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Centre de stockage de la Manche

De Wikimanche

Le centre de stockage de la Manche (CSM) est un centre de stockage de déchets radioactifs, créé en 1969, situé à Digulleville, dans la commune de La Hague.

Présentation

Le centre de stockage de la Hague borde l'usine de retraitement de la Hague. Il couvre 15 hectares (12 au départ). Le stockage proprement dit est fait sur une bande de terre de 600 m de long, 300 m de large et 10 m de haut [1].

Il est spécialisé dans le stockage des déchets de faible et moyenne radioactivité, et de courte durée de vie (normalement inférieure à 30 ans). En réalité, il a reçu des déchets beaucoup plus toxiques comme du plutonium (100 kg), de l'uranium (200 tonnes), ainsi que du plomb [2].

Le site cesse de recevoir des déchets en 1994 [3]. Le dernier colis arrive précisément le 12 juillet [4].

Depuis sa création, quelque 1 469 255 colis [5] ont été entreposés là, qui représentent 527 214 mètres cubes provenant pour l'essentiel des centrales électronucléaires françaises [3].

Le centre entre en « phase de surveillance » en 2003 prévue pour durer 300 ans [3]. La décision est officialisée le 10 janvier 2003 par un décret signé du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin [6].

Le projet de stockage de déchets radioactifs solides en provenance de Saclay, est d'abord prévu par Infratome, filiale des Potasses d'Alsace, dans les dunes de Biville, puis à Baubigny, mais se heurte à la volonté locale de créer un parc naturel sur la côte est du Nord-Cotentin. Quand la localisation à proximité immédiate de l'usine atomique est évoquée, les édiles locaux, les maires du canton de Beaumont-Hague, le conseiller général, les députés Jacques Hébert et Pierre Godefroy, entament un bras de fer face au préfet de la Manche en novembre 1967 [7].

Le centre a d'abord été géré par la société Infratome, sous le contrôle du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), puis, à partir de 1979, par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), créée la même année, qui est devenue un établissement public en 1991.

Dangerosité

La sûreté du site a toujours été discutée et fait régulièrement l'objet de polémiques. L'État affirme qu'elle est assurée. Il met en avant deux rapports officiels qui en attestent. Mais le réseau Sortir du nucléaire conteste le sérieux et l'indépendance de cette affirmation. Christian Kernaonet, ancien directeur d'exploitation du centre, est aujourd'hui très critique : « Il faut reconnaître que dans les premières années de stockage, on a mal fait le boulot. Nous avons travaillé avec les techniques de l'époque, mais elles n'étaient pas à la hauteur. » [2].

Une fuite de cesium sur une plate-forme a été revélée à la fin de 1973.

Des rejets des eaux de pluie recueillies sur le centre même ont été régulièrement effectués dans le ruisseau Sainte-Hélène. Des traces anormalement élevées de tritium y ont été constatées en septembre 1976.

Selon l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest (Acro), le centre continue de polluer. Les nappes phréatiques et certains ruisseaux, notamment Le Grand Bel, sont aujourd'hui fortement contaminés en tritium.

Les déchets les plus radioactifs restent stockés ans l'enceinte de l'usine de retraitement de la Hague, contiguë au Centre de stockage de la Manche.

En 1995, des travaux de recouvrement des déchets nucléaires sont entrepris, puis interrompus en novembre, puis autorisés le 7 janvier 1996 par la Cour d'appel de Caen [8], avant que, en mars 1996, Franck Borotra, ministre de l'Industrie, ne suspende à son tour l'opération dans l'attente de la décision de la commission scientifique indépendante décidée par le Premier ministre [9].

Le 16 juillet 1996, la commission Turpin chargée par le gouvernement d'évaluer le centre estime qu'il ne présente pas de risque significatif de pollution du milieu par les radionucléides, mais elle n'en souligne pas moins que le centre ne pourra être rendu à la nature avant des millénaires alors que l'Andra tablait sur une « banalisation » du site en 2294 [10]. Jugeant irréalistes le transfert des déchets dans un autre centre plus adapté, la commission demande une surveillance accrue du site pendant cinquante-cinq ans, la réalisation d'études épidémiologiques régulières et la préparation d'une couverture définitive à base de schistes et d'argiles dont le coût est estimé à plus de 300 millions de francs [10]. À cette occasion, l'on apprend que, outre les déchets radioactifs, le centre contient 27 000 tonnes de plomb [10].

