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Famille de Hauteville

De Wikimanche

Blason de la famille de Hauteville en Italie.

La famille de Hauteville est une famille de nobles de la Manche.

Cette famille de chevaliers est originaire du diocèse de Coutances. Aucun document ne permet de déterminer si elle est originaire de Hauteville-la-Guichard ou de Hauteville-sur-Mer. Tancrède de Hauteville était un petit hobereau « de race noble, peu fortuné » Il se maria deux fois. Il eut quinze enfants, dont douze fils, dont plusieurs partirent en Italie du Sud et en Sicile pour s'y tailler un royaume [1].

Historiographie

La conquête normande de l’Italie méridionale et de la Sicile est principalement documentée par trois sources contemporaines (1080-1100) mais indépendantes : Guillaume de Pouille, Geoffroy Malaterra et Aimé du Mont-Cassin [2].

Conquérants de la Sicile et de l’Italie méridionale

L'Italie en l'an 1000, à la veille de l'arrivée des Normands.

Comme le raconte Georges Laisney, « Tancrède de Hauteville (la Guichard) était un brave seigneur qui avait beaucoup d’enfants (douze garçons !) et assez peu d’argent pour les établir ». Aussi, plusieurs de ses rejetons, alléchés par des récits merveilleux et par l’appât du gain, décidèrent-ils de tenter l’aventure vers les terres ravagées par les Sarrazins [3].

Le sud de l'Italie et la Sicile sont alors constitués d'un ensemble hétéroclite de pouvoirs qui se font la guerre continuellement. L'empire byzantin (Pouilles et Calabre), les Arabes (Sicile) et les Lombards se partagent la région. Il se trouve que les Vikings (ou Normands) ont très bonne réputation dans ces contrées éloignées et sont très demandés pour servir de garde rapprochée aux souverains locaux ou, tout simplement, de mercenaires.

Prêtant main-forte aux princes lombards, ils se construisent une réputation de guerriers pugnaces et redoutables, puis depuis Melfi, se taillent un comté au détriment des Byzantins [4]. Leur « esprit d’entreprise » réussit d’autant mieux, ainsi que l’écrit Jean Mabire dans son Histoire secrète de la Normandie, qu’ils appartenaient à une famille « formidablement douée pour la conquête et le pouvoir » [3].

Mais cette réputation devient peur et haine : « La haine des Italiens contre les Normands a atteint un degré tel qu'il est presque impossible à un Normand, même s'il est pèlerin, de voyager dans les villes d'Italie sans être assailli, enlevé, dépouillé, frappé, jeté dans les fers, quand il ne meurt pas en prison » raconte l'abbé Jean de Ravenne ; une chronique milanaise les dit « plus atroces que les Grecs, plus féroces que les Sarrasins », une source grecque y voit « le fléau commun qui frappa tout le pays, avec ses vols, ses pillages, les coups donnés aux moines, les vêtements volés, les moines enlevés... », réputation qui aura la vie longue au delà de la première génération des Hauteville d'Italie [5].

Guillaume de Hauteville

Trois fils de Tancrède de Hauteville se décident à tenter l'aventure en 1037 : l'aîné Guillaume emmène avec lui ses deux frères Drogon et Onfroy et se met au service des Byzantins, qui le surnomment rapidement Guillaume « Bras-de-fer », en référence à son solide coup de lance.

Par la suite, la quasi-totalité des Normands, mécontents de leur solde, se retourne contre les Byzantins et combat désormais pour son propre compte. Les Byzantins sont chassés des Pouilles et Guillaume est nommé comte de Pouilles (ou comte d'Apulie) en 1043.

Drogon de Hauteville

À la mort de Guillaume, en 1046, son frère Drogon (nommé encore Dreux) lui succède. Reconnu maître de l'Italie du Sud, ambitieux, il est assassiné, le 10 août 1051, au moment où il s’apprêtait à combattre une coalition composée des forces papales, du Saint-Empire romain germanique, des Byzantins et des seigneurs lombards.

Onfroy de Hauteville

Pièce à l'effigie de Robert Guiscard

Onfroy prend la suite de Drogon en 1051. Le nouveau comte des Pouilles, autrement dit le chef des Normands d'Italie, doit affronter la coalition pré-citée. Il sort victorieux de la bataille de Civitate le 17 juin 1053 et fait même prisonnier le pape au cours des combats.

D'autres fils de Tancrède se rendent en Italie, accompagnés de troupes supplémentaires. Robert de Hauteville, dit Robert Guiscard (l'avisé), arrive vers 1045-1046 et aide son frère Onfroy à lutter contre le pape Léon IX. Geoffroy, Mauger et Guillaume sont en Italie en 1055, Roger en 1057[6].

Robert Guiscard

À la mort d’Onfroy, Robert devient comte de Pouille en 1057. Il finit de conquérir la Calabre et reçoit de ses compagnons le titre de duc de Pouille et de Calabre en 1059.

Roger de Hauteville

Roger recevant les clés de Palerme.

Roger, dit Roger Bosso, participe activement à la conquête de la Sicile et chasse les Arabes de l'île. Il est alors nommé par son frère grand comte de Sicile en 1071. Il obtient en 1098 du pape Urbain II le titre de légat apostolique, pour lui et ses successeurs, avec tous les pouvoirs attachés à cette haute fonction de l’Église romaine.

Expansion puis fin de la domination normande

Le royaume de Sicile en 1154 (en vert).

Mauger, Guillaume le Jeune, Humbert et Auvray sont autant de frères de Hauteville ayant traversé l'Europe pour rejoindre la « Normandie italienne ».

