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Élément camp / champ

De Wikimanche

L'élément camp / champ apparaît dans de nombreux toponymes et microtoponymes de la Manche, le plus souvent à l'initiale, parfois en finale, et surtout en tant qu'appellatif isolé dans les microtoponymes. Il a le sens de « terre cultivée ».

Étymologie

L'élément camp / champ est issu du gallo-roman °CAMPU < latin campum, accusatif de campus « plaine, terrain plat », puis « terre cultivée, champ ». L’origine du mot n’est pas très claire, et l’on a pu y voir la trace d’un substrat pré-latin en Italie. Cette langue inconnue pourrait néanmoins être indo-européenne, si l’on rapproche campus du grec καμπή (kampē) « courbure » [d'un radical indo-européen °kam-p- « courber »] et du gaulois cambo- « courbe (de rivière) » [radical °kam-b- « courber »], sens qui permet de passer à celui de « terrain riche et plat (donc fertile et cultivé) dans une courbe de rivière » à celui de « plaine, terre cultivé ». On aurait donc affaire à la base indo-européenne °kam- « courbe ».

Emploi en toponymie

Dans la Manche, la forme normano-picarde camp se rencontre au nord de la ligne Joret (qui va dans ce département de Granville à Tessy-sur-Vire), et la forme française champ au sud. Cependant, cette dernière s'est parfois substituée à la forme locale au nord de la ligne, comme par exemple aux Champs-de-Losque. C'est très souvent le cas en microtoponymie, où les formes francisées sont beaucoup plus nombreuses que les formes normano-picardes. Inversement, il faut noter qu’à date ancienne on trouve des exemples de celles-ci au sud de la ligne Joret, démontrant la plus grande extension de la zone phonétique normano-picarde autrefois (on en trouve de même des traces dans tout le nord de l'Orne). C'est par exemple le cas de Champeaux (Campels en 1071/1085, Campeaus en 1172). C'est la raison pour laquelle nous ne distinguerons pas de manière systématique ces deux formes dans les listes ci-dessous, une forme française moderne pouvant parfois dissimuler une ancienne forme normande.

L'élément camp / champ est généralement déterminé par un nom de personne (ancien propriétaire ou exploitant) ou par un adjectif. Dans les noms de communes et d'anciennes paroisses, les deux éléments sont généralement soudés (par exemple Camprond), la composition pouvant être fort ancienne. Cette soudure a pu entraîner une altération graphique du mot, aboutissant à des formes en Cam-. Ses emplois non déterminés sont plus rares dans les noms de communes. Par contre en microtoponymie, les lieux-dits ou noms de hameaux, de formation souvent plus récente, sont constitués d'éléments graphiquement dissociés (par exemple les Champs Ronds au Teilleul). Mais les microtoponymes anciens peuvent avoir une graphie soudée, à l'instar de la plupart des noms de communes : ainsi, Rocamp à Néhou, Beauchamp à Saint-Martin-d'Audouville, ou encore Champfrémont à Saint-Martin-de-Cenilly.

En outre, un certain nombre de noms de communes, d’anciennes paroisses et d’églises comporte un déterminant de type -des-Champs, -les-Champs, parfois -aux-Champs (latin médiéval a Campis, de Campis, in Campis, voire de Campania, in Campania), pour évoquer la situation géographique particulière de l'édifice, ou parfois de l’agglomération elle-même. Ces toponymes sont sont presque exclusivement des hagiotoponymes (noms de lieux contenant des noms saints), dont la fréquence explique la nécessité de faire usage d’un élément distinctif. L’emploi de tels déterminants a parfois varié dans le passé, avant de se fixer sous leur forme actuelle (ainsi, Saint-Martin-des-Champs, aujourd’hui aux Champs-de-Losque, fut également appelé Saint-Martin-l’Égaré, c’est-à-dire « éloigné », « perdu en pleine campagne »).

Abréviations : a., ancien(ne); c., commune; chn, chemin; é., écart; f., ferme; h., hameau; l.d., lieu-dit; lot., lotissement; p., paroisse.

À l'initiale

- avec un nom de personne :
- avec un adjectif :

En finale

- avec un adjectif :

Emploi isolé

- formes simples :
- formes dérivées :

L’ancien français champel (forme normano-picarde campel) était le diminutif de champ. Il est à l’origine de l’appellatif toponymique champeau / campeau « petit champ ».

S'il a existé en ancien français un diminutif champelet / campelet, par contre on ne connaît pas de °camperel. Peut-être en a-t-on un exemple dans le nom suivant (avec évolution dialectale -el > , noté -et) :

Annexes

Notes et références