hébert, maire de Cherbourg, raconte que le projet est né d'une rencontre à Paris avec Pierre Sudreau, ministre de la Construction, qui cherche à lancer une opération-pilote [7]. « À Cherbourg, presque tout le monde était contre au début : les architectes, les avocats, les notaires, un peu toute la bourgeoisie locale que ce projet bousculait dans ses habitudes et ses petits pouvoirs. Le trésorier-payeur du département était contre aussi parce qu'il tenait que ça allait mettre la ville de Cherbourg en faillite. Les propriétaires pensaient qu'ils allaient être ruinés parce que les prix proposés au départ étaient trop bas pour eux. En fait, les seuls personnes qui se sont trouvées assez contentes du projet rapidement, ce sont les habitants du quartier eux-mêmes, qu'on a relogé provisoirement à l'Amont-Quentin. La ville payait la différence de loyers, et ils avaient des logements neufs et modernes à la place de leurs taudis [7].

Les 276 immeubles et maisons, 103 commerces et entrepôts, deux écoles, un cinéma (cinéma Saint-Joseph, rue des Ormes), le temple protestant doivent laisser place, sous le contrôle d'une nouvelle société d'économie mixte détenue à 65 % par la ville, à 1 174 appartements dans des bâtiments de 5 à 9 étages, 75 commerces, 170 garages, 180 places de parking et à un nouvel aménagement de l'espace public privilégiant des voies de circulation larges pour l'automobile [4].

Entre mai 1961 et avril 1966, les délogés, soutenus par une allocation municipale couvrant jusqu'à 90 % de leur nouveau loyer, s'installent dans les nouvelles cités du Haut-Marais, Charcot-Spanel, de l'Amont-Quentin, des Fourches. La démolition de l'îlot n° 1 s'étale sur plusieurs mois : en novembre 1961, les maisons des rues du Vieux-Pont et Thomas-Henry, en décembre le temple protestant, fin août 1962 la maison des syndicats, rue du Faubourg. Sous l'égide de l'architecte Paul Vimond, son renouveau s'amorce en 1962 par l'élévation des immeubles 1 et 2 des rues Vastel et François-Ier, et les fondations des immeubles 3 et 4 place Divette et rue du Vieux-Pont. Une grande partie de la zone étant autrefois marécageuse, les fondations sont construites sur des pieux battus. Pour chaque pieu, des buses cylindriques, d'un mètre de longueur chacune, ont été moulées individuellement sur place, puis un ensemble constitué d'un premier élément conique en béton suivi du nombre nécessaire de buses, est enfoncé verticalement jusqu'au sol résistant à l'aide d'un mouton : certains pieux ont ainsi plus de 35 mètres de long. Une fois enfoncé, chaque pieu est ensuite rempli de béton. Les intempéries de l'hiver suspendent les travaux [4].

Le premier appartement est livré en avril 1963, et reçoit la visite du préfet. Le 1er juillet 1964, c'est au tour de l'immeuble 4 d'accueillir ses premiers locataires et la circulation est partiellement rouverte [4].

Le marché aux bestiaux est transféré en février 1965 au Pont-de-Carreau. En septembre, les bâtiments entre la maison d'arrêt et la rue Albert-Mahieu sont rasés [8]. Deschateaux, marchand de tissu, ouvre le premier commerce de la place en novembre. Un parking est aménagé en lieu et place du blockhaus situé devant la poste, dynamité en décembre par l'entreprise Vastel. Huit cents logements sont livrés.

Le 30 avril 1966 est démoli le dernier bâtiment, perpendiculaire au futur boulevard Robert-Schuman, qui est inauguré le 13 février 1967. Une tour s'élève à l'entrée méridionale du boulevard, et une barre longe le quai Alexandre-III [4].

Avec la démolition de ses immeubles du côté pair, y compris le blockhaus situé en face du n° 87, la rue Hélain disparaît en 1975 au profit du boulevard Mendès-France, plus large. Puis les halles sont démolies pour construire le centre culturel qui abrite la bibliothèque municipale (1981) et le musée Thomas-Henry (1983) [4].