De 1061 à 1080, les Normands poursuivent l'expansion de leur territoire : ils chassent les Arabes, les Byzantins, les Grecs, les Lombards. Leur duché comprend les Pouilles, la Calabre, la Sicile, les villes de Bari, Palerme, Messine, la principauté de Salerne et une partie des Abruzzes.

En 1081, Robert Guiscard s'attaque directement au cœur de l'empire byzantin et occupe Corfou et la Thessalie. En 1084, il occupe Rome.

Le fils de Robert Guiscard, Roger Borsa, succède à son père, mort de maladie, en 1085, et met ainsi fin à la lignée des frères de Hauteville. Mais la famille de Hauteville reste une famille très puissante en Italie jusqu'à la fin du 12e siècle : le fils de Roger Bosso, Roger II de Sicile, devient roi de Sicile en 1130. Les derniers Hauteville sont le roi Guillaume II de Sicile, mort en 1189 et la reine Constance de Hauteville, qui par mariage, fait passer le royaume dans une autre famille.

Tous les frères de Hauteville sont enterrés dans la sépulture familiale de Venosa.

Arbre généalogique

  • Tancrède de Hauteville[7]
  • x avec Murielle
  • x avec Fressende
    • Robert Guiscard (?-1085), duc de Pouille, de Calabre et de Sicile (1057/59-1085)
      x avec Aubrée de Buonalbergo
      • Emma
        • Tancrède d'Antioche (~ 1072-1112)
      • Bohémond de Tarente
        x avec Constance de France (1078-1126)
        • Bohémond II, prince d'Antioche (~1108 -1130)
    • x avec Sykelgaite de Salerne
      • Roger Borsa x Adèle de Flandres
        • Guillaume, duc de Pouille et de Calabre
      • Guy
      • Robert
      • Olympias ou Hélène, fiancée à l'empereur bizantin Michel VII
      • Mabille (x Guillaume de Grantmesnil)
      • Mathilde (x Raimond Bérenger II, comte de Barcelone)
      • Sybille
      • Gaitelgrime (x Dreux)
      • N ? (x Huges d'Este)
    • Mauger, comte de Capitanate
    • Guillaume, seigneur du Principat (.-1080)
      x Marie de Salerne
      • Robert, comte du Pincipat
      • Tancrède de Syracuse
      • Richard
      • Rainald
    • Alfred
    • Hubert
    • Tancrède
    • Roger de Hauteville, comte de Calabre et de Sicile
      x avec (?)
      • Jourdain de Hauteville
      • Flandine
      • Adelise
      • Geoffroi
    • x en 1081 avec Éremburge de Mortain
      • Mathilde
      • x avec Rainold d'Alife
        • Robert
      • . . . .
    • x en 1091 avec Adélaïde del Vasto
    • Frédesende
      x avec Richard d'Aversa
      • Jourdain Ier, comte de Capoue de 1078 à 1090

Une autre fille, anonyme, mentionnée comme sœur de Robert Guiscard, donne naissance à Godefroi de Conversano et Robert de Montescaglioso. Le premier marie sa fille, Sybille de Conversano, au duc de Normandie Robert Courteheuse en 1100.

Bibliographie

Livres
  • Les Normands en Méditerranée aux XIe et XIIe siècles, sous la direction de Pierre Bouet et François Neveux, Colloque de Cerisy-la-Salle, Presses universitaires de Caen, 1994
  • Jean-Marie Martin, Italie normande XIe-XIIe siècles, coll. La Vie quotidienne, éd. Hachette, 1994
  • Éric Barré, Les Normands en Méditerranée, Centre de recherche d'histoire quantitative, Caen, 1998
  • Pierre Aubé, Roger II de Sicile - Un Normand en Italie, éd. Payot, 2001
  • Michel Subiela, Le Sang des Hauteville, éd. Pygmalion 2007, réédité en 2009 aux éd. J'ai lu
Articles
  • Paul Lecacheux, « Les Normands dans l'Italie du sud et en Sicile : l'épopée des Tancrède », Notices, mémoires et documents, vol. 36, 1924, p. 124-159
  • Michel de Boüard, « Les Normands en Italie », Annales de Normandie, tome V, n° 2, mai 1955, tome V, n° 3-4, octobre-décembre 1955, tome VI, n° 1, janvier 1956
  • Fernand Maloisel, « La souveraineté normande en Méditerranée, XIe et XIIe siècles », Revue du département de la Manche, tome 13, n° 50, avril 1971
  • R. Lanfranc, « Les Normands en Italie », Heimdal, n° 6, décembre 1972

Notes et références

  1. André Dupont, Histoire du département de la Manche, tome III, « Les conquérants », éditions Ocep, 1976.
  2. Pierre Toubert, « L'historiographie italo-normande au XIe siècle. À propos d'une édition récente », Le Moyen Age, 2005/2 (Tome CXI), pp. 351-354. (lire en ligne).
  3. 3,0 et 3,1 René Gautier (dir.), Dictionnaire des personnages remarquables de la Manche, tome 1, Éditions Eurocibles, Marigny, 2001, ISBN 2914541090.
  4. Jean-Marie Marin, « ROBERT GUISCARD (1015 env.-1085) », Encyclopædia Universalis, (en ligne).
  5. Pierre Aubé, Roger II, Tempus Perrin, 2016.
  6. Éric Barré, « Les Normands en Méditerranée », Revue de la Manche, tome 59, fascicule 237, Société d'archéologie et d'histoire de la Manche, juillet-septembre 2017.
  7. Pierre Boyer, Les Normands en Méditerranée, Presses universitaires de Caen, 1994

Article connexe

Lien externe