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Mathilde l'Emperesse

De Wikimanche

Mathilde l'Emperesse (1102-1167).

Mathilde l'Emperesse, née à Londres en 1102, morte le 10 septembre 1167, est un impératrice du Saint-Empire romain germanique puis comtesse d'Anjou et duchesse de Normandie, étroitement liée au territoire formant aujourd'hui le département de la Manche par ses donations.

« Chante Reine, voici la terre… »

Chantereyne, Notre-Dame-du-Vœu. Ces noms sont familiers aux oreilles des Cherbourgeois. Ils désignent les noms d’un quartier et d’une paroisse. Tous savent-ils encore qu’ils sont liés au souvenir de Mathilde, dite l’Emperesse, qui fut reine d’Angleterre et duchesse de Normandie ? Ce souvenir oscille entre une très belle légende et une réalité historique qui nous font remonter au XIIe siècle.

Mathilde est la fille d’Henri Ier dit Beauclerc, et donc la petite-fille de Guillaume le Conquérant. Réunificateur du royaume anglo-normand contre ses deux frères, Robert et Guillaume, Henri Ier marie Mathilde, qui n’a que douze ans, à l’empereur germanique Henri V. D’où le surnom qu’elle a conservé dans l’histoire.

Elle est veuve au bout de neuf ans. Entre-temps, un grave évènement se produit en 1120 devant Barfleur avec le tragique et sanglant naufrage de la Blanche-Nef, dans lequel Henri Ier perd ses deux fils. Le roi décrète alors que Mathilde lui succèdera le jour venu sur le trône d’Angleterre et comme duchesse de Normandie. Après la mort en 1125 de l’empereur Henri V, il décide aussi de lui trouver un autre époux pour assurer sa descendance. En 1128, Mathilde convole en justes noces avec Geoffroi V Plantagenêt, comte d’Anjou. Un beau parti de quinze ans plus jeune que sa moitié. Ils ont un fils qui montera plus tard sur le trône d’Angleterre sous le nom d’Henri II.

À la mort de son père en 1135, Mathilde hérite donc de la couronne anglo-normande. Mais un de ses cousins ne l’entend pas de cette oreille. Il s’agit d’Étienne de Blois, qui ouvre immédiatement les hostilités contre sa royale parente. La lutte est rude et longue. Geoffroi finit toutefois par l’emporter, faisant valoir les droits de sa femme. Cette dernière se montre aussi très active durant cette sombre période d’anarchie. Autoritaire et orgueilleuse, Mathilde se révèle une guerrière pugnace. En quête d’aides et de renforts, elle effectue plusieurs voyages entre le Cotentin et l’Angleterre.

Une légende du XVIIe siècle, aussi tenace que dénuée de fondement historique, veut qu'en 1145, une de ces traversées faillit très mal se terminer car son navire fut pris dans une violente tempête. Elle implora alors le ciel de la sauver en faisant à la Vierge le vœu de lui chanter un hymne et de lui construire une chapelle là où elle toucherait terre. Son bateau aborda tout près de Cherbourg. En vue du rivage, le capitaine s’écria : « Chante reine, voici la terre.. ». Et voilà comment le nom de Chantereyne serait resté attaché depuis huit siècles à un quartier de Cherbourg [1]. Quant à la chapelle, elle est bien édifiée non loin de là et prend le nom de Notre-Dame-du-Vœu; nom aussi donné à une abbaye dont Mathilde et son fils deviennent les bienfaiteurs. Ce vocable sera réutilisé beaucoup plus tard, au 19e siècle, pour baptiser l’une nouvelle église paroissiale de Cherbourg.

Durant très longtemps, les habitants de Cherbourg se rendent en pèlerinage à la chapelle de leur reine d’un jour. Reconstruite au fil des siècles, la chapelle de Mathilde l’Emperesse est rasée en 1850 pour agrandir l’arsenal. Mais le souvenir de la royale chanteuse demeure vivace à Cherbourg.

Source

  • René Gautier (dir.), Dictionnaire des personnages remarquables de la Manche, tome 3, ISBN 2914541171.

Notes et références

  1. On voudra bien se souvenir que le nom de Chanteraine / Canteraine, littéralement « chante-grenouille », appartient au type toponymique bien connu des noms en cante / chante, et désigne des lieux humides (mares, sources, ruisseaux…) où sont susceptibles de coasser ces joyeux batraciens.