Dans les années suivantes, le centre culturel est totalement remanié pour devenir le Quasar. Vétuste et surpeuplée, la prison doit également fermer au profit d'un établissement départemental à Saint-Lô.

Cinquante après, Jacques Hébert se félicite d'avoir mené ce projet à bien : « À l'époque, pour ce genre de constructions, les immeubles de la place Divette étaient très bons : de l'espace, de la lumière, un bon rapport qualité-prix. Pour la circulation aussi, on a obtenu un bon résultat avec des voies longues et rectilignes favorisant la fluidité du trafic. Un autre objectif était de réaliser beaucoup de places de parking : on avait demandé au ministère l'équivalent de 1,3 voiture par appartement pour le stationnement, et je crois qu'on a finalement obtenu 1,2. Il fallait profiter d'une législation et des aides favorables de l'État, donc il fallait profiter du contexte. Ce qu'on a fait. Aujourd'hui, je trouve que le quartier a certes vieilli. L'architecture est un peu carrée. On aurait peut-être pu faire mieux. Mais, ne l'oublions pas, la finalité du projet était avant tout de loger beaucoup de gens dans des conditions de confort enfin modernes. Pas de faire de l'art. » [7].

Commerces et autres activités

  • Poste centrale [9] ; La Poste [10]
  • Inspection du travail [9]
  • Brument-Clos (matériaux de construction) [9]
  • Quincaillerie Allemandet [11][9]
  • L. Bouchard (musique) [12][13]
  • Dr Carpentier (Sécurité sociale) [9]
  • Cidrerie Jeanne
  • Jean Macé-L'Union (assurances) [14]
  • Aux armes et cycles de Saint-Étienne (A. Mourier) [15]

Notes et références

  1. 1,0 et 1,1 Raymond Lefèvre, Histoire anecdotique de Cherbourg à l'intention de nos écoliers, éd. Cherbourg-Éclair, 1941, rééditée en 1973 par l'imprimerie La Dépêche.
  2. Le Voyageur à Cherbourg en 1858, Bedelfontaine & Syffert, Cherbourg, 1858.
  3. Bazan, « Quels sont les hommes qui ont exercé le plus d'influence sur la création d'un arsenal maritime à Cherbourg et en particulier quelle part doit être attribuée à Vauban dans les projets relatifs à la fermeture de la rade », Séances du congrès scientifique de France, tenu à Cherbourg en septembre 1860.
  4. 4,00 4,01 4,02 4,03 4,04 4,05 4,06 4,07 4,08 4,09 4,10 4,11 4,12 et 4,13 Histoire d'un quartier : la Divette, exposition de la bibliothèque municipale Jacques-Prévert, Cherbourg, septembre 2010.
  5. La Nature, n° 690, 21 août 1886 (lire en ligne).
  6. Annie Jeanne, Jean Margueritte, Je me souviens ... La Presse de la Manche, hors-série, Société cherbourgeoise d'éditions, Cherbourg, p. 8.
  7. 7,0 7,1 7,2 et 7,3 « Nos années 60 », La Presse de la Manche, hors-série, novembre 2010.
  8. « 1965 - Cherbourg : visite de chantier », 120 ans en Cotentin, La Presse de la Manche.
  9. 9,0 9,1 9,2 9,3 et 9,4 La Police cherbourgeoise vous renseigne, Imprimerie commerciale cherbourgeoise, sd [1953].
  10. Portail des commerces de Basse-Normandie, site Internet, 2000 (lire en ligne).
  11. Cherbourg-Éclair, 25 décembre 1931.
  12. Ouest-France, 11 décembre 1954.
  13. Cherbourg Économique, Impr. Jacqueline, 3e trimestre 1960.
  14. Cherbourg-Éclair, 1er août 1933.
  15. Ouest-France, 11 décembre 1954.

Liens internes