Le 8 et 9 novembre 2001, plusieurs fuites sur un réseau de drainage sont détectées, qui laissent échapper plusieurs centaines de litres d'eau contaminés [11].

En 2012, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) publie un rapport d'une inspection ayant eu lieu du 3 au 7 octobre 2011 sur l'usine UP2-400, en cours de démantèlement [12]. Ses conclusions sont très critiques. Elle y a trouvé « des déchets non valorisés toujours entreposés sur le site, en vrac ou emballés, dans des conditions qui ne correspondent pas forcément aux exigences actuelles » [12]. Elle pointe également « des désordres limités dans le génie civil de plusieurs installations, comme des fissures ou éclats laissant apparaître le ferraillage, ou encore des infiltrations » [12].

Le 8 juin 2016, Greenpeace dépose plainte pour pollution auprès du parquet de Cherbourg [13]. L'organisation écologiste affirme que le centre laisse échapper du tritium, qui pollue la nappe phréatique et la rivière Sainte-Hélène proche [13]. Le centre et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) soutiennent que la règlementation est respectée et que les taux de tritium plus élevés résultent de accident survenu en 1976 [13].

Mémoire du stockage

Le centre a pris des dispositions pour garder la mémoire des déchets stockés. Plus de 10 000 documents retraçant l'activité du centre sont ainsi archivés. Une copie a été transmise aux Archives nationales en 2004.

Visites

Il est possible de visiter le centre de stockage après réservation au 02 33 01 69 00 (durée de la visite 2 h).

Un hall d'information est ouvert au public en accès libre du lundi au vendredi, de 8 h 30 à 12 h et de 13 h 30 à 17 h. Le bâtiment d'accueil du public (Bap) est inauguré le 9 juin 1997 par Victor Convert, préfet de la Manche [14].

Administration

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Adresse

BP 807 - ZI de Digulleville
Beaumont-Hague
50448 La Hague
Tél. 0810 120 172

Direction

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  • 1999-2013 : Jean-Pierre Vervialle
  • 2013-2021 : Florence Espiet-Subert
  • 2021-actuel : Julien Recarte

Notes et références

  1. Sarah Caillaud, « Déchets nucléaires : comment préparer l'avenir ? », Ouest-France, 27 janvier 2020.
  2. 2,0 et 2,1 Jean-Pierre Buisson, « 40 ans de stockages radioactifs dans la Hague », Ouest-France, 22 septembre 2009.
  3. 3,0 3,1 et 3,2 Jean-Baptiste Gouyon, « Déchets à vue courte : un moindre problème », Science & Vie, n° 225, hors série, décembre 2003.
  4. « Fermeture du centre de stockage de la Hague », Le Monde, 13 juillet 1994.
  5. Inventaire géographique des déchets radioactifs, Andra, 2006.
  6. Décret n° 2003-30, 10 janvier 2003 (lire en ligne).
  7. René Moirand, « Les parlementaires du Cotentin protestent contre le projet de stockage de déchets radio-actifs au cap de La Hague », Le Monde, 17 novembre 1967.
  8. « La Hague achèvera l'enfouissement des déchets radioactifs », Le Monde, 9 février 1996.
  9. « La suspension des travaux de recouvrement est confirmée », Le Monde, 8 mars 2001.
  10. 10,0 10,1 et 10,2 Hervé Morin, « Les déchets radioactifs de la Hague devront être protégés plus efficacement et beaucoup plus longtemps », Le Monde, 18 juillet 1996.
  11. « Plusieurs fuites ont été localisées sur un réseau de drainage des eaux du centre de stockage de la Manche », Le Monde, 16 décembre 2001.
  12. 12,0 12,1 et 12,2 « Les vieux déchets d'Areva sous surveillance », Ouest-France, 29 mars 2012.
  13. 13,0 13,1 et 13,2 « Greenpeace porte plainte pour pollution contre un vaste centre de déchets nucléaires », AFP, 8 juin 2016, 15 h 44.
  14. « Retour sur un moment d'histoire », Le Journal de l'Andra (Manche), n° 16, hiver 2013-2014.

Articles connexes

Liens externes